94 La Revue nationale de la chasse - No 864 septembre 2019
de coton ou livrés aux éleveurs
qui ont empoisonné les fauves, car
ils tuaient leur bétail nous dit Jean-
Pierre Bernon, président de l’AGGC.
Dans tous les cas, l’interdiction de
chasser induit un déclin de la faune
souvent irréversible. Le Botswana l’a
bien compris en levant le moratoire
sur la Grande chasse le 22 mai 2019.
Jean-Pierre Bernon précise que ce
n’est pas la Grande chasse qui me-
nace le bestiaire sauvage africain,
mais la fragmentation de ses habitats
et la surexploitation des ressources
naturelles. La Grande chasse au
contraire contribue à la préservation
de la biodiversité en générant des re-
venus importants qui profitent aux
communautés locales, financent des
brigades de lutte antibraconnage,
des infrastructures de surveillance
et des réseaux de pistes. Elle peut
être développée sur des territoires
non adaptés au tourisme de vision,
cette activité nécessitant des espaces
naturels desservis par des réseaux
routiers et aériens de qualité (ce qui
suppose des aménagements de ter-
ritoires pas forcément propices à la
quiétude de la faune sauvage), une
stabilité politique et économique,
de fortes densités d’animaux évo-
luant dans des espaces à végétation
clairsemée où ils sont bien visibles.
Un impact moindre sur
l’environnement
La Grande chasse perturbe peu
l’environnement : elle implique la
pénétration d’un homme tous les
20 000 hectares, contre un tous les
deux hectares pour le tourisme de
vision. Et le grand public doit savoir
et comprendre que le dérangement
et la modification des habitats est
plus nocif pour la faune qu’un pré-
lèvement exercé ici et là, de loin
en loin. La Grande chasse est éga-
lement un "marché de niche" qui,
avec un faible nombre de clients,
génère des revenus nettement su-
périeurs à ceux résultant du tou-
risme de vision, ceci en exerçant un
impact environnemental moindre
tant du point de vue du bilan car-
bone que de la consommation en
eau ou du volume des déchets. À
titre d’exemple, au Zimbabwe et en
Tanzanie, les revenus générés par
un chasseur sont respectivement 30
et 14 fois plus importants que ceux
dispensés par un adepte de tourisme
de vision. L’économie de la Grande
chasse en Afrique subsaharienne
représente plus de 200 millions de
$ US, pour seulement 19 000 clients.
Nous pouvons dès lors affirmer que
cette activité est un outil nécessaire
à la préservation de la biodiversité
sur le continent noir.
Apprendre à mieux
communiquer
La force de nos adversaires, c'est en-
core une fois les réseaux sociaux qui
manipulent l’opinion et deviennent
souvent des poubelles, réceptacles de
toutes les haines, rancœurs et jalou-
sies. Ne leur donnons pas du grain à
moudre en y postant des images qui
dévalorisent la chasse et choquent
un grand public déjà globalement
opposé au safari. Et battons-nous
pour préserver la Grande chasse,
dont la suppression aurait un impact
désastreux allant à l’encontre même
des objectifs de nos opposants, car
elle signifierait à coup sûr la dispa-
rition de tout le bestiaire embléma-
tique africain.
Prenons l’exemple du Kenya, où
la chasse est interdite depuis 1977.
Cette mesure a eu pour seul effet une
diminution de 40 % des populations
animales sauvages en périphérie et
au sein même des aires protégées
en raison d’une augmentation du
braconnage. Bien que considérée
comme une destination de référence
pour le tourisme de vision, les den-
sités animales n’y ont jamais été
aussi faibles. Il va donc nous falloir
apprendre à mieux communiquer,
plus intelligemment et pragmatique-
ment, dans le respect de nos détrac-
teurs qui ignorent tout de notre ac-
tivité, afin de leur faire comprendre
que nous poursuivons un objectif
commun : la protection de la faune
sauvage dans ses habitats naturels.
Ceci avant que l’irréversible ne se
produise. ◆
Il chasse les chasseurs
de trophées
Depuis son ordinateur en Bretagne, Julien, 30 ans,
traque les chasseurs de trophées sur internet via son
compte Twitter et sa page Facebook « Ban trophy
hunting France/Un clic pour un safari ». Conscient
du pouvoir des réseaux sociaux et même s’il se
défend d’inciter à la haine, c’est bien le résultat
auquel il est parvenu. En offrant les contacts
disponibles et adresses mail des chasseurs de
trophées, il encourage implicitement les internautes
au harcèlement. Notez que la commission des lois de
l’Assemblée nationale a récemment révisé un texte
destiné à la lutte contre les messages illégaux postés
sur Internet, le harcèlement pouvant faire l’objet de
poursuites pénales.
Chasse Mise au point
...
Le bilan
carbonne du
tourisme de
vision est de loin
plus négatif que
celui de la
Grande chasse.
D. Gest