The Yale Anthology of Twentieth-Century French Poetry

(WallPaper) #1

part 5. 1967–1980: the explosion of the next generation


Le Chau√eur


Qu’est-ce qui rôde autour du chau√eur
Qui a quitté son autobus, s’est assis
Place de l’Opéra au bord du trottoir
Et glisse dans la douceur de n’être
Déjà plus que ses larmes? Les passants
Qui se penchent sur une tristesse
Commune et présentable aimeraient
Qu’il leur dise que le vent naguère
Savait venir de la forêt vers une robe,
Ou qu’un jour son frère lui a lancé
Même ton ombre ne voudra plus de toi.
Les pieds dans l’eau, le chau√eur
Ne sait que répéter : ce travail est dur
Et le monde n’est pas complaisant.


Variations


Elle sait aussi qu’il avait dit : «Les autres
chient du marbre», et qu’il jouait
parfois en plein, disons, bordel (c’est
dans Amadeus), ça donne, Ah! vous dirai-je,
du goût à la douceur des notes, entre marches
et feintes, où le temps ne fait pas de cadeau :
elle joue, ré, mi, do, tou-our-ment, un mi
d’un quart de temps dans un grand mot,
pour dire le bon faux pas, et le silence
n’est pas une forme qui s’éloigne : c’est pour
tout rassembler quand le traversent les fulgurantes
exactitudes, l’arpège de l’autre main. Plus tard,
la roue du cœur, l’ivresse, les mots fêlés,
ou tenir les étoiles! Ce soir Ah! vous dirai-je,
ce n’est que le début de la course et déjà
le reflet ironique de soi, tandis que l’utopie
discrètement se tient derrière la lampe dans
les mains de maman, ce soir, le temps est un octave.

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