La Culture Fang Beti Bulu

(Richellius) #1

Les herbes qui ont servi lors de cette séance sont jetées dans la rivière et emportées au loin. Les habits
que la veuve portait suivent le même chemin. Ses cheveux sont soigneusement lavés et tressés. Sa toilette
est l’objet d’une grande attention : habits neufs, bijoux, huile et parfum, poudre de padouk. Ainsi parée,
la veuve, réhabilitée est conduite au village dans une ambiance de fête : chants, cris de joie...


Cette première étape terminée, il faut également réhabilitée la veuve dans toutes les activités du groupe
; pour ce faire, une fois parvenue au village, elle va recevoir des dons de toute la communauté : grains
à semer, boutures, instruments de travail (panier, houe, machette...), ustensiles de cuisine, mobilier...
Elle va ensuite simuler toutes les scènes de la vie quotidienne : semailles, désherbages, récoltes, vente
de produits que parents, amis, belles-sœurs viennent acheter, scènes de ménages (balayer, préparer à
manger, laver, etc).
Simulation du mariage : elle se couche avec un homme sur un même lit ou une natte, scènes de caresses
; sans pour autant enfreindre la décence. Cette scène montre que la veuve peut à nouveau se marier. Puis
sera donnée la bénédiction finale des patriarches. Un bouc est sacrifié et son sang recueilli est mélangé
avec des herbes médicinales. La veuve et toute sa famille prennent place soit à même le sol, soit sur un
tronc de bananier. Après un discours de bénédiction au cours duquel le patriarche officiant invoque tous
les ancêtres de la famille, il les arrose de l’eau médicinale, souffle sur eux le mélange de cola et de poivre
de Guinée (ndoñ) qu’il mâchait, en proférant des bénédictions. La tête du bouc sacrifié est remise à
l’aîné. Elle sera soit consommée par tous, soit enterrée dans la forêt.


Les membres assis, après avoir serré la main des officiants vont se lever et s’en aller en courant. Ils sont
à nouveau admis au sein de la société comme purs. Le tout est clos par un repas communautaire.
Cependant, vu sous cet angle uniquement, le rituel du veuvage apparaît bien comme négatif,
chosification de la veuve, violeur des droits de l’homme. Une analyse de la conception de la vie chez le
Beti permet pourtant de dégager la signification profonde de ce rituel pour le Beti.


Signification Du Veuvage

En effet, l’analyse minutieuse du rituel situe sa signification à deux niveaux : pour le défunt et pour la
veuve ; étant donné que c’est elle qui nous intéresse, il convient de savoir que dans la plupart des cas, la
veuve ayant été la plus proche compagne de vie du défunt était souvent soupçonnée d’être responsable
de sa mort : infidélité, jalousie, manque de soins, manquements aux devoirs conjugaux...
Les brimades étaient ainsi mises sur le compte de la vengeance, parfois aussi sur le remboursement de
la dot déboursée pour l’épouser. Mais surtout les brimades jouaient pour la veuve le rôle de Catharsis
(purification) : ils la purifient, la libèrent des passions et sentiments qui l’attachaient au défunt, atténuant
ainsi le choc de la séparation. Les épreuves de brimades reposent sur la nécessité de préparer la veuve à
l’endurance, à la combativité, à la pugnacité. La perte du mari étant lourde, la veuve ne devrait pas se
laisser abattre, elle doit plutôt prendre en mains l’avenir de ses enfants et le sien propre. Les défis qui
l’attendent étant énormes, les épreuves qu’elle subit l’y préparent.
D’autre part, le rite de purification vise à libérer la veuve et sa famille des souillures de la mort, à
apporter la paix et la santé. Le rite de réhabilitation quant à lui permet de resocialiser la veuve dont la
moitié est décédée avec son conjoint. Ainsi la veuve renaît à la vie de la famille et de toute la
communauté. C’est pourquoi elle présente un nouveau look, la toilette, la réception des cadeaux, la
mime des gestes de la vie courante, le repas communautaire et la bénédiction finale du patriarche.


Autres Rituels Beti

Il est sans équivoque que les rituels du Sô, Melan et Ngi étaient de loin les principaux et les fondements
sur lesquels reposaient l’harmonie, la prospérité et le bien-être du Beti d’autrefois.
Cependant tout comme dans la Bible, l’homme Beti s’est toujours détourné des règles établies, brisant
ainsi l’harmonie sociale. C’est pourquoi d’autres rituels vont s’organiser dans la société beti. Bien que
la liste soit non exhaustive, nous pouvons cependant avec l’aide de chercheurs qui ont abordé le sujet

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