J'irai manger des khorovadz

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J'irai manger des khorovadz

draps et nous emmener avec eux? J’avais environ six ans et mes frères
encore moins. Nous étions habitués à croiser ces soldats fréquemment à
entendre les plastiquages à voir les chars rejoignant la caserne proche
rouler avec fracas devant notre maison mais là c’était différent.
Heureusement dans notre habitation il n’y avait pas d’armes. Au
contraire. Notre salon du bas servait régulièrement de lieu d’accueil aux
enfants car mes parents s’occupaient d’animation à destination des
familles du quartier. Sans ségrégation car on y trouvait des Européens
comme des Algériens ce qui déplaisait probablement aux autorités des
deux bords. Nos armes étaient les livres les goûters les jouets et la Bible
de mes parents : l’amour en action face à la violence assumée le désir de
relations humaines et apaisées alors que tout autour la haine se
déchaînait.
Ma phobie des armes date peut-être de cette époque.


Cet épisode me renvoie aussi au jour où j’ai effectué ma première
séance de tir lors de mon service militaire. Nous étions montés dans les
camions afin de nous rendre sur le lieu de l’exercice un champ de tir.
C’était la première fois – et la dernière – que je tenais une arme entre
mes mains. Un fusil mitrailleur. J’étais terriblement mal à l’aise avec un
tel engin je ne savais pas comment l’appréhender. Il me brûlait les mains
et j’aurais voulu le jeter loin très loin! Le lieutenant nous avait postés
chacun devant une cible et nous a intimé l’ordre de tirer. Dans la caserne
le jour précédent nous avions suivi une courte formation qui m’avait
déjà refroidi : l’adjudant avait installé une grosse mitrailleuse sur pied
pour nous en montrer le fonctionnement. J’étais sur le côté à dix
centimètres du canon. Durant la démonstration il a rabattu le capot de
l’endroit où la balle se loge. Pan! Une balle est partie. Une vraie. En
direction de la route nationale au-delà de la haie d’arbres. J’étais juste à
proximité la balle a frôlé ma jambe. L’adjudant était hors de lui et le
supérieur est arrivé en vociférant.



  • Qui a fait ça?

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