Le 19M (ci-dessus) accueille 11 maisons d’art,
dont le plumassier Lemarié (à droite).Lemarié, le plumassierDepuis 1880, Lemarié manie aussi bien
les plumes que les fleurs. Les premières,
issues exclusivement d’oiseaux comes-
tibles à l’infinie palette chromatique, sont
stockées dans des sacs en kraft avant
d’être coupées une à une pour être col-
lées minutieusement sur des sacs ou des
pièces de couture. Côté fleurs, géraniums
ou pommiers sont reproduits à l’aide
d’emporte-pièces et de gaufroirs avant
que la main les boule, comme on dit dans
le jargon, pour donner la forme des pé-
tales. Dans les archives de la maison se
trouvent de multiples déclinaisons – en
tweed, cuir, plastique... – du camélia, le
mythique emblème de Chanel, confec-
tionné chaque année ici à plus de
40 000 exemplaires. L’équipe, qui est jeune,
preuve du regain d’intérêt pour l’artisa-
nat, est menée par la directrice artistique
Christelle Kocher (également à la tête de
sa marque, Koché). C’est à elle qu’il in-
combe de traduire les briefs du studio de
création de Chanel, mais également des
autres grandes maisons de luxe françaises.C
’est un geste architectural qui a fa-
çonné le paysage de ce carrefour ins-
tallé entre le 19e arrondissement
parisien et Aubervilliers. Un bâtiment
triangulaire de 25 500 mètres carrés que
l’architecte Rudy Ricciotti a comme en-
touré de fils pour accueillir plusieurs
maisons d’art rachetées par Chanel de-
puis 1985. Au total, ce sont 11 artisanats
et plus de 600 salariés réunis dans cet es-
pace baptisé « le 19M », 19 faisant réfé-
rence à l’arrondissement et à l’un des
chiffres porte-bonheur de Gabrielle
Chanel, M signifiant « mode » mais aussi
« maisons » et « mains ». C’est justement
autour de la découverte de l’artisanat
qu’ouvre le 18 janvier la Galerie du 19M,
1 200 mètres carrés à l’esthétique brute,
avec baies vitrées et sol en béton ciré. En
décembre 2021, cet espace a servi de dé-
cor au défilé Métiers d’art de Chanel, la
collection qui célèbre tous ces artisans
avec lesquels la maison de la rue Cambon
travaille – comme les autres griffes de
luxe friandes de cette excellence. Pour
commencer cette programmation pensée
pour tous les publics, la galerie a donnécarte blanche aux 11 maisons d’art rési-
dentes, afin d’expliquer leur travail. Des
ateliers sont aussi prévus pour s’initier à
la broderie et participer à une œuvre mo-
numentale qui reprend la cartographie
du quartier dans lequel le 19M est im-
planté. Enfin, le travail de la main sera
mis en lumière à travers les nombreux
partenariats créatifs noués par le 19M.
Avec Camondo, puisque Gala Espel, di-
plômée de cette école de design et d’ar-
chitecture, signe la scénographie de
l’espace consacré à la genèse de l’archi-
tecture du lieu. Avec le Festival interna-
tional de mode de Hyères, via l’exposition
de projets réalisés par les finalistes et les
métiers d’art. Ou encore avec le prix Picto
de la photographie de mode et la Dotation
19M de la photographie des métiers d’art,
avec le travail de l’artiste Lucie Khahou-
tian, lauréate 2020. Autant de prétextes
pour découvrir ce projet conjuguant es-
prit collaboratif, démocratisation de l’ar-
tisanat et volonté d’ancrage territorial.
Du 18 janvier au 23 avril 2022.
La Galerie du 19M, 2, place Skanderbeg,
75019 Paris. http://www.19 m.frAux portes de la capitale, le 19M, navire signé Rudy Ricciotti, inaugure sa Galerie. Du brodeur
au plumassier, 11 métiers d’art qui font l’excellence de Paris y travaillent et y sont mis en lumière. PAR VICKY CHAHINE
Découvrir les mains du luxe
STYLE
84 | 6 janvier 2022 | Le Point 2578CHLOE LE RESTE – SP