Notre Temps N°597 – Septembre 2019

(Tuis.) #1
PHOTOS : PATRICK FOUQUE/PHOTO 12

CULTURE  Rencontre


Notre Temps Votre nouvel album s’intitule Paraître
ou ne pas être. Quel dilemme! L’avez-vous résolu?
Maxime Le Forestier J’ai cherché une réponse et je ne l’ai
pas trouvée. Si on ne fait que paraître, on devient une image,
mais si on ne veut plus paraître, dans ce métier, on finit par
disparaître. Il faut jouer sur les deux tableaux, en alternance.
Paraître et disparaître, c’est le propre des auteurs-compo-
siteurs-interprètes : il nous faut le temps de l’écriture et,
à un moment, ça chatouille et on revient. « Les chansons
sont faites pour être chantées », disait Brassens.


Vous évoquez souvent Georges Brassens,
quelle a été votre relation avec lui?
Il était mon maître. Lui a commencé par me traiter de con,
mais celui qui n’a pas été traité de con par Brassens ne l’a
jamais rencontré! C’était presque un mot d’amour de sa
part. Comme Bach pour le classique, Brassens est dans la
chanson française un ancrage, une référence. Chanter dans
son spectacle à Bobino, en 1972, a été pour moi la meilleure
école du monde. Quand il avait besoin d’un petit jeune à la
télévision, il faisait appel à moi, et j’avais aussi le privilège
d’être invité à déjeuner chez lui. Ma plus grande fierté est
d’avoir enregistré en live l’intégrale de son œuvre : 171 titres!
Une aventure que j’ai vécue à plein temps, en donnant
cinq cents concerts pendant quatre ans (NDLR : à travers
deux tournées en 1996-1998 et en 2005-2006).


Maxime L e Forestier

« Je suis paresseux


et rêveur! »


Quatre ans de silence s’achèvent avec la sortie de son dernier album,
paraître ou ne pas être, et une nouvelle tournée.
L’auteur-compositeur-interprète de san Francisco regarde le monde
droit dans les yeux, avec une sagesse qui fait du bien...
PETER DAVID

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Vos combats sont-ils aussi vifs qu’à vos débuts?
Aujourd’hui, j’essaie juste d’être utile. Je me suis rendu
compte que la révolte pour la révolte ne servait à rien. Vous
savez, à l’époque (NDLR : en 1972), Parachutiste n’était pas,
comme on l’a cru, une chanson destinée à semer la zizanie
dans l’armée... Moi qui avais eu la chance de me barrer,
je voulais seulement faire rire mes copains restés chez
les paras. Je fumais deux paquets de cigarettes par jour,
j’étais rebelle et insolent, alors me retrouver à faire dix kilo-
mètres de course par jour, ce n’était vraiment pas pour moi.

Que vous inspirent les combats menés
par les « gilets jaunes »?
Aux Restos du cœur, voilà plusieurs années qu’on nous
parlait des travailleurs pauvres. Les gens ont un boulot, un
salaire et pourtant ils peinent à survivre. Je me disais que
ça allait péter. Ce que ce combat est devenu est une autre
histoire... S’infiltrent des types pour qui la guérilla urbaine
est un sport du week-end. Ce qui me touche beaucoup, c’est
le besoin de ces gens de se retrouver aux carrefours pour
parler et partager, comme une sorte d’agora où renaît enfin
le dialogue. C’est très net en province.

Dans Avec une guitare, un de vos nouveaux titres,
vous chantez : « On va tout faire péter quand
on porte une guitare. » Est-ce une arme efficace?

98 • NOTRE TEMPS • Septembre 2019

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