La Culture Fang Beti Bulu

(Richellius) #1
Le Mevungu

Rite strictement féminin, exercé
par les femmes adultes aux
jeunes filles. C’était une sorte
d’enseignement éducationnel
sacré, axé sur la vie au foyer en
tant que mère, épouse et
gardienne des traditions.
Comment se célébrait-il? Et à
quelle occasion?
Tous les Beti s’accordent à dire
que le rituel Mevungu était
organisé lorsque les habitants du
village trouvaient qu’il était «
devenu dur » (Laburthe-Tolra,
Minlaaba : histoire et société traditionnelle chez les Bëti du Sud-Cameroun, Université de Paris, 1975,
4 vol., 1704-40 f. (thèse), 1975)^1 en langues beti on dira « aled » « ayet » « alet ». Cela signifie que les
prises à la chasse étaient faibles, voire nulles, ainsi qu’à la pêche, que la récolte était mauvaise, bref que
le village était menacé de disette.


Pourquoi Organisait-on Le Mevungu?

Le rituel pratiqué par les femmes permettait de retrouver l’abondance et l’opulence. Tolra (Laburthe-
Tolra, 1975) fait d’ailleurs à propos un rapprochement entre la fécondité des femmes et celle de la
brousse. Le Camerounais Joseph Mvogo Nganoma écrit à propos des femmes officiantes : « Les femmes
chargées de cette initiation doivent être des modèles et leaders parmi les femmes de la famille, maîtriser
le rituel correspondant ainsi que les enseignements à dispenser ».
Ainsi donc ce sont les femmes qui ont fait preuve de qualités morales incontestées mais surtout des
femmes qui ont été des plus fécondes, qui étaient chargées de repeupler la « brousse de viande », pour
la société. Et d’ailleurs l’autre raison pour organiser le Mevungu était la stérilité ; lorsqu’une femme
était stérile, les autres femmes, fécondes, tentaient d’apporter la solution en organisant le Mevungu.
Cependant le rituel avait une portée au-delà de l’abondance du gibier, ou de la fécondité d’une femme.
En effet, le Mevungu était également un bouclier, une protection contre les malédictions mais aussi leur
élimination, la protection contre les attaques de l’évu, force et pouvoir de sorcellerie.
Ainsi, lorsque la décision était prise d’organiser le rituel, toutes les femmes appelées à participer ainsi
que les candidates observaient un temps de réclusion de neuf jours. (Il faut comprendre qu’une femme
pouvait demander l’organisation du Mevungu même lorsqu’il y avait de l’abondance de viande ; et
chacune ne pouvait le faire qu’une fois dans la vie).


Comment Se Déroulait la Cérémonie?

Pour le cas du rituel commandé par une femme, après le temps de réclusion, fardées d’argile et de
padouk, les candidates recevaient les interdits du rite de la principale officiante, femme qui devait
posséder un évu très puissant, au-dessus des autres femmes.


(^1) On célébrait le mevungu quand le village devenait « dur » (aled, avec une connotation de résistance, d’égoïsme
et de sécheresse), c’est-à-dire à peu près dans les mêmes circonstances que le So, mais sans référence à un nsém
déterminé d’homme et dans une sorte d’aveu du pouvoir féminin : (( Du temps que je vivais, nos mères avaient une
cérémonie : mevungu. Si je ne trouvais aucun animal dans la brousse, je les appelais : “Ce village est dur, faites
votre cérémonie !” (akén). Alors on prenait la cendre de toute une journée, on en faisait un paquet ; elles disaient
: “Celui qui arrête les animaux, s’il continue, qu’il meure !”, et on transperçait le paquet de petites flèches de
raphia. Dès qu’elles avaient fait cela, le gibier remplissait le village. Seules les vieilles mères savaient cela.
Maintenant que c’est divulgué, je meurs de faim-de-viande (oz&).)) (Michael Mve Meyo, Mekamba, 6/2/1967).

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