La Culture Fang Beti Bulu

(Richellius) #1

des sommes énormes pour que son rituel de veuvage soit bien exécuté, ou pour que les sévices qui lui
seront faits soient moins sévères.
Dans certains villages, elles sont nombreuses ces femmes dont la vie a pris un mauvais coup après les
rites de veuvage parce que les belles-sœurs ont puni la veuve. De telles femmes rencontrent des
problèmes divers : certaines prennent démesurément du poids, d’autres voient leur partie postérieure
seule prendre du poids, certaines n’ont plus de cesse de se plaindre du mal de dos, d’autres perdent la
bonne récolte, ou l’abondance dans les travaux champêtres.
Pour donc éviter de tels désagréments, plusieurs femmes, avec l’aide de leur famille préfèrent payer des
sommes importantes pour s’assurer la protection dans l’exécution des rituels.
Et c’est pour contourner ces dépenses et les risque de punition de la part des belles sœurs, beaucoup
d’autres femmes préfèrent se tourner vers les Prêtres et Pasteurs.


Dans plusieurs des cas, cette situation est souvent causée par le fait que beaucoup de Beti se marient
avec des filles d’autres tribus, qui n’ont pas les mêmes coutumes que leurs belles familles, ou des filles
qui ne comprennent pas la conception traditionnelle selon laquelle tout ce qu’un individu travaille
appartient à toute la famille. Il se pose donc souvent ce problème, que lorsque la femme s’oppose à ces
dépenses énormes qu’elle juge préjudiciables pour le bien être de son foyer, il arrive qu’elle soit
stigmatisée, de ces épithètes lui sont donnés par sa belle-famille, qui n’ayant d’autre solution ou d’autre
voie de recours, s’en remet à la possibilité ou mieux à l’éventualité du veuvage pour prendre sa revanche.
Beaucoup de veuves Beti-Bulu-Fang reconnaissent avoir fait la triste expérience.
Cela explique donc qu’aujourd’hui, les belles-sœurs réclament souvent d’être dédommagées, avant toute
épreuve, elles reçoivent souvent des cadeaux qu’elles emportent chez elles, tout le contraire de ce que
faisaient leurs grands-mères, autrefois, qui consommaient ensemble, en communauté une fois toutes les
cérémonies achevées, tout ce qui leur était offert.


L’on peut dès lors comprendre la signification même du veuvage aujourd’hui chez les Beti. En effet,
autrefois, le veuvage était un rite d’accompagnement ; accompagnement du défunt jusqu’au pays de ses
ancêtres ; un rite de purification ; purification de la veuve ou du veuf de la souillure de la mort ; un rite
de réhabilitation, l’acquisition de la pugnacité de l’endurance face à l’adversité... Mais de nos jours,
très peu de Beti savent ou maîtrisent la signification du rite de veuvage. Tous les acteurs à tous les
niveaux ne savent avec précision de quoi il retourne dans le veuvage. Plusieurs femmes interrogées
pensent que le veuvage est la punition, une sorte de « chemin de croix » de la veuve qui a jouit du travail
du défunt sans partager avec qui que ce soit. D’autres pensent que ce n’est rien d’autre qu’une institution
de vengeance aux mains des belles-familles pour régler des comptes à leurs belles-filles. C’est ce qui
explique certaines exactions, certains excès observés de la part des belles sœurs.
Ces excès sont d’autant plus sévères que la veuve est dite à tort ou à raison « joyeuse ». En effet, certaines
veuves sont elles-mêmes le plus souvent la cause de leurs déboires dans les cérémonies de veuvage.
Elles sont nombreuses dans les sociétés Beti, ces veuves (Beti d’origine ou pas) qui narguent ou presque
leur belle-famille alors que celle-ci est encore en train de pleurer son fils. Elles se pavanent devant tout
le monde, ne présentant aucun signe d’abattement en guise de regret du défunt. L’on a souvent vu
certaines titubant sous l’effet d’une forte dose d’alcool, ou encore se querellant avec ses beaux-parents.
Dans ces conditions, la belle-famille se montre intransigeante.


Concernant le veuvage proprement dit, il commence dès l’annonce du deuil. Seulement, des brimades
ne sont pas immédiatement observées. En fait, dès l’annonce du deuil, la veuve est entourée de ses
belles-sœurs lorsqu’aucun sujet de discorde n’existe, mais surtout de ses sœurs, tantes... Le plus
souvent, elle n’est pas immédiatement assise à même le sol, attendant l’inhumation pour le faire pendant
deux jours.
Habituellement, elle est invitée à faire des adieux au défunt sur la tombe, avant la mise en terre. Une
fois que cela est fait, et que l’inhumation est achevée, elle entre dans le veuvage proprement dit. Elle
passe deux jours assise à même le sol, légèrement habillée, ses déplacements se limitent au strict
nécessaire, et elle se fait accompagner de ses sœurs ou de sa mère. Il faut cependant d’abord préciser
que ce sont ses belles-sœurs qui officient pour la faire asseoir à même le sol.

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