Du coté de la force lumineuse
Dans le lointain je distingue une petite masse sombre sous les arbres.
En mâapprochant je devine que câest un homme assis. Quelques dizaines
de mètres plus loin je découvre quâil est sur une chaise roulante. Il est
seul. Tout seul au bord de la route. Jâarrive à son niveau et un sentiment
de compassion me traverse. Et si je mâarrêtais le saluer? Et si je
mâarrêtais simplement pour fraterniser avec lui? Sa situation
dâhandicapé dans ce pays ne doit pas être simple. Jâaimerais lui apporter
un peu de réconfort. Comment va-t-il appréhender ma démarche?
Comment va-t-il réagir? Je ne voudrais pas quâil ressente ce geste
comme de la pitié facile mais comme une démarche de bienveillance. Le
temps que je me pose les questions je lâai dépassé en croisant son
regard vide dâespoir. Il est là sur sa chaise revêtu dâune simple
couverture se divertissant de la circulation sur la route. Il est attentif au
moindre changement venant mettre un peu dâanimation dans son
quotidien et moi je nâai pas le courage ni la volonté de mâarrêter! Un
kilomètre plus tard je continue de mâinterroger et je me convaincs
presque de revenir sur mes pas. Mais le temps est compté et par ailleurs
je ne voudrais pas être mal compris. Cela restera une de mes
frustrations : jâaurais dû mâarrêter! Jâaurais dû écouter mon cÅur qui
mâincitait à rencontrer cet homme plutôt que ma raison qui mâa poussé Ã
poursuivre soucieux de ne pas perdre de temps. Quâauraient pu
représenter quelques kilomètres de « perdus » sur un périple qui en
compte des milliers? Jamais je ne le retrouverai jamais je ne pourrai
remplacer ce geste que jâaurais pu faire et qui mâaurait apaisé.
Juste avant dâarriver à Vatra Dornei un lieu renommé pour ses pistes
de ski lâhiver et pour ses spas ouverts toute lâannée je ressens une
sensation bizarre et perturbatrice comme si quelque chose nâallait pas
bien dans mon corps. Cette impression est apparue brusquement sans que
je parvienne à la définir. Sans doute un coup de fatigue passager. Après
les 126 km et les 1 000 mètres de dénivelé du jour jâenvisage de
mâarrêter dans un camping si jâen trouve un. Les roues me dirigent vers
celui de la ville que jâaperçois situé à flanc de coteau. Un cadre
sympathique avec ses mignons petits bungalows fleuris. Sur la route qui
y conduit quatre enfants me rejoignent et mâescortent à pied jusquâÃ