du 11 au 17 février 2021 PA RI S M AT C H
Henri Cosquer,
le découvreur du site,
dans la salle
des chevaux.
montéesurcinqaxes,qu’ila missixansà
mettreaupoint: «Aveclesdonnéesde la Drac
[direction régionaledesaffairesculturelles],
on fraise des volumesdansdupolystyrène.
Dans ces moules,oncouledela résinepour
créer des coquessurlesquellesserontpro-
jetées des images3D,centimètrecarrépar
centimètrecarré,sansdéformation.Si une
failletraversela têted’uncheval,ondoit
la retrouverdansla réplique», expliquele
plasticien. Pour créerleurclonenumérique,
lesartistesutilisentlesdonnéesrecueillies
parLucVanrellet sesplongeursà l’aidede
lalaserométrie oudela photogrammétrie.
Ainsi, ils reproduisentchaquevolume,micro-
strie ou petit bourreletminéral.Et puisil y a
les dessins. AlainDalisa luiaussiunfaible
pour ces trois petitschevaux, prochesdela
surface,quivontbientôtêtrelessivéspar
l’eausalée.«Desfigurestrèsattachantes.
Cequ’ilenrestera,c’estcequenousfai-
sons.Il fautêtreà la hauteurdecettegrande
responsabilité.» Dansle domainedudes-
sin,racontel’artiste,l’émotionnepassepas
parla technique: «Il fautretrouverle geste,
la rapiditéd’exécutiondesfigures.Recréer
cettesensationd’aisance.Leshommespré-
historiquesétaientdesartistesconfirmés.
Ilsontapprisdescodesqu’onvaretrou-
verpendant 20000 ans,del’Espagneà la
Russie: lestêtesdeprofil,lescornesdetrois
quarts,lespatteséloignéesducorps,la défi-
nitiond’unvolumesurunplan.Descubistes
avantPicasso!» «Ilsn’ontpasdessinépour
s’amuserpendantlesdimanchespluvieux»,
confirmeleplasticienGillesTosello,qui,à
la têtedeDécodiffusion,réalised’autres
panneauxducôtédeToulouse: «Ils n’avaient
pas peur de la page blanche. Leurs courbes
sont parfaites, tracées du premier coup. Pour
les copier, on doit comprendre qu’un trait au
charbon de bois est plus dense au début du
mouvement. Cela nous permet de savoir où
commencer.C’estunegrammairevisuelle.
S’ilsvoyaientnospanneaux,j’aimeraisqu’ils
s’yreconnaissent,et mêmequ’ilspensent:
“Ilssontfêlés,ils ontdécoupédesmorceaux
denotregrotte!”»
Titulaire d’une thèse sur l’art préhistorique,
GillesTosellorappellequecettegrottea été
ornéependantdeuxpériodesprincipales,
voilà 30000 ansd’abord,puis 6 000 ans plus
tard. A cette époque, la mer était 120 mètres
plusbaset le rivagese situaità 5 kilomètres
dela caverne.A la findela glaciation,il y
a 10000 ans, la montée des eaux a englouti
les trois quarts de la cavité, qui, eux aussi,
étaient probablement ornés. Dans le quart
miraculérestant,onretrouve des figures
connues,commele bison,les chevaux ou
lesmains,et d’autresplusrares,commeces
pingouinsoucesphoquesmoines.D’autres
motifsrestenténigmatiques: desmainsont
étérayéesavecviolence,parunevolonté
clairedelesannihiler.Pourquoi? Mystère.
«Leurs dessinset leursgravures nous
parlenttoujours,poursuitGilles Tosello.
Onestfrappéet intriguéparleur beauté. Il
y a cethommetué,dessinéschématique-
ment,allongéavecunelancequi le traverse.
Leshommespréhistoriquesse représentent
trèspeu,jamaisdefaçonréaliste.J’aime
l’hypothèseselonlaquellecesdessinsfont
partiederécits,demythes.» A Toulouse et
à Montignac,lesdeuxartistes plasticiens
ontchacunconcluunpactemoralavec
nosancêtres,le mêmequele plongeurLuc
Vanrella signéensilenceet sousl’eau: ne
pastrahir,et sauverle lienténu qui nous
relieà eux. Nicolas Delesalle
La Villa Méditerranée porte son nom.
Le bâtiment de Stefano Boeri abritera la réplique de la grotte.