La Culture Fang Beti Bulu

(Richellius) #1

Je ramène mon fils des lieux sales
Je te conduis vers des lieux propres
Je tire mon fils des malchances
Je nettoie
Comme on nettoie les teignes
Que tout soit complètement enlevé!
Que tout soit complètement nettoyé!
Quelle qu’ait été la destruction.
Que tout s’en aille en aval de la rivière!
Tout est vraiment effacé!


Pour expliquer cette formule que nous pouvons appeler « standard », nous préférons procéder par
rubriques ; chaque rubrique ayant un sens particulier.


« J’enlève comme on enlève [...] Un gros morceau de fer ».


Le père en prononçant ces paroles laisse entrevoir ce à quoi ressemblent le mal causé, et surtout l’action
qui sera sienne et l’importance de celle-ci. Il faut d’abord comprendre qu’autrefois, du temps des
anciens, beaucoup de Beti-Fang portaient au coup, aux bras, aux pieds de gros anneaux de cuivre qui
entravaient grandement les mouvements. C’était principalement le cas des esclaves et des punis. A cause
de sa faute, le coupable avait des difficultés dans sa vie, ses entreprises, et il avait besoin d’être soulagé
de ce fardeau, pour retrouver la mobilité. Par la bénédiction reçue du père (ou de la ère), l’enfant va
recouvrer la santé spirituelle, morale.


En outre, la faute ou la mauvaise action rend son auteur infirme et impropre à toute initiative heureuse,
il est déformé, tordu ; par son action donc, avec la bénédiction des ancêtres, le père redresse l’existence
de son enfant, il redonne forme à ce morceau de fer, il ramène à la vie, à l’ordre le fils plié, courbé sous
le poids de sa faute


« Je rends droit [...] Comme une flèche d’arbalète ».


Par ses mauvaises actions, l’enfant a dévié, et il est coupé de sa source de vie. Pour cela, le père doit le
mettre sur le chemin de la droiture qui est la recherche permanente du bien, fidélité aux interdits, respect
des lois laissées par les ancêtres ; pour que comme la flèche d’arbalète, qui est travaillée pour aller au
but, l’enfant soit utile pour le groupe social.


« Je prends la colonne vertébrale du chien mort ».


L’animal ici, ayant vécu avec les humains, a hérité d’une certaine humanité, contrairement aux animaux
sauvages qui ne peuvent valablement remplacer l’homme dans le sacrifice. Car ici, il y a recherche
d’identification entre l’humain et l’animal immolé pour plus d’efficacité.


« Je ramène mon fils [...] Comme on nettoie les teignes ».


Par son action, l’enfant est coupé de l’ordre social et religieux, il est dans la souffrance morale, la mort
spirituelle, l’existence sans issue. Et il doit être ramené dans l’ordre et la paix et cela par son repentir et
sa soumission à la volonté des ancêtres.


En outre, son état qui s’apparente à la teigne ; puante et gluante, état de putréfaction morale doit être
nettoyé, lavé, purifié. Il s’agit ici de purifier sa conscience, d’ôter de celle-ci le poids des mauvais actes
posés, mauvais actes qui ont accumulé la malchance qui maintenant menace l’existence morale de
l’individu et par lui du groupe social. Car nous l’avons toujours souligné l’individu est responsable du
groupe qui l’est également de lui.

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