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DIMANCHE 8 LUNDI 9 SEPTEMBRE 2019
ÉCONOMIE & ENTREPRISE
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que français. Ainsi, l’ancien minis
tre de l’écologie sous François Mit
terrand, Brice Lalonde, plutôt fa
vorable au nucléaire, plaide pour
une révision du mode de calcul
concerné pour favoriser le chauf
fage électrique. « La situation a
beaucoup changé, les radiateurs
électriques sont beaucoup plus ef
ficaces qu’auparavant », plaide un
haut dirigeant d’EDF, qui estime
qu’« il s’agit surtout pour la filière
gazière d’une mission de survie
pour ne pas disparaître ».
« Pas de solution unique »
De manière plus surprenante,
certaines associations environ
nementales se retrouvent plutôt
du côté des gaziers que de celui
des partisans de l’électrique. L’As
sociation négaWatt, qui plaide
pour une baisse radicale de la con
sommation d’énergie, a ainsi pu
blié une étude sur le sujet en avril,
Electricité ou gaz : la bataille du radiateur
La réglementation va évoluer dans les bâtiments neufs. Partisans de l’électrique et du gaz s’affrontent
C’
est une intense ba
taille de lobbying
qui se joue en cou
lisses, mais cette
foisci, elle concerne un objet du
quotidien de tous les Français : le
radiateur. Ces derniers mois, les
partisans de l’électrique et du gaz
démultiplient leurs efforts pour
tenter de convaincre les pouvoirs
publics. En ligne de mire : la nou
velle réglementation environne
mentale, dite RE 2020, qui doit
définir quel mode de chauf
fage sera privilégié dans les bâti
ments neufs.
Alors que la précédente régle
mentation faisait la part belle au
gaz, les pouvoirs publics sem
blent prêts à revenir en arrière et
privilégier le toutélectrique dans
les nouveaux bâtiments. Derrière
son aspect anodin, le sujet est
central pour les énergéticiens.
D’un côté, EDF et les partisans
du nucléaire font de longue date
la promotion du chauffage élec
trique. Avec désormais un argu
ment nouveau : installer des ra
diateurs électriques serait meil
leur pour le climat, puisque l’élec
tricité produite en France émet
très peu de gaz à effet de serre.
De l’autre, Engie (exGDF Suez) et
la filière gazière estiment que
multiplier les radiateurs électri
ques augmenterait la consomma
tion d’énergie du pays – et serait
donc une mauvaise nouvelle
pour le climat.
Précarité énergétique
Le sujet est central pour la politi
que climatique : le bâtiment repré
sente environ 20 % des émissions
de CO 2 de la France, et une part im
portante est liée directement ou
indirectement au chauffage.
Historiquement, l’Hexagone a
connu un développement des ra
diateurs électriques sans égal en
Europe. Plus de 9 millions de lo
gements sont chauffés ainsi, soit
quasiment autant que dans le
reste de l’Europe. L’installation
massive de ces convecteurs a ré
pondu à la mise en place d’un
parc nucléaire surdimensionné.
Dans les années 1970, EDF se fait
ainsi l’avocat des bénéfices du
chauffage électrique, présenté
comme moins cher à l’installa
tion et meilleur pour la santé.
Mais le radiateur électrique a un
problème d’efficacité : il a un ren
dement énergétique médiocre et
nécessite une grosse production
d’énergie pour pouvoir produire
de la chaleur. D’autant que, dans
de nombreux logements, les ap
pareils installés sont peu effica
ces, et alourdissent la facture des
ménages – il est souvent men
tionné comme l’une des causes
de la précarité énergétique.
La présence très forte de radia
teurs électriques pose un autre
problème, qui se révèle un peu
plus chaque hiver : lors des épiso
des de grand froid, la consomma
tion d’électricité augmente de ma
nière considérable, et dépasse les
capacités de production du pays.
C’est ce qu’on appelle la « ther
mosensibilité » : chaque hiver, le
radiateur électrique représente
au moins 30 % de la consomma
tion, selon le Réseau de transport
d’électricité (RTE). Pour faire face à
cette pointe, il faut mobiliser les
centrales thermiques, fortement
émettrices de gaz à effet de serre –
tout en important de l’électricité
de nos voisins.
Pour limiter la diffusion de ces
radiateurs « grillepain », les pou
voirs publics ont opté, depuis 2012,
pour une réglementation plus fa
vorable à l’installation du gaz dans
les logements individuels.
Mais le gaz naturel, luimême
une énergie fossile, est l’un des
principaux contributeurs au ré
chauffement climatique. Or, Paris
est justement en train d’inscrire
dans la loi l’objectif d’atteindre la
« neutralité carbone » en 2050, ce
qui dessine une très forte baisse,
voire un abandon du gaz dans le
mix énergétique du pays.
Les partisans de l’électrique sem
blent avoir gagné la première
manche : les documents d’orienta
tion de la programmation plurian
nuelle de l’énergie (PPE), la feuille
de route énergétique française, et
les premières notes de cadrage is
sues des services du ministère lais
sent entrevoir une révision du
mode de calcul qui préside à ces
décisions. Un sujet complexe et
technique, mais qui cache des
orientations très claires.
« Ces dispositions sont proba
blement rédigées directement ave
nue de Wagram [au siège d’EDF] »,
s’indignait récemment devant
des journalistes le directeur géné
ral adjoint d’Engie, Didier Hol
leaux, qui faisait état d’un intense
lobbying du grand rival électrique
pour obtenir des arbitrages favo
rables. « EDF souhaite que la con
sommation d’électricité augmente
pour justifier le maintien d’un parc
nucléaire massif », grince un autre
patron du secteur gazier.
A l’inverse, les partisans du tout
électrique estiment essentiel de
faire sortir le gaz du mix énergéti
Les vins d’IledeFrance prêts
à décrocher leur appellation
Le label IGP (indication géographique protégée) pourrait être
décerné aux vins de la région. Un moyen d’y relancer la viticulture
U
ne appellation viticole
pour quelques dizaines
d’hectares de vigne. C’est
le tour de force que devrait réussir
l’IledeFrance, dont les vins accé
deraient au label IGP (indication
géographique protégée). Le co
mité vin de l’Institut national de
l’origine et de la qualité (INAO)
doit statuer le 15 octobre.
Si le feu vert est donné, ce sera
une victoire pour Patrice Bersac,
président du Syndicat des vigne
rons d’IledeFrance (Syvif) qui dit
travailler sur le dossier depuis
une vingtaine d’années. « L’objec
tif est de relancer la viticulture en
IledeFrance. L’important est que
cette IGP existe. Il y aura peutêtre
à terme 5 000 ou 6 000 hectares
de vigne », explique Olivier Nas
les, membre du comité vin de
l’INAO qui soutient la démarche.
Le projet n’a pas manqué de
soulever des oppositions. En par
ticulier de la part des grands vi
gnobles voisins, l’Anjou mais sur
tout la Champagne. « Notre souci
est le respect de l’appellation
d’origine Champagne. Nous lut
tons contre toute usurpation de
notoriété. Nous ne souhaitons pas
de vignobles en périphérie, ni dans
les 45 communes qui pourraient
entrer dans notre appellation à
l’issue de notre travail de révision
des surfaces », explique Maxime
Toubart, président du Syndicat
général des vignerons de la
Champagne.
« Cordon sanitaire »
Après d’intenses discussions, le
cahier des charges, publié en jan
vier, tient compte de ces exigen
ces. Le territoire de l’IGP, qui
s’étend sur la zone de l’Ilede
France historique, prévoit un
« cordon sanitaire » avec la Cham
pagne. De plus, la production de
vin pétillant n’est pas autorisée
sous l’IGP IledeFrance. L’éti
quette se posera sur une gamme
de vins rouges, blancs et rosés.
Il n’empêche. La procédure na
tionale d’opposition (PNO) qui
s’est ouverte à l’issue de la publi
cation du cahier des charges a
donné matière à d’autres oppo
sants au projet ainsi défini.
L’Anivin, l’interprofession qui dé
fend les vins sans appellation et
vendus sous l’étiquette vin de
France, s’interroge, par exemple,
sur le risque de confusion entre
vins de France et d’IledeFrance.
La Winerie parisienne fait aussi
partie des opposants au cahier
des charges. Cette société créée
en 2015 par trois entrepreneurs
s’est d’abord lancée dans le né
goce de vins assemblés dans ses
locaux à Montreuil. Puis, en 2016,
elle a demandé une autorisation
de plantation de trois hectares de
vigne, suivie d’une demande de
23 hectares en 2017. Elle en a déjà
planté dix dont trois seront ven
dangés pour la première fois cette
année. Le terrain a été mis à dispo
sition par le département des Yve
lines. La société, qui ne communi
que par son chiffre d’affaires ni ne
donne le montant de ses investis
sements, affirme fédérer une qua
rantaine de porteurs de projet
prêts à planter dans la région fran
cilienne. Derrière ceuxci, voiton
l’ombre d’acteurs d’une tout autre
taille? Les promoteurs de l’IGP Ile
deFrance évoquent des marques
d’intérêt de grands groupes pré
sents dans les céréales et le vin.
A l’exemple de Soufflet.
Ces nouveaux appétits sont
favorisés par la libéralisation,
aujourd’hui encore encadrée, du
marché viticole européen. Depuis
2016, chaque Etat membre peut ac
corder des autorisations de planta
tion dans la limite de 1 % de la sur
face totale de son vignoble. Soit un
maximum de 8 100 hectares par
an en France. Un dispositif qui
pourrait être rediscuté prochaine
ment au niveau européen. M. Ber
sac et les vignerons franciliens
réunis ont d’ailleurs envoyé un
courrier à Bruxelles, en 2018, pour
exiger une plus grande ouverture
du secteur viticole français.
laurence girard
Le sujet
est central pour
la politique
climatique, alors
que le bâtiment
représente
environ 20 % des
émissions de CO 2
En France,
plus de 9 millions
de logements
sont chauffés
à l’électrique, soit
quasiment autant
que dans le reste
de l’Europe
La production viticole française
attendue en baisse de 12 %
Le ministère de l’agriculture a précisé, fin août, ses prévisions
de récolte pour les vendanges 2019. Il table désormais sur un
volume en baisse marquée de 12 %, à 43,40 millions d’hectoli-
tres, contre 49,37 millions d’hectolitres en 2018. En comparant
à la moyenne des cinq dernières années, le repli est toutefois li-
mité à 4 %. Le printemps froid et pluvieux a affecté de nombreux
vignobles, puis la canicule a brûlé des vignes dans le Gard, le Var
et l’Hérault. Enfin, la grêle est tombée sur le Beaujolais mi-août.
Reste à attendre le verdict définitif des sécateurs. Les exporta-
tions de vins français ont, quant à elles, encore progressé de 6 %
au premier semestre 2019 pour atteindre 4,5 milliards d’euros.
2,
C’est l’augmentation, en gigawatts, de la consommation d’électricité
hivernale en France, et ce pour chaque degré perdu (soit l’équivalent
de la puissance de plus de deux réacteurs nucléaires). Il s’agit là d’une
spécificité liée au développement important du chauffage électrique :
la France est le seul pays européen à être aussi sensible à la demande
de chaleur en plein hiver. En février 2012, le pays a ainsi connu
une pointe de consommation à plus de 102 gigawatts d’électricité
- un record, bien au-delà de nos capacités de production. Chaque
année, il faut donc importer de l’électricité de nos voisins européens.
et s’inquiète du retour du « chauf
fage électrique peu performant
dans les bâtiments ».
« Il y a de la mauvaise foi des
deux côtés », souligne un bon con
naisseur du dossier, qui modère :
« Il n’y a pas de solution unique, il
faut d’abord bien travailler sur
l’isolation et ensuite voir ce qui est
le plus efficace, des pompes à cha
leur, du bois, des chaudières à gaz
performantes, etc. Mais il faut
comprendre que ce qui est installé
chez les gens ne va pas changer,
donc si on met du gaz, on va conti
nuer à avoir du gaz, et le gaz, c’est
très émetteur en CO 2. »
Pour faire face à cette critique, le
secteur gazier fait une intense
promotion du biogaz ou « gaz re
nouvelable », obtenu à partir de
déchets agricoles. Mais il repré
sente aujourd’hui moins de 1 % du
gaz consommé en France.
nabil wakim
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LE VOLUME 2
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©Edouard Caupeil/Pasco ALEXANDRE ADLER
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