La Culture Fang Beti Bulu

(Richellius) #1

Ayant traversé le Nloñ, le groupe qui continua vers le Sud rencontra une autre rivière très poissonneuse.
Ils établirent tout naturellement des campements à la source de cet autre cours d’eau qui offrait une
quantité énorme de poissons. Tous contents de ce que le « Créateur » leur avait donné des vivres en
abondance, ils décidèrent à l’unanimité d’expier tout le mal qu’ils avaient jusque-là fait. Ils organisèrent
donc le premier rituel d’expiation de minsem (pluriel de nsem), autrement dit le rituel « So ».
Ils appelèrent le rituel « So » et baptisèrent le cours d’eau du nom du rite qu’ils avaient célébré. Ainsi
est donné le nom « Soo » à la rivière. Et en souvenir de l’abondance de poissons rencontrée dans cette
rivière, il fut décidé que le rite « So » sera désormais célébré en période de disette, pour réassurer
l’abondance en ressources animales et halieutiques, comme il en avait été pour la rivière « Sôo ».
Cette même philosophie de donner des noms en souvenir de certains lieux concerne également les noms
de personnes. Ainsi, le nom Ndongo ou Ndong très fréquent chez tous les groupes Beti aussi bien du
Cameroun que du Gabon et de Guinée Equatoriale. Ce nom à l’origine était donné à tous les enfants nés
lors des traversées des cours d’eau à leur source. Il est donc dérivé de la même réalité que le nom du
clan Ndôñ ou Bekôé.


Evocation des Réalités Quotidiennes


Certains noms de personnes quant à eux évoquent des réalités de la vie quotidienne ; c’est le cas du nom
Ayingono, donné aux filles. Il est né d’une situation où une femme ne fait que des garçons. Lorsqu’une
telle femme venait à mettre au monde une fille, elle lui donnait le nom Ayingono pour signifier qu’elle
a tant eu besoin d’une fille, qu’elle l’a tant souhaitée.
C’est également le cas du nom Ntongono, donné aux filles premières-nées ou aux filles nées après
plusieurs garçons. Rappelons que Ayingono est souvent donné aux garçons lorsqu’un couple ne fait que
des garçons alors qu’ils éprouvent le besoin de renommer une femme défunte qui portait ce nom.
Dans d’autres cas, des couples donnent des noms d’animaux sauvages à leurs enfants, lorsqu’ils ont eu
à perdre leurs premiers enfants. Ceci pour éloigner le spectre de la mort. C’est ainsi que des noms comme
Wo’o, Obam, Edou sont nés.
Le nom Mbazoa ou Mbazogo ou Mbazo’o est né par référence à l’ivoire appelé « Mbangzog ou
Mbangzok ». Ce nom est donné aux filles parfois pour rappeler la qualité précieuse de l’ivoire, qui
s’étendrait sur l’enfant, ou alors pour rappeler une femme autrefois qui a été dotée par don d’ivoire.


Les Noms de Localité


Quant aux noms de localités, certains évoquent des hauts faits de guerre, ou tout simplement des
souvenirs. C’est le cas du nom Efoulan ; l’expression signifie : mélange, brassage. Ce nom rappelle donc
des cas de brassage de population, des groupes Beti ou alors Beti avec d’autres groupes de personnes.
C’est aussi le cas de Elat : « Union », « Unité », pour signifier l’union de groupes de peuples qui
auparavant étaient désunis.
C’est encore le cas de Awae qui signifie littéralement « repos » ; repos après une longue marche, après
une longue période de guerre avec les peuples voisins, repos surtout pour se refaire les forces.
C’est encore le cas du nom Ekombitié/Ekombité ; positionnement ou repositionnement en ordre précis
avant la reprise des invasions à la « force des armes ou des lances » (Ngoulemekong) ; ou le cas de
Nsimeyong ; marche du rassemblement, jusqu’à parvenir à la limite avec les autres peuples, ou alors
jusqu’à établir la limite, la frontière avec les autres peuples : Nnemeyong ou Nyemeyong.
En pays Beti, des exemples pareils existent abondamment ; tous les noms de lieux ont ou alors avaient
une transcription en français :
Mimetala : « les yeux regardent » ou encore
Mebomezoa sur les traces d’éléphants,
Nkol Emana : le mont ou la colline de l’injustice...


En guise de conclusion, nous dirons que tous les noms, de lieux, de personnes, de cours d’eau, de choses,
ont une signification et beaucoup d’autres évoquent des faits vécus ou légendaires du grand peuple de
la forêt. Vivement donc que les jeunes générations attribuent à leurs enfants des noms évocateurs,

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