La Culture Fang Beti Bulu

(Richellius) #1

soit par les chorales de l’obédience religieuse du défunt, soit par un appareil musical moderne, à travers
un support dont l’industrie est assez florissante au Cameroun.


Nous ne pouvons néanmoins ne pas signaler que l’Eglise Catholique sous la houlette de feu Monseigneur
Jean Zoa, a entrepris la promotion de l’Esana à l’occasion des deuils de patriarches, dans le cadre de la
politique d’inculturation soutenue par Sa Sainteté le Pape jean Paul II, de regrettée mémoire.


L’Annonce de la Cause du Décès


Un autre aspect qui a résisté à l’usure du temps, mais a connu des modifications, c’est l’annonce de la
cause du décès. Car il faut également dire que jusqu’au 21ème siècle, dans tous les groupes Beti-Bulu-
Fang, le monde invisible et la sorcellerie constituent toujours les causes premières d’un décès, d’un
malheur, d’un échec. Dès lors, la première explication d’un décès est à rechercher dans le pouvoir
maléfique de ou des ennemis.
Pour ce faire, lorsqu’un deuil survient, l’assistance et la famille attendent toujours d’apprendre qui est
responsable du décès. C’est pourquoi, bien que les ordalies soient interdites, beaucoup de femmes ont
encore maille à partir avec leur belle-famille qui les accusent toujours dans plusieurs cas d’être
responsables de la mort de leur homme. Cela explique donc en partie les injustices, les mauvais
traitements dont continuent à être victimes les femmes Beti dans les rituels de veuvage, de la part de
leurs belles-sœurs. A propos de veuvage, qu’en est-il aujourd’hui?


Du Veuvage Dans La Société Beti-Bulu-Fang Actuelle


Rituel de plus en plus dénoncé par les femmes, le veuvage a résisté aux assauts de la modernité. Et tant
bien que mal, il est toujours pratiqué dans les villages surtout, par ceux qui continuent à croire aux
coutumes ancestrales. Cependant, nous devons dire d’emblée que tel qu’il est pratiqué aujourd’hui, il
est réduit à sa plus simple expression. Et une femme Beti qui a subi le veuvage tel qu’il était pratiqué
par les Beti anciens serait déroutée aujourd’hui si elle voyait les bouleversements ou les transformations
qui y sont survenus.


Premièrement, la croyance selon laquelle toute personne qui n’a pas subi les rites du veuvage (Akus)
doit s’attendre à la déperdition de sa famille, cette croyance a été la première à se bouleverser. L’on
observe aujourd’hui certaines femmes (surtout celles qui ont été ou qui sont en ville, ainsi que celles qui
ont voyagé en Occident) n’acceptent plus de se plier à ces pratiques qualifiées par elles de barbares.
La mentalité a donc bien changé. L’on n’a plus peur des répercussions d’un veuvage dénié. Cela est
d’autant plus accentué par le fait que l’Eglise Catholique, sous l’instigation de Monseigneur Jean Zoa,
de regrettée mémoire, a mené une réflexion sur l’institution du veuvage religieux. Celui-ci se base
exclusivement sur la prière et la bénédiction du veuf par un prêtre. Un document présentant les
différentes étapes à suivre pour ce leur a été fourni par l’autorité de l’Eglise. Et de plus en plus de
femmes se tournent vers leurs églises lorsqu’elles viennent à perdre leur époux, pour la bénédiction ; en
lieu et place du rituel traditionnel.
Cette situation s’explique par plusieurs raisons : en fait, si le veuvage a connu des modifications, il n’en
demeure pas moins qu’il comporte toujours des épreuves physiques éprouvantes, humiliantes, que
beaucoup de femmes ont déjà du mal à supporter ; à l’heure où dans les médias, les colloques nationaux
et internationaux, on leur sert chaque jour des discours sur les droits de la femme, sur la condamnation
des violences faites aux femmes. En somme, face à ces idées, le veuvage traditionnel ne peut avoir gain
de cause, au contraire. C’est pour contourner ces « violences » que beaucoup de femmes sollicitent la
bénédiction des hommes d’Eglise.


Autre aspect qui peut expliquer la christianisation du veuvage, ce sont les dépenses matérielles et
financières. En effet, dans plusieurs familles, il est courant d’entendre les belles sœurs dire à la femme
de leur « frère », de prier Dieu pour que ce soit elle qui décède en premier. Car sinon, elle devra débourser

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