La Culture Fang Beti Bulu

(Richellius) #1

si elle était allée en forêt. Elle dit oui et alors son mari s’exclama et déclara qu’elle serait désormais la
ruine du village. Ainsi habita l’évu parmi les hommes car la femme ne put jamais s’en débarrasser.


Les Caractéristiques De L’évu Selon Les Fang-Beti.

L’action de l’évu est invisible ; l’on ne peut percevoir que ses effets. Cette impression est d’ailleurs celle
des Ntumu qui assimilent l’évu au vent. Ils rapprochent d’ailleurs le mot évu à évuñ (le vent). Selon les
Ntumu donc, l’évu serait comme le vent dont on ne sent la présence que sur les feuilles des arbres, la
poussière qu’il soulève, les habits qu’il soulève.
L’évu est avide de sang dont il se nourrit. C’est ce qui explique les déclarations des Beti-Fang selon
lesquelles lors des réunions nocturnes, les sorciers se nourrissent de viande et de sang humains dont
chaque membre d’un cercle de sorciers est tenu de fournir à un moment ou à un autre.
La tradition beti considère que l’évu féminin est de loin le plus puissant. Il vit dans le vagin de la femme
et fait de certaines femmes de vraies nymphomanes. C’est pour cela qu’il est fréquent d’entendre chez
les Beti dire à propos d’une femme dont les performances sexuelles sont extraordinaires qu’elle a l’évu
aux « fesses ».
De même il est courant de suivre qu’une femme en travail éprouve des difficultés à enfanter parce que
son évu a barré la voie de passage à l’enfant. (Il en est également d’une femme qui multiplie les fausses
couches, on dit que son évu lui mange les enfants dans le ventre). Seulement il n’a jamais été signalé
par des médecins modernes qu’un évu a été aperçu lors d’une opération chirurgicale ou lors d’un
enfantement d’une femme beti.
Cette complexité, ce paradoxe sur la question de l’évu est renforcé par une autre conception. Selon les
déclarations des Beti, l’évu sort souvent de sa demeure pour prendre une forme animale (gorille, chauve-
souris, hibou, luciole...) afin de remplir son dessein destructeur. Ainsi, il est fréquent en pays beti-fang
qu’un homme déclare qu’un hibou hululant la nuit derrière les cases du village n’en est pas un, mais
bien une personne qui a pris cette forme pour agir.
L’évu aurait donc une capacité de dédoublement. Il peut prendre la forme du hérisson, et dévaster le
champ d’arachides ou de maïs d’une voisine. Mais dans cet état de dédoublement, toute atteinte portée
à cet animal affecte directement le possesseur de l’évu dédoublé. C’est pour cela que l’on a souvent
entendu des personnes déclarer en toute conscience qu’une blessure reçue au pied par un coup de
machette en plein jour, n’est que la matérialisation concrète d’un coup de coupe-coupe reçu lors d’un
combat ou d’un affrontement en sorcellerie. Manifestement tout ce qui a trait à l’évu est bien paradoxal
; comme l’est le processus d’acquisition de l’évu parce que la femme qui aurait ramené l’évu au village
n’en a apporté qu’un seul, pourtant l’on dénombre aujourd’hui encore une multitude de beyem (sorciers)
donc de bivu (pluriel d’évu).


Transmission de L’Evu

Selon les Beti, l’évu se transmet de deux manières :


La première transmission est héréditaire : le père transmet l’évu à son enfant
lors de sa conception, à travers la semence déposée dans la femme. Pour ce
qui est de la transmission effectuée par une femme, elle se fait au moment de
l’accouchement. Cette assertion est très répandue chez les Ntumu qui
considèrent que c’est la femme qui transmet l’évu. Celle qui n’en possède pas
ne peut donc rien transmettre. Cette impression laisse ressortir que l’évu serait
une forme de péché originel, qui est déjà en tout homme au moment de sa
naissance, une forme d’ADN qu’on hérite de son géniteur ou de sa génitrice.
Les anciens Beti expliquaient par cette idée la continuation des rapports
sexuels avec une femme enceinte jusqu’à la « formation complète » de
l’enfant. Le père devait poursuivre ou parachever la transmission de la
puissance qui faisait d’un tel un « homme accompli ». C’est ce qui explique
Free download pdf