Les Echos - 22.10.2019

(avery) #1

Les Echos Mardi 22 octobre 2019 HIGH-TECH & MEDIAS// 23


chargé du produit, attablé dans un
café de San Francisco. La solution
de Snowflake centralise l’ensemble
des données d’une organisation et
permet à ses équipes d’obtenir rapi-
dement des réponses à leurs requê-
tes – prévisions, tendances, corréla-
tions... Une offre que l’entreprise de
San Mateo déploie sur les infras-
tructures cloud d’Amazon, Micro-
soft et Google, à l’opposé de Tera-

Anaïs Moutot
— Correspondante à San Francisco


Près d e 1 milliard de dollars
en sept tours de table, 713 mil-
lions rien qu’en 2018. Une valo-
risation frôlant les 4 milliards de
dollars... La performance n’est pas
banale pour deux cinquantenaires
français dans la Silicon Valley.
Après plus d’une décennie chez
Oracle, Benoît Dageville et Thierry
Cruanes, deux ingénieurs diplô-
més de Paris-VI, fondent ensem-
ble Snowflake, un spécialiste du
traitement des données dans le
cloud, en 2012. Sept ans plus tard,
la start-up veut prendre le chemin
de Wall Street.


Une grande flexibilité
Pour s’y préparer, e lle a nommé à sa
tête Frank Slootman, un dirigeant
ayant mené l’IPO de ServiceNow,
une autre entreprise de cloud com-
puting, e n mai. « La d ate la plus pro-
che à laquelle nous pensons pour
une IPO, c’est le début de l’été 2020.
Ensuite, cela dépendra du chan-
gement de dynamique après les
élections américaines. Il y a beau-
coup d’inconnues », admet Benoît
Dageville, cofondateur et président


NUMÉRIQUE


Fondée par deux cin-
quantenaires français
dans la Silicon Valley,
l’entreprise spécialiste
du traitement des
données dans le cloud
est valorisée près de
4 milliards de dollars.


La start-up
est à la fois l’un
des plus gros clients
d’Amazon, dont
elle loue les serveurs
pour ses abonnés,
et son concurrent.


data, son grand concurrent,
centré sur les serveurs internes
des entreprises.
« Le cloud permet une grande
flexibilité : nous pouvons mobi-
liser énormément de machines
quand l’entreprise a un pic de requê-
tes, ce qui permet d’obtenir plus vite
les réponses », explique Benoît
Dageville. A la clef, une factura-
tion en fonction de ce que les
clients consomment en puis-
sance informatique.
L’entreprise ne partage pas son
chiffre d’affaires, mais assure qu’il a
plus que triplé sur les douze der-
niers mois. Son nombre de clients
a, lui, augmenté de 182 % pour
atteindre 2.000 entreprises, dont
Capital One, Netflix et Electronic
Arts. La firme a également triplé
ses effectifs en un an pour attein-
dre 1.400 salariés, en accélérant
notamment les embauches en
Europe, en particulier à Berlin où
elle a ouvert un centre d’ingénierie
en novembre. En France, Snow-
flake emploie une trentaine de
personnes, gérant notamment les
comptes de Monoprix et Camaïeu.
L’une des clefs de son expansion
est son partenariat avec les trois
plus g ros l oueurs de s erveurs infor-
matiques à distance, un avantage
important à l’heure où « la plupart
des sociétés veulent être multi-
cloud », explique Benoît Dageville.
Après Amazon, la start-up a ajouté
Microsoft en juillet 2018 puis
Google en juin. La société entre-
tient cependant des relations com-
plexes avec ces mastodontes qui

stockent les données de ses abon-
nés. Snowflake est ainsi la fois un
des « plus gros clients d’Amazon »


  • avec plus de 35 millions de dol-
    lars dépensés en location de ser-
    veurs en 2018 selon « The Infor-
    mation » –, un « partenaire » qui
    amène des entreprises à trans-
    férer leurs données sur ses ser-
    veurs, et un « concurrent ». Car le
    numéro un des infrastructures
    cloud vend un service équivalent à
    Snowflake, Redshift, une offre plus
    rentable que le simple stockage de
    données. « Redshift ne marche pas
    quand le niveau de requêtes est
    important. C’est le Teradata du pau-
    vre », tacle Benoît Dageville.


Diversification de l’offre
Prochaine étape pour l’entreprise
avant la Bourse : devenir rentable.
« Quand on grossit comme nous, le
jeu est de dépenser autant d’argent
que vous pouvez. Notre cash-flow
n’est donc pas encore dans le vert,
mais nous sommes proches du point
d’inflexion. Les bases de notre
modèle économique sont saines »,
assure Benoît Dageville, en évo-
quant une marge de 75 %.
L’entreprise veut aussi davan-
tage diversifier son offre. Elle
permet déjà à ses c lients de
mieux monétiser leurs données
en donnant accès à une partie
d’entre elles à d’autres organisa-
tions. En juin, elle est allée plus
loin en lançant un « public data
exchange », une sorte d’« Apple
Store des données » avec cinquante
sources différentes.n

Snowflake, le « frenemy » d’Amazon,


sur le chemin de la Bourse


« La date la plus
proche à laquelle
nous pensons pour
une IPO, c’est le
début de l’été 2020. »
BENOÎT DAGEVILLE
Cofondateur de Snowflake

Snowflake centralise l’ensemble des données d’une entreprise ou organisation et permet
à ses équipes d’obtenir rapidement des réponses à leurs requêtes.

PLACEMENTS


Les MEILLEURS CONSEILS


POUR DéFISCALISER


DOSSIER
SPÉCIAL

Vendredi 25 octobre


ancrage local et de capter une cible
jeune. » Fremantle a aussi r emporté
les appels d’offres pour les versions
allemandes et espagnoles.
« Avec Netflix, on a une grande
liberté de ton, sans doute plus grande
qu’avec un diffuseur classique qui
a la pression de l’audience et des
annonceurs. » Pour lui, c’est l’origi-
nalité de sa proposition d’adap-
tation qui a fait la différence.
« Aujourd’hui, il y a des prix plafonds
sur toutes les cases. La créativité
permet de faire la différence. » Le prix
n’a pas été communiqué, mais il
devrait se situer dans une four-
chette de jeux « classique » en télévi-
sion (entre 50.000 et 100.000 euros,
de source de marché).
C’est en tout cas un joli coup pour
la société hexagonale, qui est filiale
de Fremantle, troisième produc-

teur mondial en termes de chiffres
d’affaires (1,6 milliard d’euros) selon
l’agence de notation Moody’s. La
société cousine de M6 (via leur
actionnaire commun, RTL) cher-
che à diversifier sa base de clients
depuis un an et demi, avec la prise
de fonction de Bruno Fallot. Après
Netflix, Fremantle discuterait avec
une autre plate-forme, « et on a
repris les relations avec TF1 avec
lequel on travaillait moins ces derniè-
res années, si bien qu’on collabore
avec tous les diffuseurs », dit-il.

Croissance du chiffre
d’affaires
Aujourd’hui, M6 représente envi-
ron la moitié de son chiffre d’affai-
res, contre l a majorité il y a
deux ans. Il vient ainsi de débuter le
tournage de « 21 Again », une expé-
rience sociologique pour le groupe
TF1. La société, spécialisée dans le
flux, réfléchirait aussi à de la fiction.
Avec plusieurs productions nou-
velles cette année, dont « L’amour
vu du pré », où les anciens de l’émis-
sion se retrouvent, ou « Cette mai-
son est pour vous », avec Stéphane
Plaza et ses marques historiques,
Fremantle France espère faire croî-
tre de 5 à 10 % son chiffre d’affaires
(28,7 millions d’euros en 201 8), cette
année. « On est sur une bonne dyna-
mique, d’autant qu’il y a énormé-
ment de demandes pour du divertis-
sement, des jeux, etc. Cela permet de
renforcer l’identité des chaînes face à
la concurrence des plates-formes. »n

Marina Alcaraz
@marina_alcaraz


Fremantle France p eut se frotter les
mains. La société de production
derrière « L’A mour e st dans le pré »,
« La France a un incroyable talent »
ou « Questions pour un cham-
pion » a remporté l’appel d’offres
pour la première émission d e jeu en
France de Netflix, jusqu’à présent
très axé sur la fiction.
Elle vient de livrer au géant amé-
ricain six épisodes de « C’est du
gâteau », un concours de pâtisserie
adapté de « Nailed It » qui va débu-
ter le 25 octobre. Présenté par le
comédien Artus, le p rogramme voit
s’affronter des pâtissiers peu expé-
rimentés, tentant de faire des cho-
ses très élaborées. Il est traduit en
8 langues. « Cette émission où
l’humour est roi a été un carton à
l’étranger, se félicite Bruno Fallot, le
patron de Fremantle France. Le flux
[divertissements, jeux..., NDLR]
permet à Netflix de renforcer son


AUDIOVISUEL


La société de produc-
tion derrière
« L’Amour est dans
le pré » a gagné l’appel
d’offres pour un
concours de pâtisserie
inspiré d’un format
américain.


Fremantle à l’origine


du premier jeu de Netflix


Shutterstock

« Avec Netflix,
on a une grande
liberté de ton,
sans doute plus
grande qu’avec un
diffuseur classique
qui a la pression
de l’audience et
des annonceurs. »
BRUNO FALLOT
PDG de Fremantle France
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