J'irai manger des khorovadz
Ce fut le Noël le plus éprouvant de toute ma vie. Comme je
nâattendais plus rien de cette soirée jâai regagné le sous-sol de la maison
où lâon mâavait accueilli pour aller me coucher sur le canapé-lit avec les
murs pour seuls témoins de ma détresse.
Mais la lumière allait revenir. Les tunnels ont toujours une issue.
Françoise était la femme de ma vie jâen avais lâintime conviction et
lorsque jâai une conviction une vraie je nâabandonne jamais. Je me suis
accroché à cette certitude comme à une promesse éternelle. Jâai vécu des
périodes difficiles ; jâai lutté jâai défailli jâai imploré le Ciel jâai dépéri
mais jâai survécu et quelques mois plus tard un beau jour dâavril après
mûre réflexion et dans la confiance Françoise a finalement changé
dâavis. Lâhiver était fini le printemps renaissait à lâextérieur et Ã
lâintérieur! Cela sâest passé à une époque où nos échanges étaient
épistolaires par nécessité â nous étions éloignés de 800 km ; ils
palliaient lâinexistence des réseaux sociaux et construisaient une relation
plus réfléchie et plus durable. Aujourdâhui on vit à lâère de lâimmédiateté
et du jetable et cela concerne aussi bien les relations humaines que la
technologie!
Voilà plus de trente ans que Françoise a accepté de partager mon
existence les moments légers comme les instants plus difficiles. Elle a
représenté un soutien indéfectible et fidèle dans toutes les circonstances
et à toutes les étapes de ma vie. Elle enchante mes journées et mon
existence et je suis fier dâavoir le privilège de cheminer à ses côtés.
Jâaime son énergie et son bon sens pratique son esprit de justice et
dâintégrité qui ne cherche pas à sâimposer sa douceur et son cÅur de
mère son souci dâanticipation inné qui compense mon désordre
permanent. Sans oublier le soutien constant passionné et engagé quâelle
mâapporte à distance dans chacune de mes aventures.
Nous avons eu une fille puis un garçon.
« Je tâaime dans le temps. Je tâaimerai jusquâau bout du temps. Et
quand le temps sera écoulé alors je tâaurai aimée. Et rien de cet amour
comme rien de ce qui a été ne pourra jamais être effacé^45. »
(^45) Jean dâOrmesson - Un jour je mâen irai sans avoir tout dit - Ãditions Robert Laffont.