The Yale Anthology of Twentieth-Century French Poetry

(WallPaper) #1

part 2. 1916–1930: dada and the heroic period of surrealism


Elle a toujours les yeux ouverts
Et ne me laisse pas dormir.
Ses rêves en pleine lumière
Font s’évaporer les soleils,
Me font rire, pleurer et rire,
Parler sans avoir rien à dire.


Je te l’ai dit


Je te l’ai dit pour les nuages
Je te l’ai dit pour l’arbre de la mer
Pour chaque vague pour les oiseaux dans les feuilles
Pour les cailloux du bruit
Pour les mains familières
Pour l’œil qui devient visage ou paysage
Et le sommeil lui rend le ciel de sa couleur
Pour toute la nuit bue
Pour la grille des routes
Pour la fenêtre ouverte pour un front découvert
Je te l’ai dit pour tes pensées pour tes paroles
Toute caresse toute confiance se survivent.


Le Diamant qu’il ne t’a pas donné


Le diamant qu’il ne t’a pas donné c’est parce qu’il l’a eu à la fin de sa vie, il n’en
connaissait plus la musique, il ne pouvait plus le lancer en l’air, il avait perdu
l’illusion du soleil, il ne voyait plus la pierre de ta nudité, chaton de cette bague
tournée vers toi.
De l’arabesque qui fermait les lieux d’ivresse, la ronce douce, squelette de ton
pouce et tous ces signes précurseurs de l’incendie animal qui dévorera en un clin
de retour de flamme ta grâce de la Sainte-Claire.
Dans les lieux d’ivresse, la bourrasque de palmes et de vin noir fait rage. Les
figures dentelées du jugement d’hier conservent aux journées leurs heures en-
trouvertes. Es-tu sûre, héroïne aux sens de phare, d’avoir vaincu la miséricorde et
l’ombre, ces deux sœurs lavandières, prenons-les à la gorge, elles ne sont pas
jolies et pour ce que nous voulons en faire, le monde se détachera bien assez vite
de leur crinière peignant l’encens sur le bord des fontaines.

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