les capte en tout cas au même moment de leur vie : en
dernière année de lycée, à la sortie d’une cure de désin-
tox, lorsqu’ils s’apprêtent à replonger. Cet effet miroir
n’est pas une coïncidence, ce n’est pas non plus un élé-
ment repr is de la sér ie israélienne dont Euphoria est ins-
pirée : c’est une manière très assumée de faire ricocher
la même idée (autobiographique) à huit ans d’intervalle
et d’observer la manière dont elle a mûri dans la tête du
cinéaste. Un vrai geste d’auteur déjà conscient de son
importance, et peut-être même de son destin.
Métaphore politique
Contrairement à Elliot, pa rodie cr ispante d’ado cynique,
la jeune Rue, interprétée par une Zendaya qui a réussi sa
mue d’actr ice, est poignante pa rce qu’insaisissable. Elle
est habitée d’un bout à l’autre de la série par des vents
contraires : parfaitement libre et émancipée mais ne cra-
chant jamais sur un gros câlin de sa maman ; profondé-
ment existentialiste et érudite mais se réfugiant dans la
télé-réalité lorsque la douleur de vivre est un peu trop
forte ; complètement désabusée dans son attitude mais
s’offrant le luxe de croire en l’amour lorsqu’elle s’allonge
près de sa meilleure copine Jules, adolescente en phase
de transition. « Moi, je veux conquérir des mecs pour
conquérir ma féminité », avoue cette même Jules, créa-
ture ahurissante et déjà inoubliable. À force de mettre,
par sa seule présence, un chaos pas possible dans la tête
(et le slip) des mâles bourrins qui l’entourent, elle de-
vient vite la grande métaphore politique d’Euphoria. Un
révélateur peroxydé du puritanisme ambiant. Pas bien
compliqué après ça de l’identifier comme le double de
Épisode 1 Réalisé par
AUGUSTINE FRIZZELL NOTE: 3/5
Après une overdose, Rue sort
de rehab et retombe illico dans
la came que lui vend le gentil
Frezco. Elle devient dans le
même temps copine avec
Jules lors d’une soirée chez
McKay où Maddy chope Tyler
dans la piscine, ce qui rend
évidemment dingue son
ex-boyfriend, Nate. Du style,
de l’énergie, une bande-son
tuante, des zizis, mais surtout
beaucoup d’exposition, de
présentations et d’amorces
pour lancer la machine.
Épisode 2 Réalisé par
SAM LEVINSON NOTE : 5/5
Les choses sérieuses
débutent là, lorsque Levinson
signe la réalisation et où l’on
saisit que chaque prologue
sera une origin story en forme
de chef-d’œuvre miniature.
L’intro de l’épisode pilote, à
propos de Rue, n’était déjà
pas dégueu, celle du second
épisode, sur Nate, est
inoubliable. Elle fixe en tout
cas la singularité de la série :
proposer un pur shoot de mise
en scène tous les dimanches
soir à la télé.
Épisode 3 Réalisé par
SAM LEVINSON NOTE : 4/5
Le passé de Kat, ado en
surpoids et esseulée, brise
le cœur et annonce la couleur :
c’est le moment de tomber
amoureux des gamins qui
peuplent Euphoria. Jules chope
un rencard, il aura lieu dans
un endroit désert au beau
milieu de la nuit, Rue lui vole
alors un baiser avant de filer
chez son dealer tandis que Kat
découvre face à sa webcam
et un micropenis qu’elle peut
devenir un objet de désir. On
écrase une larme.
EUPHORIA – GUIDE DES ÉPISODES
Bex, la jeune trans et meilleure amie de l’héroïne d’As-
sassination Nation, qui se retrouvait prise en chasse par
la milice de footballeurs de Salem. Jules et Bex sont des
gamines qui essaient d’harmoniser leurs désirs et leurs
identités avec la réalité du lycée, mais sont évidemment
condamnées à échouer dans cette Amérique-là. L’une et
l’autre trouveront l’amour dans les bras d’un garçon qui
deviendra ensuite leur bourreau. Le diptyque que for-
ment Assassination Nation et Euphoria consiste ainsi
© EDDY CHEN - HOME BOX-OFFICE
Épisode 4 Réalisé par
SAM LEVINSON NOTE : 5/5
C’est soir de fête foraine, les
manèges rutilent, les tenues
des filles émoustillent, le chili
est servi piquant et la nuit va
être longue. Toutes les
sous-intrigues de la série
s’agglomèrent et prennent
leur envol ici au détour d’un
plan-séquence qui introduit
le grand épisode « concept »
de la saison. Pour le climax,
Levinson ressert tel quel
le fabuleux In my Dreams
d’Anohni qui concluait déjà
Assassination Nation.
FOCUS