La Culture Fang Beti Bulu

(Richellius) #1

Les principaux interdits consistaient à ne jamais trahir le secret du rite, mais aussi à ne jamais commettre
l’acte sexuel de jour. Puis les femmes entraient dans la case de la femme qui a demandé le rituel. Là, les
cérémonies se faisaient dans un secret absolu, les femmes prenant soin de boucher le plus possible les
fentes des murs.
Il s’agit de confectionner un paquet (mfeg mevungu) dont les éléments constituants montrent bien le
rôle mystique du rituel ; les éléments principaux ou de base sont : l’écorce de l’arbre mfenen/angeg, qui
a pour effet de bloquer les attaques sorcières et de les renvoyer à l’expéditeur ; ses fruits ngeg étaient
utilisés dans le jeu du jet, où les candidats rivalisaient d’adresse.
Il consistait pour les candidats à transpercer le fruit (ngeg) lancé au sol par un autre jour, de sa sagaie.
A cette écorce, on associait l’iule « mille-pattes) antidote de l’évu. A ces deux éléments clés, d’autres
s’ajoutaient : le ver de palmier (fos/foas), le saucissonnier (kigelia fricana), des plantes médicinales qui
combattaient l’évu, des plantes rampantes, un crabe... etc.
Tous ces éléments, sauf le mille-pattes, emballés sont placés à côté d’un feu de résine (otu) allumé à
l’intérieur de la case. Puis toutes les femmes se mettaient nues, et après avoir mangé ce qu’elles ont
préparé, elles dansaient autour du feu toute la nuit, en faisant des invocations pour que le paquet se
venge des malfaiteurs, mais surtout en appelant la punition du mevungu sur celui qui était « malfaitrice
» ou malfaiteur.
Quant à la danse nocturne, c’est une exaltation et une célébration de l’évu-clitoris auquel on attribue la
fécondité de la célébrante. Donc en fait, le plus grand évu dont on faisait allusion dans le rituel était le
vagin et le clitoris de la célébrante. Ainsi n’était mère du mevungu qu’une femme dont l’ampleur des
organes sexuels faisait l’unanimité parmi les autres femmes. Et d’ailleurs le mevungu catégorisait les
femmes dans la société ; d’un côté et de loin le groupe le plus large, l’on retrouvait des femmes mariées,
initiées, invitées lors des cérémonies mais pas au rituel secret, et de l’autre les femmes réputées fécondes
par excellence aux organes sexuels grandioses.


Les chants entonnés lors du rituel secret dans la case ainsi que les paroles dites sont d’une obscénité
sans pareil, et difficilement soupçonnables pour ces femmes qui pourtant faisaient toujours preuve de
respectabilité et de pudeur dans la vie ordinaire.


Une autre séquence des célébrations rituelles consiste à attacher une ficelle au clitoris de la célébrante
au bout duquel était attaché le fruit sauvage étub. Ainsi paré, les autres femmes viennent se frotte contre,
pour qu’il leur communique le pouvoir et la force de sa détentrice. Parfois, la cendre du paquet posé au
feu est frottée sur les organes intimes de la célébrante. On parle au clitoris, lui demandant de punir tel,
de venger tel, ainsi vu, le Mevungu apparaît bien comme un culte au clitoris.
Au milieu de la nuit, la célébrante enterre le mille-pattes sur le pas de la porte avec la cendre du paquet
posé contre le feu et qui a brulé. Elle invoque la force ainsi enterrée de s’attaquer à quiconque voudrait
du mal à la propriétaire de cette case. A l’aube, les femmes se partagent les pinces du crabe placé dans
le paquet et ces pinces seront des sifflets capables de repousser des attaques de sorciers, d’éloigner les
mauvais esprits.
Quant au reste de cendre, il est jeté sur les toits des maisons du village, et tout autour du village. Le
paquet transpercé de petits trous et la cendre dispersée, la prise était sûre d’être abondante les jours
suivants. Quant au paquet, propriété de la mère de Mevungu, elle était placée au-dessus de la porte de
la case.


Cependant, cette phase terminée, les femmes attendaient pendant un certain nombre de jours, la réaction
du Mevungu qui doit dénoncer la/les coupables. La dénonciation quant à elle consiste à des
boursouflures corporelles, la prise de l’antilope sô au piège, d’une vipère... Alors la coupable était
trouvée.
Tous ceux qui ont été dénoncés, responsables (femmes et hommes) de la disette qui a frappé le village
doivent confesser leurs forfaits au risque de mourir. Puis, après confession, la mère du Mevungu doit
les purifier et leur faire manger le mets préparé à propos : nnam sesala (herbes médicinales, viande ou
poisson fumé...) et la prospérité était retrouvée.

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