“Onned onne plus àl’homme le rôle dominant
et si un emarque véhicul eune imagetropmacho
dans ses campagnes,elle est vit ecritiquée surles
réseaux sociaux.”RaffaelloNapoleon e,directeurgénéralduP itti,
le salon bi sannue ldelamodemasculine
Est-ce«l’affaire»Gillette quirefroidit l’in-
dustrie de la mode?Enjanvier dernier,lamarque
derasoirsquialongtemps prôné«laperfection
au masculin»atransformé son slogan en«The
best men canbe», que l’onpourrait traduirepar
«lemeilleur des hommes », et diffusé aux États-
Unis une publicitéqui afait grand bruit.Onyvoit
des hommes detous âges s’interposer devant
leurcopain qui siffle une fille,celui qui en harcèle
une autre, un groupedegarçons qui sebagar-
rent...Visionnée plus de 32 millions defois sur
YouTube, la vidéo, quiévoque le sujet sensible de
la«masculinitétoxique»aété«likée»
800 000fois... mais détestéeparplus du double,
pardes gens quin’ontpas hésitéàposter sur les
réseauxsociauxdes photosderasoirset de
moussesàraser Gillettejetésàlapoubelle.
AlessandroSartori deZegna enaconscience:
«Évidemmentque notremessage peut êtreclivant.
Nous avonsreçu quelquesréactions négatives mais
la plupart desretourssontenthousiastes, lesgens
“repostent” notremessage,posentdes questions.
Nous savons bien qu’ouvrir le débat peut engen-
drer des risques.»Mais il crée aussi le buzz. Alors
queGuccicélébrait au début des années 2000 le
mâle alphadans des campagnesporno-chic, son
actuel directeur artistique, AlessandroMichele, a
fait parler de luiavec ses mannequinsgender fluid,
habillés de sonvestiairerococobaroque. Etchez
SaintLaurent, en 2013,époqueHediSlimane, la
très androgyne Saskia deBrauw,vêtuede
lacollection masculine etrecroquevillée sur
elle-même,n’étaitpaspassée inaperçue.
Benjamin Simmenauer,professeuràl’Institut
français de la mode, estime qu’aujourd’hui«on
voitcertaines marques emprunterdes identités
alternativesàdes figures des années 1970comme
AndyWarhol etDavid Bowie».«Jenepense pas
que ce soit uneréaction au mouvement#metoo,
la représentation du masculin dans la mode est
critiquée, discutée,redéfinie depuis plus de vingt-
cinq ans,explique-t-il.Mais il faut reconnaître
que la majoritédes marques grand publicconti-
nuentdevéhiculer des stéréotypes trèsgenrés et
on voitrare mentdes mannequins hommes petits,
chauves ou bedonnants.»
Si
un mastodontede lafastfashion
nepeut se risqueràfroisser une
partie de saclientèle, les jeunes
créateursont,eux, plus d’aisanceà
bousculer lescodes.Auréolé du
prix du label créatif de l’Andam
(l’Association nationalepour le
développementdes arts de la mode) en 2008
pour sa mode qui découvrelecorpsdeshommes,
Ludovic deSaintSernin vientdeprésentersader-
nièrecampagneaveclephotographeWilly
Vanderperre.«Onyvoit des hommes effondrés,
allongés sur unrocher comme des anges arrivés sur
Terre, dans des poses lascives ou soumises qui peu-
ventsûrementenchoquercertains,notelecréa-
teur français.Quand on est jeune,onaplusde
libertépour exprimer ses opinions.Cela me semble
incroyable que la plupart des hommes dans la
mode soienthomosexuels et qu’ils neréalisentque
rare mentdes imageshomo-érotiques.»
T,le magazine hebdomadaireduNewYork Times,
apublié mi-septembredans son Spécial mode
homme une série mettantenscène l’histoire
d’amour d’uncouple homosexuel.«Lentementet
laborieusement, les définitions de la masculinitése
diversifientaujourd’hui et deviennentmême com-
plètementobsolètes pour les pluscourageux d’entre
nous»,écrit ainsiHanyaYanagihara,rédactriceen
chef du magazine, dans son éditorial.
Dans ungenretotalementdifférentmaisavec au
fond,unemêmevolontéd’éviter lesreprésenta-
tions trop lisses de l’homme, Figaret vientde
révéler sa nouvelle égérie:JoeyStarr,choisi selon
la PDG ÉléonoreBaudry,pour«son charisme, sa
masculinitéaffirmée mais aussi sesfailles, qu’il
assume, et son parcourssinueux».«Lareprésen-
tation de l’hommeaévolué danstoutes les indus-
tries, la mode, le parfum, l’automobile...Mais ses
nouvellesformes sontpropresàchaque pays, à
chaqueculture.Ce qui estcertain, c’est qu’on ne
donne plusàl’homme lerôle dominantetsiune
marque véhicule une image trop machodans ses
campagnes, elle est vitecritiquée sur lesréseaux
sociaux »,noteRaffaelloNapoleone, directeur
général du Pitti, salon bisannuelconsacréàla
mode masculine. Des campagnes aux manne-
quins ni machos niféminins?Nivirils ni trop
sensibles?Lapolitique du«ni-ni»aencorede
beaux joursdevantelle.
La marque
italienne de luxe
Zegna arecruté
l’acteur
Mahershala Ali
pour sa nouvelle
campagne
(à gauche)
Ci-dessus, la
collection Gucci
TailoringPre-Fall
2019 avec Harry
Styles, portant
les pièces
rococo baroques
d’Alessandro
Michele.
Legoût
Josh Olins/Alessandr
oSartori. Harmon
yKorine