Le Point - FRA (2022-01-06)

(EriveltonMoraes) #1
LE POINT STORIES POUR

À l’ombre du polar

Le meilleur thriller


scientifique de l’année


I


maginez un virus qui ne se
manifeste ni par une fièvre
ni par une toux, mais par
une transformation de ses
victimes en... hommes préhis-
toriques. Cette idée géniale,
Xavier Müller, docteur en
sciences, l’a développée dans
le palpitant thriller Erectus,
L’Armée de Darwin. Sept ans
après la première vague de
l’épidémie, le virus est sous
contrôle. Les malades vivent
dans des réserves. Mais ils sus-
citent la convoitise d’une organisation secrète dé-
terminée à créer une nouvelle espèce humaine, aux
pouvoirs décuplés. Déclinant des thématiques d’une
actualité brûlante à partir de solides bases scienti-
fiques, L’Armée de Darwin est glaçant de réalisme. À
lire de toute urgence!
Xavier Müller, Erectus – L’Armée de Darwin (Pocket, 544 p., 8,40 €)

Encart-POCKET.indd 1 21/12/2021 14:43

> Beau livre

Les nouvelles


« Fleurs du mal »


« Je vous serre la main, poète. » Les 126 poèmes
de l’édition de 1861 des Fleurs du mal sont pim-
pés façon slam de 2021. Spleen et Idéal devient Vide et Sidéral, Don
Juan aux enfers, Satan au paradis et Les Tableaux parisiens se muent
en Selfies contemporains. Il fallait oser. On ouvre ce livre inquiet en
se disant qu’il faut être fou pour s’attaquer à un tel monument. On
le referme KO, émerveillé par les illustrations d’Edmond Baudoin,
impressionné par ce Vincent Gelot, qui, de chaque fleur baudelai-
rienne, a si génialement rêvé l’arborescence. De son exploration
des « maux ordinaires de la modernité » jaillit la symétrie, parfaite,
déchirante, entre ce que le prophète voyait et la réalité de notre
époque. Ce livre est une beauté, et une performance § M. D. T.
Nos Fleurs du mal, de Vincent Gelot, illustrations d’Edmond Baudoin
(La Martinière, 208 p., 29 €).

> Cinéma

Love story à Bamako


Lara et Samba : voilà l’inou-
bliable couple du nouveau film
de Robert Guédiguian. Lui,
Samba, fils d’un riche mar-
chand de tissus de la capitale du
Mali, est corps et âme dévoué
au socialisme naissant, et au
chef d’État de la nouvelle répu-
blique : Modibo Keita. Elle, Lara,
vient d’être mariée de force au
fils du chef de son village. C’est
là que le jeune homme l’a ren-
contrée. Lara fuit son destin.
Les jeunes militants progres-
sistes l’emmènent à Bamako.
Et ensuite... Quand Guédiguian
quitte la Canebière, il n’oublie
ni ses convictions politiques ni
sa tendresse à filmer les êtres.
Certes, Dakar (où le tournage a

eu lieu) n’est pas Bamako.
Certes, le twist est surtout la
métaphore d’une jeunesse im-
mortalisée par le photographe
Malick Sidibé (dont les clichés,
à l’origine de ce film, le ryth-
ment). Et l’on peut encore
émettre des réserves quant au
didactisme sur cette période
historique et ses échos actuels.
Mais voilà. Alice Da Luz et Sté-
phane Bak (photo) emportent
tout. Ils réinventent l’amour, le
désir, redonnent à rêver. Et
jusqu’au bout : avec cette Lara
aux cheveux gris, au pas dan-
sant, incarnée par la fabuleuse
écrivaine Ken Bugul! § V. M. L. M.
Twist à Bamako, de Robert Guédiguian.
En salle.

Le Gurkha de Calcutta


Avec la permission de Gandhi, d’Abir Mukherjee.
Traduit de l’anglais par Fanchita Gonzalez Battle.
(Liana Levi, 320 p., 20 €). Parution le 13 janvier.

Même défoncé et mis debout sur ses « pattes de
veau » au fond d’une fumerie d’opium, Sam Wyn–
dham reste ce policier qu’on retrouve avec une
joie féroce. Un Blanc – Écossais comme l’auteur –,
dans l’Inde coloniale de 1921, où couve la future
indépendance, et que l’on suit depuis
L’Attaque du Calcutta-Darjeeling, prix
« Le Point » du polar européen en


  1. Wyndham échappe de justesse
    à une descente de police – ironie! –
    dans ce troisième volet (le deuxième,
    Les Princes de Sambalpur, est reparu
    chez Folio), pour se retrouver face à
    un cadavre poignardé par un kukri, la
    lame courbe des Gurkhas, les guer-
    riers népalais. Le premier mort de la liste. Aux an-
    tipodes de la cancel culture, Mukherjee retourne
    aux sources de l’Histoire avec une causticité mor-
    dante, laissant saillir le racisme, les communauta-
    rismes et toute la bêtise dont cette époque,
    comme la nôtre, fut capable § JULIE MALAURE


Le

co

in^ du po
la
r

Le Point 2578 | 6 janvier 2022 | 77

ED. LIANA LEVI – MATTEO SEVERI/AGAT FILMS

Free download pdf