Coup de Pouce - (07)July-August 2020

(Comicgek) #1

ILLUSTRATIONS: SHUTTERSTOCK/E.


qu’Audrey et Hugo corroborent. «Notre entraide,
notre écoute de l’autre, notre sens du partage se re-
trouvent aussi dans notre vie de couple en général»,
dit Hugo. «C’est donnant-donnant derrière les four-
neaux... comme partout ailleurs!» ajoute Audrey.
Mais attention, faire équipe ne veut pas dire tout
faire ensemble dans la cuisine! «Au sein d’une rela-
tion équilibrée, on est capable de reconnaître nos
forces et celles de l’autre. Il y a des personnes qui
n’aiment pas faire à manger, ou qui n’y excellent pas.
Si les deux partenaires s’entendent sur le fait que l’un
cuisine plus que l’autre, et que ce dernier se charge
d’une autre tâche, c’est aussi faire équipe et commu-
niquer», explique Véronique Jodoin — qui précise
quand même qu’encore aujourd’hui, les tâches rela-
tives à la cuisine comme la gestion des repas, l’épice-
rie, la planification ou le budget incombent encore
grandement aux femmes, dans les couples hétéro-
sexuels. «Mais je remarque qu’il y a plus d’hommes
qui cuisinent», nuance-t-elle. Pour Maxime, 42 ans,

et Steven, 38 ans, l’accord est simple: c’est Maxime
qui cuisine, et Steven trouve d’autres moyens d’aider
et de démontrer son amour à son conjoint. «J’adore
cuisiner, c’est ma passion. Pour moi, faire à manger
à Steven est une marque d’affection, mais je ne m’at-
tends pas à ce qu’il me rende la pareille, puisqu’il le
fait de tant d’autres façons. Notre générosité ne
s’exprime pas de la même manière, et c’est parfait
comme ça, du moins pour nous», dit Maxime.
Véronique Poulin rappelle que ce n’est pas tout le
monde qui a le même langage amoureux; on n’aime
pas tous donner et recevoir de l’affection de la même
manière. «Les attentions, les services rendus —
comme la cuisine! — sont des façons de démontrer
son amour, mais il en existe plusieurs autres!»

... ET DE COMPÉTITION!
Pour Karine, 34 ans, et Étienne, 43 ans, tous les
deux chefs cuisiniers de métier, la cuisine prend
des airs de terrain de jeu. «Nous cuisinons tous les
deux beaucoup, et nous y prenons vraiment du
plaisir. On n’a pas les mêmes forces, les mêmes
recettes signatures, alors quand on décide de

cuisiner un bon plat pour faire plaisir à l’autre, on
y met tout notre cœur. On veut s’épater, s’en
mettre plein la vue», dit Karine. De l’avis de
Véronique Jodoin, vouloir s’impressionner est un
très bon signe! «Les partenaires cherchent à se
faire plaisir et s’amusent ensemble. Il n’y a pas de
gagnant ou de perdant, on est plutôt dans la com-
plicité», dit la sexologue.

« Chez certains couples,


faire à manger est une source


de conflit parce qu’ils se


trouvent , entre partenaires,


dans une lutte de pouvoir. »



  • Véronique Jodoin, sexologue


RAS-LE-BOL?


QUELQUES CONSEILS DU PSYCHOLOGUE
SPÉCIALISÉ EN THÉRAPIE DE COUPLE
FRANÇOIS ST PÈRE POUR RÉGLER LES
CONFLITS DANS LA CUISINE.

S’il y a une lutte de pouvoir , une hiérarchie entre
les deux cuistots... «Le mieux, c’est de déterminer à
l’avance qui aura le pouvoir décisionnel pour le moment
passé dans la cuisine. En d’autres mots; qui sera le chef, et
qui sera le sous-chef pour cette recette à préparer en-
semble? C’est aussi un bon moment pour faire le point sur
sa relation, de se demander si cette tendance hiérarchique
s’applique à d’autres sphères de notre vie de couple.»
Si l’un des partenaires se charge de presque toute
la popote... «Encore aujourd’hui, même quand les
femmes travaillent autant que leur conjoint, elles
prennent en charge 70 à 80 % des tâches ménagères,
dont la cuisine. C’est souvent exaspérant pour elle de
devoir planifier des repas, faire l’épicerie, préparer les
plats pour la famille. Mon conseil? On s’assoit et on
décortique les responsabilités liées à la cuisine une à
une, puis on en délègue une ou plusieurs, graduellement,
au conjoint moins participatif. Pour lui, c’est une occasion
d’apprendre — surtout si le conjoint qui a plus de
connaissances et de compétences en la matière lui
transmet patiemment son savoir. Évidemment, ça ne
fonctionne que si les deux partenaires sont ouverts à ce
changement dans la répartition des tâches...»
Si la compétition en cuisine laisse un goût amer ...
«La compétition derrière les casseroles peut être avan-
tageuse; ça nous permet de nous dépasser, d’apprendre
de l’autre, et de ressentir de la fierté. Mais si elle tourne
au vinaigre, qu’on reçoit ou qu’on donne beaucoup de
critiques, elle peut devenir malsaine. Cette attitude de
reproches peut être la manifestation d’autres problèmes
d’estime personnelle ou de problèmes relationnels. Si la
compétition fait mal, on se questionne. Est-ce que c’est
une façon pour moi d’exprimer ma frustration? Est-ce que
j’ai l’impression d’avoir ma place dans la relation?» •

| 35
JUILLET-AOÛT 2020

Ma vie | COUPLE |

Free download pdf