Afrique Magazine N°395-396 – Août-Septembre 2019

(Marcin) #1
12 AFRIQUE MAGAZINE I 395-396 AOÛT-SEPTEMBRE 2019

ON EN PARLE


EN TAMASHEQ, amadjar veut dire
« l’étranger ». « Pas celui qui fait peur,
nous précise Eyadou, le bassiste de
Tinariwen, plutôt celui qui vient de
loin, mais qui nous ressemble. » C’est
également l’invité. Celui qui cherche
à être accueilli. Ici, il frappe à la
bonne porte. Comme à son habitude,
Tinariwen est prêt à tendre la main.
Né dans les années 1980 au nord
du Mali, le groupe est à large amplitude
et son line-up est changeant, même si
certains des membres sont plus présents
que d’autres, comme Ibrahim, Abdallah,
Eyadou ou encore Saïd. Ses meilleures
armes? La guitare, acoustique comme
électrique, la basse, les percussions... Le
tout accompagné d’un chant ancestral
et profond, en tamasheq, pétri de la
culture touarègue, « une culture où l’on
est ouvert sur l’autre », raconte Eyadou.
Et pourtant, elle est sans cesse
remise en question, voire mise en
danger par ceux qui ne comprennent
pas à quel point elle est précieuse. C’est
pour cela que Tinariwen tourne dans
le monde entier depuis vingt ans, quitte

à ce que ses membres portent en eux
le manque de leur foyer africain durant
de longs mois. Cet automne, le groupe
sera même au Hollywood Bowl de
Los Angeles, en première partie de
Vampire Weekend. Toutes les grandes
pointures du rock anglo-saxon, de
Robert Plant à Josh Homme, adorent
et soutiennent cette bande de virtuoses
enturbannés, collaborant avec eux
à la moindre occasion. Sur Amadjar
sont d’ailleurs intervenus le violoniste
Warren Ellis, éternel complice de Nick
Cave, Stephen O’Malley de Sunn O))),
le Français Rodolphe Burger, ainsi
que Micah Nelson, guitariste de Neil
Young et fils du légendaire chanteur
de country Willie Nelson.
Leur apport n’efface en rien
les vibrations désertiques de l’album,
qui a été imaginé en Mauritanie,
lors d’un voyage entre sable et mer.
L’enregistrement, lui, a eu lieu dans
un campement, sous une tente
près de Nouakchott, aux côtés de la
chanteuse griotte Noura Mint Seymali.
Du nostalgique « Tenere Maloulat »

à l’énergiede «Lalla», en passant
par le lancinant«Amalouna», serti
de chœurfémininet d’entrelacements
de cordesmagiques,les 13 pistes
d’Amadjartransportentl’auditeur
dans les territoirestouaregs,
défendus pardes artistesau cœur
pur. L’engagementest palpabledans
les textes deTinariwen,et ce depuis
le début : «C’estnotreraisond’êtreface
à la violenceenvironnante,commente
Eyadou, c’estnotrecarburant.C’est
ce qui faitque notremusiquese tient
depuis si longtemps.» Jusqu’àla fin
des temps,espérons-le.■S.R.

Tinariwen


Le blues


nomade


Avec son neuvième album baptisé Amadjar,
le GROUPE DE ROCK TOUAREG
nous emmène très loin, dans l’électrique
du désert et les rêves entre les dunes.
Un rythme face à la violence.

MUSIQUE


TINARIWEN,
Amadjar,
Wedge/PIAS.

DR
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