Méditerranée Mer Vivante 20e édition

(jfmeinesz) #1

176 Méditerranée - Mer vivante


Gardons la mer vivante


Donia, une appli cartographique pour connaître et protéger les fonds
fragiles de la Méditerranée
Pierre Descamp, biologiste marin, société Andromède Océanologie.
[email protected]

La cartographie des habitats marins
de Méditerranée française a été
initiée il y a une trentaine d’années
et avait comme objectif premier
la connaissance de notre patrimoine naturel. Ces
cartes se sont ensuite imposées comme de bons
outils de gestion de l’environnement littoral avec
une nécessité de précision de plus en plus grande.
Les moyens consacrés à cette tâche ont donc été
renforcés, de nouvelles technologies sont apparues
(sonars latéraux, images satellitaires, sondeurs
multifaisceaux, etc.) et ont facilité le travail des
cartographes.
Ce n’est pourtant qu’assez récemment, sous
l’impulsion de l’Agence de l’Eau Rhône Méditerranée
Corse, que ce travail de romain a été achevé sur
nos 1700 km de côtes et entre 0 et 100 mètres
de profondeur. Les données existantes, souvent
disparates et dispersées ont été rassemblées, les
zones blanches ont été investiguées et la première
carte « continue » des habitats marins des côtes
françaises de la Méditerranée a pu être publiée en



  1. La cartographie, consultable sur le portail
    des réseaux de surveillance des eaux côtières
    de Méditerranée http://www.medtrix.fr (cartes Donia),
    présente la nature des fonds marins jusqu’à la
    profondeur de -100 m au 1:10 000 e.
    Que nous montre cette cartographie? Tout
    d’abord que l’essentiel des espèces apparaît à
    moins d’un kilomètre du bord, formant un mince
    trait de vie incroyablement exigu avant de vastes
    étendues désertiques. On y voit l’extension des
    prairies verdoyantes de posidonie et des massifs de
    coralligène entre 30 et 100m de profondeur environ.
    Ce travail de longue haleine a également permis de
    préciser l’intensité et la localisation des impacts dus


aux activités humaines : aménagements côtiers, rejets
urbains, pêche aux arts trainants, pollutions amenées
par les fleuves. Plus surprenant – et à vrai dire plus
inquiétant - est la persistance des dégradations.
L’impact des bombes de la seconde guerre mondiale
sur les petits fonds est encore parfaitement visible!
Cela doit nous interpeller sur la faible résilience
des habitats marins : toute dégradation persiste
longtemps au détriment des générations futures.
L’impact des ancres des bateaux apparait comme
très fort dans les golfes et les baies de la côte d’A zur
(Saint-Tropez, Antibes/Golfe-Juan, Cannes/Saint
-Hospice, etc.). Sur ces sites, les ancrages à répétition
au cœur des herbiers ont détruit les posidonies sur
de grandes étendues.
Afin de permettre à tous les usagers de la mer de
disposer de ces données précieuses et de les prendre
en compte, une application pour smartphones
et tablettes gratuite et ouverte à tous a été créée :
DONIA (www.donia.fr). Donia permet de naviguer
sur un fond de carte enrichi intégrant la nature
des fonds marins mais aussi des données inédites :
la position des autres utilisateurs, les dangers, la
règlementation, des informations multiples à terre
et en mer.
Le cœur du projet Donia est de permettre à tout
plaisancier ou capitaine de yacht d’éviter d’ancrer
dans les écosystèmes sensibles de Méditerranée,
en particulier la posidonie. Au-delà de cet objectif,
l’application permet à une communauté de
passionnés d’échanger des informations, de faire
vivre la traditionnelle solidarité maritime pour
échapper aux mésaventures classiques du mouillage
saturé ou de la baignade au cœur d’un banc de
méduses. Donia permet de profiter pleinement de
la richesse biologique de la Méditerranée sans la
dégrader.
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