Paris Match - France (2021-02-25)

(Antfer) #1

LIVRES


Magali le HucHe
seule avec les Beatles
Tous les parents d’enfants
de moins de 5 ans connaissent son
trait. Magali Le Huche, c’est, entre
autres, la dessinatrice de la série de
livres musicaux « Paco ». A 42 ans,
elle signe sa première bande des-
sinée « adulte », autofiction qui
revient sur son adolescence, dans
les années 1990, paralysée par une
phobie scolaire, le dégoût que lui
inspirent ses congénères disciples
de la Bruelmania au moment où elle
se découvre une obsession pour les
Beatles. « Nowhere Girl », c’est donc
Magali, fillette de 11 ans, considérée
comme inadaptée par le système
éducatif, et qui un beau jour sera
sauvée par sa découverte musicale
des quatre garçons dans le vent.
Si le journal un rien naïf d’une ado
presque ordinaire semble un peu
trop suivre les pas des « Cahiers
d’Esther » de Riad Sattouf , la magie
surgit lorsque, au son des mélo-
dies des Beatles, le rêve s’emballe
et les couleurs jaillissent.
Naissance d’une voca-
tion et d’un imaginaire
d’artiste.^ Karelle Fitoussi^

Nicole claveloux
la Belle Bizarre
A 80 ans, l’inclassable
Nicole Claveloux reçoit enfin
l’hommage que sa carrière
réclamait avec une exposition
hommage et un Fauve d’honneur
l’an dernier à Angoulême. Troisième
tome d’une anthologie que
consacrent les éditions Cornelius à
ses travaux adultes, cet album est
l’occasion de découvrir raretés et
inédits publiés entre 1977 et 1980
dans « Métal hurlant », « Charlie
mensuel » ou dans la très féministe
revue « Ah! Nana ». Il y a d’abord la
découverte du plaisir par une enfant
qu’une horde d’adultes s’empresse
de museler d’un définitif « Sale!
On ne raconte pas ces choses-là! »
dans « Une gamine toujours dans la
lune ». Puis l’humour noir jouissif de
la série en couleurs « Sans famille »,
où un foyer s’autodécime dans un
huis clos sanguinolent et savoureux
en cette période postconfinement.
Les « Crapougneries », croisement
hybride de Crumb et des Crados, où
des mômes muets s’adonnent dans
l’obscurité de leur chambre à des
activités solitaires et secrètes. Ou
encore « Le petit légume qui rêvait
d’être une panthère », petite fable
faussement candide d’une ambition
étouffée. En tout, ce sont huit
histoires fantasques et visionnaires
qui toujours racontent, aux confins
du malaise et du politiquement
correct, les carcans et l’enferme-
ment d’une féminité qui dérange.
Puissant et réjouissant. K. F.

« Téléréalité »,
éd. Gallimard,
256 pages,
19 euros. Parution
le 4 mars.

Il aurait adoré écrire « Illusions
perdues ». Aurélien Bellanger se
régale des destins de jeunes loups
venus de la province conquérir Paris.
Mais on sent qu’il aime la presse
autant que la littérature. Dans ses
romans, on retrouve des Rubempré ou des Julien Sorel,
mais aussi des plans comptables et de la bonne géopolitique.
Il y a quinze ans, son coup d’essai avait mis en scène un
jeune nobody timide clairement inspiré par Xavier Niel, le roi
des messageries roses puis de l’Internet. Cette année, avec
« Téléréalité », il réinvente la destinée époustouflante d’un
petit gars de la Drôme qui ressemble comme deux gouttes
d’eau à Stéphane Courbit, le génie de la télé bling-bling.
Tout le monde est là, de Pascal Sevran à Nicolas Sarkozy
et de Patrick Le Lay à Alain Minc. On dîne au Siècle, on
passe au Fouquet’s, on imagine les décors du « Loft » puis
de la « maison des secrets »... L’argent ruisselle, les bons
sentiments l’accompagnent, les mauvaises manières aussi.
Absolument irrésistible. Des pages « addictives » comme une
série Netflix. gilles Martin-chauffier / Photo Julien Weber

« Nowhere Girl », éd. Dargaud,
120 pages, 19,99 euros.
Parution le 5 mars.

aurélieN BellaNger


crève l’écraN


« Une gamine dans la lune
et autres récits », éd. Cornelius,
112 pages, 23,50 euros.

LA SEMAINE dE


PARIS MATCH DU 25 féVRIER aU 3 maRS 2021

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