La Culture Fang Beti Bulu

(Richellius) #1

La femme chez les Beti jouit d’une image très ambivalente. Elle est certes source de vie, élément
primordial dans le processus de procréation, mais elle est aussi partie intégrale des possessions du
Nkùkùma.
Pour ce qui est de la philosophie de l’action, cet apologue est une invitation à toujours ménager sa
monture pour aller loin. La femme est une proie livrée à l’appétit et à la voracité des hommes. Toutefois,
il serait erroné d’affirmer ou de déduire que ce proverbe présente la femme Beti comme une victime
passive. Pour la posséder, il faut être sûr de soi, être un homme qui a des moyens matériels pour pouvoir
l’entretenir, du cœur pour la chérir et la couvrir d’affection. C’est la conjugaison de tous ces éléments
qui constitue les « bonnes dents » dont l’emploi métaphorique n’est pas gratuit dans ce proverbe. En
effet, il est difficile de croquer le maïs sec. C’est donc dire que cette maxime est révélatrice de la valeur
que les Beti accordent à la femme, n’a droit à sa tendresse que celui qui en est digne.


Proverbe : Une seule main ne saurait grimper sur un arbre.
Ou encore
Proverbe : Nul ne peut lier un fagot d’une seule main.
Ce proverbe est une invitation à la solidarité. Pour réaliser une entreprise, l’adresse individuelle ne suffit
pas. Il faut toujours recourir à la science des autres. Ce proverbe évoque une image très poignante. Pour
cueillir les fruits de certains arbres tels que l’avocatier, le manguier ou le safoutier, les jeunes gens
grimpent sur les arbres. Ils mettent ainsi leurs deux mains au service de leur art. Quelle que soit l’adresse
du grimpeur, il lui est pratiquement impossible d’user d’une seule main pour réussir cette entreprise.


Proverbe : Les mouches vivent des douleurs des plaies.
Ou alors
Proverbe : Le malheur des uns fait le bonheur des autres.
La plaie est une lésion de la peau qui s’accompagne de douleurs. Il est souvent courant de voir des
colonies de mouches autour de celles-ci. Certaines s’y posent, sucent du sang et y déposent des microbes.
Cette opération accentue la douleur et l’infection chez l’individu, alors que la mouche s’en tire avec plus
d’énergie. De la même façon le méchant, le profiteur trouve le plaisir à voir souffrir les autres, cherchant
à augmenter leur infortune. Dans la société, il est des gens qui spolient les veuves, enveniment les
discordes pour leur seul intérêt.
Ce proverbe fustige les profiteurs, les opportunistes qui ne reculent devant rien pour atteindre leurs
objectifs.


Proverbe : On reconnaît les fleuves importants par leurs affluents.
Il ne faut pas se fier aux beaux parleurs. La société traditionnelle beti est caractérisée par la présence de
grands conteurs souvent oisifs. Ces individus sillonnent les villages vantant des mérites que nul ne peut
vérifier. Le proverbe enseigne donc que la valeur d’un homme chez les Beti est proportionnelle à ses
possessions, ses réussites personnelles, le nombre de femmes et d’enfants, la grandeur de sa succession
et de ses champs. En fait, de même qu’un grand fleuve a de grands affluents, de même un « mfan mod
» a nécessairement une grande fortune et de puissantes relations.


Proverbe : L’homme n’est bon que vu de loin.
Ce proverbe dénonce la duplicité de l’homme. Les Beti estiment que pour connaître véritablement
l’homme, il faut le côtoyer, vivre des situations communes. L’homme est hypocrite et intéressé. Il sait
cacher ses défauts, ses vices lorsqu’il veut atteindre un objectif. Il présente alors sa face la plus candide
pour se retourner dès qu’il se trouve en position de force. Les Occidentaux disent à propos que « les
apparences sont trompeuses » ; on ne peut juger un homme dès la première vue car « l’habit ne fait pas
le moine ».


Proverbe : Le pot de terre ne prend pas part à la fête des pilons/gourdins.
La nature ne nous a pas fait de la même manière ; les hommes sont si différents les uns des autres. Ainsi
on retrouve d’un côté les forts, et de l’autre les faibles ; les paresseux et les travailleurs ; les intelligents

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