Vodka on the beach
Je ne peux rien avaler. Après le rangement du bivouac ma décision est
prise : je ferai en train les 100 km qui me séparent de Sochi. Je crois que
jâai de bonnes raisons pour justifier cette deuxième infidélité à mon vélo
après la croisière sur le Danube :
- Les informations sur la route à venir ne sont pas réjouissantes
surtout en raison de tous ces camions. Il y en a encore un qui mâa frôlé
hier jâai senti le souffle menaçant de sa remorque. - Ma condition physique du jour ne me permet pas dâenvisager
sereinement cette étape difficile. Je ne vais pas jouer les héros et ruiner
ma santé. - Lâidée de cette nouvelle expérience ferroviaire en Russie mâavait
déjà effleuré lâesprit avant même de rencontrer les deux obstacles
précédents.
Donc direction Touapsé à lâembouchure du fleuve du même nom. Sur
la route un cycliste qui revient de son travail sâarrête et mâarrête. Lui
aussi me parle de cette fameuse route après Touapsé et dans les mêmes
termes que le motard lituanien. Si jâavais des doutes quant à mon choix
me voici complètement rassuré.
Dans ma préoccupation de trouver la gare ma concentration se relâche
et mon regard se détourne de la chaussée. Quand jâarrive en ville juste
avant un carrefour je subis soudain une violente secousse en même
temps que mon vélo se dérobe sous moi. Je tangue je vacille le destrier
titube. Toutefois mon équilibre fait de la résistance et mon corps me
remercie. Je comprends après-coup quâun profond nid de poule a
échappé à ma vigilance. Le manque de crédits pour la voirie a failli
mâenvoyer à lâhôpital. Câest un autre avantage de ce type de monture :
une chute est moins brutale on tombe sur le côté et les sacoches servent
dâairbags. Impossible de passer par-dessus le guidon. La route est
capricieuse et arrogante le rail devrait être indulgent et tolérant.
Quand jâarrive à la gare je constate quâun train doit sâen aller dans 45
minutes. Le suivant partira beaucoup plus tard. Mais rien nâest prévu
pour les vélos... Heureusement quelquâun a pitié de mon état et mâaide
spontanément à escalader le grand escalier raide qui mène au quai. Pour