CHAPO WEB
Chapo
TITRE WEB
Titre
ÇA SE PASSE AU « POINT »Hors-série
Pour les 400 ans
de la naissance
de Molière, le dossier
complet sur l’œuvre
et la vraie vie
de ce génie français.Union européenne
La France a pris la
présidence tournante
de l’UE. Lepoint.fr
décrypte chaque jour
les enjeux de ces
six mois cruciaux.Événement
Inscrivez-vous à « Les
outre-mer aux avant-
postes », organisé le
25 janvier à l’Institut
océanographique de
Paris, sur lepoint.fr.À nos lecteurs
Sale époque pour la liberté d’expression
À
Hongkong, la presse libre n’est plus. Le site d’in
formation Citizen News s’est sabordé, craignant
pour ses journalistes après un raid policier qui
a mené à l’arrestation d’une partie de la rédaction de
son concurrent Stand News, désormais fermé. En juin
dernier, c’était l’Apple Daily, le plus gros quotidien pro
démocratie de la ville, qui baissait le rideau. La nuit
tombe sur Hongkong...
En Europe, les réactions sont molles. Au fond, per
sonne ne s’en émeut. Les Lumières s’éteignent làbas, et
notre silence relatif confirme qu’elles faiblissent chez
nous, comme l’avait montré Carlo Strenger dans son
livre Allons-nous renoncer à la liberté? (1) Si nous sommes
heureusement à l’abri de ce type de répression – aucune
comparaison n’est possible –, des signes montrent que
nous perdons le goût de la liberté d’expression. Dernier
exemple en date? La suspension d’un professeur de
Sciences Po Grenoble, coupable de s’être élevé contre la
doxa « woke » de son établissement, a suscité des
protestations, mais aussi bien des soutiens... La censure
a ses partisans.
Autre signe récent? La fusion, sans opposition ou
presque, du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) et
de la Haute Autorité pour la diffusion des œuvres et la
protection des droits sur Internet (Hadopi). Le tout, dé
nommé Autorité de régulation de la communication
audio visuelle et numérique (Arcom), devient un sur
puissant et inquiétant gendarme d’Internet. Le CSA, dont
le rôle – pour le secteur privé – ne se justifiait que par la
rareté des fréquences hertziennes, aurait dû disparaître
avec l’essor du numérique. Hélas, c’est l’inverse qui s’est
produit. Ces dernières années, le pouvoir n’a eu de cesse
de lui confier des prérogatives sur Internet. Avec cette
fusion se dessine un embryon de commission de cen
sure numérique. Le rôle de la justice – seule légitime en
principe à sanctionner les abus de la liberté d’expres
sion – passe progressivement au second plan, derrière
une administration. Quelle régression! Évidemment,
les missions de l’Arcom sont encadrées et, quoi que l’onpense d’Emmanuel Macron, il est un démocrate. Mais si
un émule de Viktor Orban ou Nicolas Maduro parvenait
un jour à l’Élysée, il lui serait assez facile d’en faire une
machine de censure, dotée de surcroît, puisqu’elle est
habilitée à « réguler » les plateformes numériques, de
moyens technologiques stupéfiants. Qui s’en soucie?
Bien peu. Se rappeler, toujours, ce que disait Clemen
ceau : « Lorsque nous nous sommes orientés vers la libération
des hommes, des intelligences, nous n’avons pas le droit tout
à coup de reculer épouvantés devant notre œuvre et d’en ap-
peler, comme des enfants qui ont peur, à une autorité protec-
trice dont nous serions les premières victimes. »
Cela ne signifie évidemment pas que les géants du
numérique ne doivent pas rendre des comptes. Pour les
horreurs qu’ils colportent, mais aussi parce qu’ils me
nacent directement la liberté de la presse en détrous
sant les journaux. Abusant de leur position dominante,
les seigneurs du Net ont aspiré les contenus de la presse,
les données de ses lecteurs... et donc une bonne part de
ses revenus. Sans jamais payer pour les reportages et les
enquêtes, qui coûtent nécessairement cher, à l’inverse
des fake news ventilées sur leurs réseaux. La presse a
certes bien des tares, mais dépouiller le journalisme re
vient à étouffer sa liberté...
Pour compenser – un peu – ce holdup permanent,
une directive européenne et une loi française de 2019
ont mis en place le « droit voisin », ou droit d’auteur des
journaux. Sauf que Google refuse de s’y conformer et
continue de se croire audessus des lois, pratiquant au
passage le chantage et l’intimidation (Le Point en a été
tout particulièrement l’objet). Oh, ce n’est pas par désir
de contrôle idéologique, seulement par cupidité, mais
cela s’additionne au reste, et souligne l’émergence d’une
puissance qui souffre peu la contestation. « L’air de la li-
berté se raréfie », selon la formule de François Sureau (2).
La résolution du Point en 2022? Défendre, plus que ja
mais, notre – et votre – liberté d’expression § ÉTIENNE GERNELLE
(1) Belfond, 2018.
(2) Sans la liberté, Gallimard, coll. « Tracts », 2019.LE POINT HORS-SÉRIE - GRANDES BIOGRAPHIES - NUMÉRO 31 - MOLIÈREISBN 978-2-85083-044-0 BRIDGEMAN IMAGESHORS-SÉRIE – GRANDES BIOGRAPHIES
Les secrets d’un génieMolière
La vraie histoire de sa vieTartuffe, Dom Juan, Alceste, Scapin...
Ce qu’il faut savoir de ses personnagesLes femmes,la morale,le pouvoir... Sa vision du monde (^)
Avec Paul Audi, Patrick Dandrey, Georges Forestier, Denis Podalydès, Boualem Sansal...
6 | 6 janvier 2022 | Le Point 2578
KIRAN RIDLEY/GETTY IMAGES VIA AFP