La Culture Fang Beti Bulu

(Richellius) #1

tient d’un mythe. Son action dévastatrice et destructrice explique la pléthore de pratiques, de rituels et
d’agents protecteurs dont les Beti font usage. Car il est nécessaire sinon vital de se protéger contre cet
agent dont tous les Beti s’accordent à denier toute valeur bénéfique.


Cependant, l'évu, acteur central de la sorcellerie n'en demeure pas
moins un paradoxe ; en effet bien que catégorique sur la puissance de
nuisance de l’évu, les Fang-Beti lui imputaient également toute action
d'éclat, de bravoure, d'éloquence. Il est ainsi courant d'entendre un bon
orateur être qualifié de sorcier, de possesseur d'évu.
Réussit-on à l'école, dans les affaires, en amour? Gagne-t-on au jeu?
C'est grâce à la force de l'évu. L'on éprouverait bien des difficultés à
justifier qu'un être dont tous s'accordent sur l'action néfaste pour le
détenteur mais surtout le prochain, soit aussi garant de la réussite
sociale. Ce premier paradoxe sur l'évu qui rend sorcier embrasse un
autre qui est celui de son identification.
En effet, de ses entretiens avec les anciens Beti dont certains
reconnaissaient être sorciers (c’est-à-dire possesseur de l’évu), Philippe
Laburthe-Tolra affirme que l’évu est un être ayant une forme animale :
lézard, grenouille, crabe, chauve-souris... Il vit dans le ventre de son
détenteur en ce qui concerne les hommes, et dans le vagin pour ce qui
est des femmes. Sa vie est étroitement liée à celle de son détenteur.
La mort de l’un entraînerait donc celle de l’autre ; c’est pourquoi si un homme était blessé en sorcellerie,
c’est son évu qu’il faudrait directement guérir. Mais avant de poursuivre la découverte de cet évu
paradoxal, il faut d’abord examiner son origine qui prête à confusion.


L’origine De L’évu

Elle est donnée par la tradition orale comme
d’ailleurs il est le cas pour bien d’autres aspects
de la vie des Fang-Beti. Selon les anciens Beti
cités par Tolra, c’est une femme qui aurait
ramené l’évu au village. Suivons le récit :


Un homme (Zamba pour certains groupes beti)
vivait avec sa femme et leur enfant. Pour
s’approvisionner en viande fraiche, il se rendait
chaque jour en forêt, seul, et revenait le soir
chargé d’une grande quantité de gibier. Un jour
qu’il devait voyager, il dit à sa femme de ne
jamais aller en forêt, là où chaque jour il
ramenait du gibier. Comme il durait en voyage, la femme qui n’avait plus de viande se décida à aller
visiter les « pièges » de son mari. Arrivée en brousse, elle trouva un tas d’os dans une clairière en pleine
forêt. Alors qu’elle poussait une exclamation de stupéfaction devant le spectacle qui s’offrait à elle, elle
entendit une voix lui demandant qui elle était et ce qu’elle voulait. Une conversation s’engagea au terme
de laquelle la femme parvint à convaincre l’évu (puisqu’il s’agit de lui) de venir au village avec elle.
Pour le cacher du regard des hommes, la femme mit l’évu dans son vagin, et il fut conclu que l’évu se
débrouillera bien pour se nourrir. Une fois au village, et après un certain temps, l’évu demanda à manger
à la femme qui ne sachant quoi lui donner lui demanda de se nourrir comme il le pouvait. L’évu sans
être vu de quiconque tua le mouton qui passait par là. C’est le début de l’hécatombe.
En effet, après les bêtes, l’évu s’attaque à l’enfant du couple. Les habitants assistaient bien à
l’extermination des habitants (hommes et bêtes) du village sans savoir qui en était responsable. De retour
du voyage, l’homme fut mis au courant des derniers événements. Celui-ci demanda derechef à la femme

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