Même pour les 60 % de clientèle
individuelle, la première réserva-
tion était chinoise, la deuxième
russe, la troisième brésilienne. « On
apporte à la ville notre clientèle loin-
taine et fidèle à la marque », assure l a
directrice. Elle enregistre 15 % de
Moyen-Orientaux sur les trois pre-
miers mois d’exploitation. Avec un
taux de remplissage de 50 %, le
démarrage « dépasse les attentes ».
Mais Laurent Duc, président du
syndicat hôtelier Umih dans le
Rhône, regrette la politique tari-
faire « trop basse ». « Le lieu et les
prestations réclament mieux que des
nuits à 250 euros », dit-il, soucieux
que chacun respecte les codes de sa
catégorie.
Le bar sous le grand dôme,
chef-d’œuvre de l’architecte Soufflot
culminant à 32 mètres de hauteur, a
vu défiler jusqu’à 2.000 personnes
par jour durant l’été : des locaux (pas
forcément consommateurs mais
accueillis avec bienveillance)
curieux de redécouvrir le lieu qui a
vu naître un tiers des Lyonnais avant
sa fermeture en 2010. Parmi les
nombreux interdits des Monu-
ments historiques, il y avait l’impos-
sibilité d’accrocher des enceintes et
des radiateurs aux murs. Problème
résolu avec des systèmes de sonori-
sation connectés dans les fauteuils
et la remise en service d’un système
de chauffage par le sol du XIXe s iècle.
Habillé de soie
Le sixième Intercontinental de
France couronne une reconversion
hors norme menée par Eiffage
depuis 2013, visant à réhabiliter
51.500 m^2 au cœur de la Presqu’île.
L’hôtel est finalisé après 30.000 m^2
de galeries commerciales et de
bureaux et avant la Cité de la gastro-
nomie à la fin de l’année. Noir et or,
« monacal et précieux », habillé de
soie en hommage à l’histoire de la
ville, l’Intercontinental Hôtel-Dieu
est le plus grand dans sa catégorie à
Lyon, mais de peu : en décem-
bre 2018, le Boscolo, fermé depuis
2013, avait rouvert ses 133 chambres
rénovées dans le style italien.
En neuf mois, l’offre 5 étoiles a
quasiment doublé à Lyon, de
377 chambres dans cinq établisse-
ments à 654 chambres dans désor-
mais sept adresses de prestige. Cel-
les du centre-ville se sont associées
pour recevoir un voyage d’entre-
prise de 400 Américains en 2021.
Pour Laurent Duc, l’Intercontinen-
tal va enfin mettre Lyon sur la carte
des grands congrès de médecins,
dirigeants e t professions l ibérales, à
très fort pouvoir d’achat. « On va
remplir le centre de convention de la
Cité internationale – et les hôtels —
avec ces professionnels qui descen-
dent pour un tiers dans les 5 étoiles et
deux tiers dans les 4 étoiles. » Jus-
que-là, Lyon jouait d ans la catégorie
en dessous, avec des cadres sur
notes de frais plus serrées.
L’hôtellerie de la Métropole s’est
étoffée de 3.500 chambres depuis
2015, frôlant les 15.000 chambres.
Proportionnellement, les 4 et 5 étoi-
les en ont le plus profité, respective-
ment + 30 et + 50 %. Mais en valeur
absolue, l’augmentation concerne
surtout les 2 et 3 étoiles, « et ça, le
marché ne les absorbe pas », regrette
Laurent Duc. Pour lui, « le bon posi-
tionnement actuellement à Lyon, c’est
le 4 étoiles, qui mange sur la clientèle
du 3 étoiles en baissant ses prix en
période creuse, et fait flamber ses
tarifs en période de forte d emande ».n
Lyon internationalise
sa clientèle
à coups d’hôtels
4 et 5 étoiles
l Lyon a doublé sa capacité de chambres 5 étoiles.
lLa ville peut accueillir des gros congrès d’affaires de
plusieurs centaines de visiteurs à très fort pouvoir d’achat.
Le Bar, cœur de l’hôtel Continental, sous le grand dôme, chef-d’œuvre de l’architecte Soufflot,
culmine à 32 mètres de hauteur. Des systèmes de sonorisation sont connectés dans les fauteuils
et le chauffage par le sol datant du XIXe siècle est remis en service. Photo Eric Cuvillier
Cette montée en gamme s’est
aussi concrétisée par l’arrivée de
nouveaux investisseurs qui, moti-
vés par les travaux d’embellisse-
ment de la ville, ont repris des éta-
blissements existants pour les
restructurer. « En centre-ville, le
foncier est contraint et offre peu
d’opportunités, d’où le rachat d’éta-
blissements existants », analyse
Denis Zanon, directeur général de
l’office du tourisme.
Le groupe italien Boscolo a ainsi
cédé ses deux hôtels du centre-
ville. L’ancien Park Hôtel bénéficie
d’une restructuration-extension
pour devenir un hôtel Maison
Albar Hotels 5 étoiles, qui propo-
sera 140 chambres et suites. Le
Plaza a été repris par l’américain
Värde Partners, qui va le transfor-
mer pour un investissement de
25 millions d’euros en DAHôtel de
160 chambres 5 étoiles.
Ligne de tramway
Dans le Vieux Nice, pauvre en
offre hôtelière, l’ancien couvent
de la Visitation, propriété de la
ville, va être transformé par le
groupe Perseus en établissement
5 étoiles (85 chambres). Les tra-
vaux liés à la création des deux
lignes de tramway ont p ermis éga-
lement de libérer du foncier. A
proximité de la gare, le projet
immobilier Iconic conçu par
Nice vise 1.200 chambres de plus en 2020
Christiane Navas
— Correspondante à Nice
C’est l’effervescence hôtelière à
Nice. L’office du tourisme en fait
même un argument sur son site :
« Plus de 1.200 nouvelles cham-
bres sont attendues à l’horizon
- » Avec quelque 200 hôtels
pour près de 10.000 chambres et
un taux de remplissage moyen de
70 %, la ville dispose déjà de l’un
des plus importants parcs hôte-
liers en France derrière Paris.
La capitale de la Côte d’Azur est
aussi celle qui propose le plus
d’annonces de locations meublées
touristiques, plus d e 10.000, sur les
plates-formes collaboratives
après la capitale. « La capacité
d’accueil est suffisante, mais nous
avions besoin d’une montée en
gamme, reconnaît Denis Cippo-
lini, président du Syndicat des
hôteliers Nice Côte d’Azur, près de
170 millions d’euros ont été investis
ces trois dernières années dans la
modernisation de nos établisse-
ments. »
Des investisseurs restruc-
turent des établissements
du centre-ville. Un pôle
hôtelier émerge à l’ouest
de la cité dans la perspec-
tive du futur palais
des expositions.
Léa Delpont
— Correspondante à Lyon
Les premiers hôtes de l’Interconti-
nental ont posé leurs valises dans les
144 chambres et suites le 6 juin,
deux jours après l’ouverture du
5 étoiles lyonnais dans l’ancien
Hôtel-Dieu. Du jamais-vu à Lyon :
260 Australiens qui avaient réservé
leur séjour sur plan il y a deux ans.
Suivis par un groupe d’entreprise de
100 Américains restés huit nuits sur
place. « Ils ont eu largement le temps
de dépenser beaucoup d’argent dans
tous les grands restaurants de la
ville », souffle Madelijn Vervoord, la
directrice générale de ce fleuron
hôtelier classé monument histori-
que, avec sa colossale façade de
360 mètres le long du Rhône. Le
prestigieux établissement promet
d’attirer à Lyon une nouvelle clien-
tèle plus internationale, et consom-
matrice de luxe. Pour les séminaires
et « incentives » de grandes entre-
prises étrangères, l’Intercontinental
dispose de son propre centre de con-
vention pour 250 personnes, avec
une salle du Conseil datant de 1626.
HÔTELLERIE
« Le lieu
et les prestations
réclament mieux
que des nuits
à 250 euros. »
LAURENT DUC
Président du syndicat hôtelier
Umih
l’architecte Daniel Libeskind pour
la Compagnie de Phalsbourg intè-
gre un Hilton Garden Inn de
120 chambres 4 étoiles.
D’autres projets vont être lan-
cés, à proximité de stations de
tramway, dans le quartier Libéra-
tion et Place Garibaldi. Un nou-
veau pôle hôtelier se dessine éga-
lement à l’ouest de la ville dans la
perspective de la construction
d’un palais des expositions au sein
de l’Eco-Vallée, l’opération d’inté-
rêt national. Face à l’aéroport, le
projet immobilier Air Promenade
comprend un hôtel Sheraton de
230 chambres 4 étoiles et plu-
sieurs établissements 3 et 4 étoiles
vont voir le jour dans le quartier
d’affaires Grand Arénas, dont le
Crowne Plaza (130 chambres),
Holiday Inn (130 chambres), un
hôtel Okko et un hôtel Moxy du
groupe Marriott. « Il n’y aura pas
de surcapacité hôtelière, estime
Denis Cippolini, si le développe-
ment du tourisme d’affaires, indis-
pensable pour assurer une fréquen-
tation sur les ailes de saison, est bien
au rendez-vous. »n
L’embellissement
de la ville motive
les investisseurs.
teaux. Au total, la création de
l’hôtel de luxe pourrait générer
entre 30 et 50 emplois.
Historiquement spécialisée
dans l’aménagement des centres
commerciaux de périphérie, la
Compagnie de Phalsbourg s’est
diversifiée d epuis quelques
années, dans les aménagements
urbains innovants et l’hôtellerie.
Neuf de ses projets ont été retenus
dans le cadre du concours Réin-
venter Paris. Dont celui de la réno-
vation du fameux hôtel de la
Bûcherie, construit au XVe siècle,
qui accueillera dès cet automne un
incubateur dédié à la philanthro-
pie. Idem avenue de Saxe, toujours
dans le 5e arrondissement, où
l’entreprise a rénové un immeuble
de 6.500 m^2 , transformé en hôtel
4 étoiles, exploité par Hilton.
La Compagnie de Phalsboug
n’est pas le seul investisseur dési-
reux d’exploiter la proximité de
l’ex-Picardie avec la région pari-
sienne. Cet été, Hyatt, le géant de
l’industrie h ôtelière haut de
gamme, a inauguré son neuvième
établissement français sur le
domaine de Chantilly, dans l’Oise.
Doté de 211 chambres dont 14 suites
de luxe, l’établissement a coûté pas
moins de 60 millions d’euros et sus-
cité la création de 150 emplois.n
Amiens mise sur le tourisme d’affaires
haut de gamme
Guillaume Roussange
— Correspondant à Amiens
En 1909, sa construction avait
coûté 1 million de francs-or, une
somme colossale pour l’époque.
Cent dix ans plus tard, la rénova-
tion de l’hôtel Bouctot-Vagniez
d’Amiens ne sera pas moins dis-
pendieuse : 35 millions d’euros.
L’investissement sera porté par la
Compagnie de Phalsbourg, l’une
des foncières privées françaises en
vue, créée il y a trente ans par Pierre
Journo. Elle compte transformer,
d’ici à 2021, le bâtiment classé en un
hôtel 5 étoiles de 35 chambres. Une
quinzaine seront aménagées dans
la partie dessinée par Louis
Duthoit, le reste dans un immeuble
adjacent, construit en 2012 par l’ex-
propriétaire des lieux, la Chambre
régionale de commerce et d’indus-
trie de Picardie (CRCI).
L’institution consulaire avait
consacré 6 millions d’euros à cette
extension à haute qualité environ-
nementale (HQE). Censée abriter
La Compagnie de Phals-
bourg vient d’acheter
l’ex-siège de la Chambre
régionale de commerce
et d’industrie de Picardie,
transférée à Lille.
une maison de l’international,
morte dans l’œuf, celle-là avait été
équipée d’un auditorium de
190 places. Rendu inutile suite au
transfert, à Lille, de la Chambre
régionale, l’ensemble a finalement
été mis en vente fin 2016.
Relais & Châteaux
« Cette acquisition doit, selon nous,
répondre à une demande pour le
tourisme d’affaires à Amiens. La
destination, bien placée géographi-
quement, n’est pas encore identifiée
par une clientèle luxe. Il s’agira donc
de la valoriser avec le futur exploi-
tant », explique Mathieu Boncour,
directeur des relations institution-
nelles et du mécénat de la foncière.
Si la Compagnie n’a pas encore
tranché le choix du futur gestion-
naire, des discussions sont « bien
avancées » concernant l’adhésion
du site au réseau Relais & Châ-
35
MILLIONS D’EUROS
L’investissement de la
Compagnie de Phalsbourg,
pour transformer en hôtel
de luxe l’hôtel Bouctot-Vagniez.
PME & REGIONS
Mercredi 2 octobre 2019Les Echos