part 6. 1981–2002: young poetry at the end of the millennium
on a exilé mon corps à l’intérieur de mon corps
on a e√acé mon nom de tous les registres
jusqu’aux épousailles des deux rives
j’ai porté en moi le vide comme la bouche d’un noyé
décembre a disparu derrière l’horizon
j’ai appelé — seul le silence était attentif
j’ai vu les siècles s’égarer jusqu’à nous
le grenadier refleurissait entre les stèles
ma ville changeait de maîtres comme de parure
ma terre: un nuage en marge du levant
pourquoi chercher un lieu quand nous sommes le lieu
mon ombre a gravi un long chemin jusqu’à moi
un jour je suis entrée dans la maison de la langue
j’ai niché deux oiseaux à la place de cœur
j’ai traversé le miroir du poème et il m’a traversée
je me suis fiée à l’éclair de la parole
j’ai déposé un amour insoumis dans le printemps des arbres
et délivré mes mains pour que s’envolent les colombes
La Terre
portait le ciel en tête
né d’un désir de lumière
l’oiseau portait son chant
les pierres sacrées
empruntaient leur forme
au soleil à la lune
et toujours la terre
portait le ciel en tête
puis vint l’homme
sa détresse extrême
autour de son cri
la gangue du silence
dans son regard plus qu’ailleurs
la mort