La Culture Fang Beti Bulu

(Richellius) #1

obscènes pleuvent. Durant ces occasions, les femmes montrent, disent, informent les jeunes filles sur
leur future vie de femme, d’épouse. Lors des mêmes occasions, les femmes pouvaient commencer la
perforation de l’hymen d’une jeune fille. Celle-ci devait cependant avoir eu ses premières menstrues
(ayeñ ngon) ; et le plus souvent elle était déjà mariée. Elle pouvait désormais avoir des rapports avec
son mari.


L’indépendance sexuelle dont certains font écho ne concernait donc jamais les petites filles qui le plus
souvent étaient d’ailleurs mariées très tôt. Cependant, pour le cas des filles qui ont déjà été mariées au
moins une fois, il est clair qu’elle échappe à la rigueur et au contrôle de la vie sexuelle des femmes. En
effet, une fille qui a été mariée et qui pour cause de divorce ou pour tout autre problème rentre dans sa
famille jouit d’une liberté sexuelle notable. Un adage explique pourquoi « la fille n’est pas l’épouse de
son père ». Comme pour dire que le père ne devait plus contrôler de près l’intimité sexuelle de sa fille.
Pour ce qui était des filles restées longtemps dans leur famille sans être mariées précocement, rester
vierge le plus longtemps possible était une sorte de luxe pour le père. Certains exigeaient pour cela, que
leur fille gardasse le sexe à découvert, prouvant ainsi qu’elle n’avait pas encore de honte (osôn). Pour le
garçon, par contre, la donne était autre.
En effet, le jeune garçon atteignait la puberté dans une ignorance totale de la réalité sexuelle. Les parents
se gardant bien de leur donner la moindre information. Deux raisons expliquent cet état de chose.
D’abord, il faut que le garçon aide ses parents le plus longtemps possible dans leurs travaux. En plus il
ne fallait précocement pas causer les compensations matrimoniales. Pour cela on maintenait le jeune
garçon incirconcis le plus longtemps possible car un homme incirconcis ne pouvait avoir de rapports
sexuels. Cela était l’objet d’un scandale.


Cependant, c’est toujours auprès d’une femme mure que le jeune garçon découvrait les « secrets du lit
». La plupart du temps c’était une coépouse à sa mère qui s’en chargeait. De cette première expérience,
le jeune homme va satisfaire son désir sexuel soit par l’adultère (ngôbinda ou medziân), soit par
l’ebôngon ou visite à fille libre (vagin de la fille, au lit de la fille).
Pour le premier cas, bien que défendue, l’adultère était la seule solution pour un jeune installé dans son
mvôg, où toutes les filles sont ses sœurs, de pratiquer l’activité sexuelle, malgré les risques de palabres,
amendes...
Pour le second cas, le jeune homme rend visite à une fille libre, plus ou moins connue de lui, accompagné
d’un ami parenté à la fille qui l’introduirait dans la famille de la fille. Il emporte des présents pour son
élue et sa belle-mère. La fille peut aussi bien refuser qu’accepter. S’il était accepté, il était entretenu par
son hôte qui passait la nuit avec lui pour lui « réchauffer les pieds la nuit ». Il peut y passer deux, trois
ou quatre nuits de suite. L’ebôngon n’engage cependant en rien car la jeune peut recevoir d’autres jeunes
de suite, tout comme le même garçon peut se rendre chez d’autres filles de suite. Après avoir ainsi ‘jouer
la vie », chaque fille ou garçon pense au mariage, où il faudra procréer, pur ainsi prouver sa fécondité
et sa virilité, clé pour être considéré des autres comme une femme ou comme un homme ; occasion pour
l’homme de commencer son ascension jusqu’au Nkùkùma ou homme riche. En un mot, si le libertinage
sexuel n’est pas connu des Beti, la virginité n’en n’est pas une obsession, une condition sine-qua-non
pour être considéré dans la société.


La Procédure De Mariage


Il faut d’abord noter que dès le départ la fille dépend entièrement de son père, de ses frères ou de tout
autre proche du lignage paternel. Car étant donné que ce sont les hommes qui distribuent les femmes,
c’est à eux qu’il en faut également demander. La conséquence immédiate de cette dépendance est que
l’accord des pères ou frères de la fille suffit pour qu’un mariage soit validé. Nous avons vu plus haut
qu’un père pouvait décider sa fille à un tiers et cela était fait.


C’est ainsi qu’un homme pouvait retenir par avance une fille à naître « évân ngon ». Cette pratique avait
pour l’homme l’avantage d’éliminer la compétition commerciale pour l’acquisition de la femme, elle
permettait également d’éviter ou de contourner les incertitudes de l’ébôngon, simplifiant par le fait les

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