La Culture Fang Beti Bulu

(Richellius) #1

Le Nkul/Nkuu : Elément de Télécommunication chez le Fang-Beti


La Fabrication Du Nkul


Le Nkul ou tam-tam téléphone est le
principal moyen de télécommunication
chez les Beti. Il s’agit d’un tambour
monoxyle à fente donnant deux tons. Il
se fabrique en principe à partir de deux
très grands arbres de la forêt : l’ebe
(mukumari est le nom commercial) et
le mbel ou mbee (padouk).
Ce dernier prend souvent le nom d’ «
esil ou esi » (l’interrogateur) quand il
est coupé dans ce but. Bois à la sève
vermeille, il est considéré comme
grand porteur de vie ; c’est pourquoi le
tam-tam évidé, qui en est tiré est
regardé comme un homme couché qui
parle par sa bouche. Une fente sépare les deux lèvres en respectant un pond médian qui donne par la
suite deux languettes régulatrices.
L’artisan doit patiemment faire sauter les éclisses à l’intérieur du Nkul à l’aide du ciseau à bois et d’un
maillet très lourd, puis faire ressortir les deux lèvres, polir l’ensemble, amincir le pont médian et le
séparer en deux languettes d’un coup de machettes rougie au feu. Ce travail compliqué est doublé par
des rites destinés à faire « bien parler » le tam-tam. On blanchit ses extrémités au Kaolin, l’une des
éclisses est emportée au loin pour que sa voix porte très loin. On l’enfume avec la liane « wowogo »
(celle que l’on entend », aux feuilles crissantes pour qu’elle communique ses vertus sonores au tam-tam.
On le fait alors sécher au soleil. Il ne sera cependant complètement sec qu’au bout de 2 à 3 ans. A la fin,
un nom lui est donné.
Exemple : « Ze ebede ebe » ou « Ze ebete ebe » (le léopard monté sur l’arbre ebe).


L’Apprentissage Du Nkul


L’apprentissage du Nkul est long et difficile, c’est en partie pourquoi ce mode de communication perd
progressivement du terrain de nos jours ; pourtant il a dérouté plus d’un colon, à l’arrivée des Européens.
Ceux-ci se sont émerveillés devant ce mode de télécommunication exceptionnel qui porte à trois ou
quatre kilomètres, parfois bien d’avantage, selon le relief et l’épaisseur de la forêt. Les témoignages de
Zenker (Allemand) attestent que les tam-tams parlaient continuellement autrefois en pays beti, et que
l’on se « téléphonait » matin et soir pour un oui ou pour un non. Des nouvelles importantes comme le
décès, la naissance, l’approche des blancs étaient relayées sur des dizaines de kilomètres en peu de
temps. En fait, en modulant les tons du langage parlé et en respectant les intensités et le rythme, le Nkul
permet de tout dire à ceux qui s’y sont entraînés, et d’échanger des messages personnels grâce à
l’indicatif « ndan » ou « éndan », dont chaque individu et groupe est affecté.


La Fonction Du Nkul


Le Nkul est une invention antérieure à l’arrivée et à la traversée du Yom (Sanaga). Selon la fréquence
de l’usage, en particulier, le Nkul lié à la langue, cette invention parait d’origine Fang. Très usité au
Gabon, il est au contraire moins développé chez les Bulu.
Indépendamment de son rôle culturel, comme analyseur de la langue, le Nkul remplissait également une
autre fonction : il abolissait les distances et socialisait la solitude. Il a rendu possible un nomadisme plus
aventureux. Il est la condition préalable à l’extraordinaire imbrication des clans (meyoñ) différents qui


Figure 11 : Les instruments traditionnels de communication et de
musique de la culture Fang-Beti-Bulu
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