Poetry of Revolution: Romanticism and National Projects

(Sean Pound) #1

Pour t’inonder bientôt de ses vives lumières!
Je te vois, Haïti, fière entre les plus fières,
Répandre sous tes pas l’harmonie et la paix,
Monter âpre sentir sans défaillir jamais,
Aller toujours, hanter jusqu’aux plus hautes cimes,
Et de tous les malheureux combler tous les abîmes...
Frère, qui que tu sois, si tu n’as pas un cœur
Que jamais n’épouvantes aucun rire moqueur
Et que la foi nourrit, féconde de sa sève,
Ne viens pas dans ma nuit effaroucher mon rêve.


(Partie I)

TOUSSAINT-MESSIE

Et Brunet – un Français, mais un traître –Brunet
Voyant que des colons l’étoile déclinait,
Au dessein de Leclerc ouvrit toute son âme ;
C’était peu d’être lâche, il fallait être infâme.
Or, Brunet le devint. Et comme fit Judas
Baisant Christ pour trahir, Brunet n’hésita pas
A parler d’amitié pour trahir Louverture.
Et lui, ce grand, planant dans sa large envergure,
Et lui, voyant, là-bas, passer la Liberté
Souriant à sa race : et lui, l’esprit hanté,
Le cœur embrase comme une ardente fournaise,
Il partit confiant dans une âme française.


Oh! Dieu trouvait si beau, si grand, si noble, enfin,
Le rêver du héros : il trouvait si divin
Le projet que conçut le noir en sa démence,
Que pour mettre dessus le sceau de sa puissance,
Créer dans Louverture un nouveau rédempteur,
Il voulut que le blanc, ironique, insulteur,
Lui fit jusqu'à la lie accepter le martyre.


Et Toussaint l’accepta.
Calme, au milieu du rire,


Au milieu de la joie infinie, au milieu
Des sarcasmes du blanc vainqueur, sous l’œil de Dieu
Fécondent son génie, il laissa cette terre,
Volcan dont jusqu’au alors il était le cratère :
Il laissa son asile aimé, son Ennery,
Où pour lui le bonheur avait déjà fleuri :

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