Investir, le Journal des Finances / N° 2377 / 27 juillet
18 / VALEURS MOYENNES
Innate Pharma
Un potentiel qui pourrait
être valorisé au Nasdaq
Innovation Incontournable dans le développement des
traitements d’immunothérapie contre le cancer, la biotech,
qui a su séduire un leader du secteur, s’est transformée.
Un portefeuille riche et diversifiéenimmuno-oncologie
Types de
traitements
Produits
En propriété
En partenariat
Lumoxiti
IPH
IPH
IPH
Monalizumab
Anti-Siglec-
IPH
IPH
NKP46...
Points de contrôle
immunitaire
Antigènes
tumoraux
Micro-
environnement
tumoral
Activer les cellules
immunitaires pour qu’elles
détruisent les tumeurs
Leucémie
Syndrome de Sézary
lymphomes
périphériques
Tumeurs foie, poumon
Cancer ORL, colorectal
Cancer non divulgué
Cancer
non divulgué
Cancer non divulgué
Cancers divers
Détruire les tumeurs en
recrutant des cellules
immunitaires effectives
Restaurer un environnement
immunitaire favorable en
limitant les effets
immunosuppresseurs
Indications Préclinique PhaseIPhase II Phase III
Sur
le marché
IPH
Astra-
Zeneca
5,
Mds$*
Sanofi 400 M€*
*Montant des paiements d’étape auxquels la société est éligible.
I
nnate Pharma a été délaissé
par les investisseurs depuis
le début de l’année (– 22 %).
Pourtant, la société mar-
seillaise, un acteur reconnu dans
l’immunothérapie contre les can-
cers, déroule une stratégie perti-
nente. Son niveau de trésorerie se
situe parmi le plus élevé des
biotechs cotées, son partenariat
avec le géant britannique Astra-
Zeneca valide sa technologie, sa
nouvelle composante commer-
ciale va générer des premières
ventes et sa valorisation est faible.
NOUVELLES APPROCHES
Aujourd’hui, deux tiers des
2.200 essais cliniques en oncolo-
gie se situent dans le domaine de
l’immunothérapie. Cette appro-
che révolutionnaire repose sur la
compréhension du mécanisme
d’échappement des cellules can-
céreuses à la vigilance du système
immunitaire.
Elle a donné naissance à une nou-
velle classe de produits, les inhibi-
teurs de points de contrôle
immunitaire (IPCI). Ils ciblent les
récepteurs qui bloquent les fonc-
tions antitumorales des cellules
tueuses, ce qui permet de rendre
la tumeur visible à ces dernières
qui peuvent alors agir.
Ce marché naissant est dominé
par les américains BMS et Merck,
avec leurs blockbusters Opdivo
pour le premier et Keytruda pour
le second, qui génèrent près de
7 milliards de dollars chacun, sui-
vis par AstraZeneca (Imfinzi) et
Roche (Tecentriq). L’heure est
aujourd’hui aux combinaisons
entre IPCI qui ciblent des récep-
teurs différents ou à l’association
d’autres approches d’immunothé-
rapie pour augmenter leur effica-
cité.
En effet, si certains malades peu-
vent arriver à des situations de
rémission pour des cancers jus-
qu’ici non traitables, les taux de
réponse à l’IPCI seul ne se situent
qu’entre 20 % et 50 %.
Innate Pharma s’est historique-
ment positionné sur cette classe
(IPCI) avec une expertise unique
sur les cellules de l’immunité
innée. Elle a récemment élargi son
champ d’action au microenviron-
nement tumoral et à l’interaction
entre cellules immunitaires et cel-
lules cancéreuses. « Cette diversifi-
cation entreprise depuis trois ans
sur plusieurs mécanismes d’action
du système immunitaire nous per-
met d’avoir un portefeuille moins
risqué et d’augmenter nos chances
de succès, sachant que les solutions
les plus efficaces viendront de com-
binaisons d’approche et non d’un
produit miracle », explique le prési-
dent, Mondher Mahjoubi, ancien
directeur de la division Oncologie
d’AstraZeneca.
Le portefeuille, qui s’est étoffé,
compte une dizaine de composés,
dont deux ont atteint la phase cli-
nique II.
La stratégie de R&D est claire : si le
produit peut être développé dans
plusieurs cancers à forte préva-
lence, la société nouera alors un
partenariat avec un grand acteur
de la pharmacie ; s’il s’avère qu’il
ne fonctionne que sur une indica-
tion de niche, elle sera chargée des
essais et assurera ensuite sa
commercialisation.
UN PORTEFEUILLE ÉTOFFÉ
Pour devenir un acteur de réfé-
rence des cancers rares, Innate a
ainsi acquis auprès d’AstraZeneca,
Lumoxiti, un traitement récem-
ment autorisé aux Etats-Unis
contre une leucémie rare (à try-
choleucocytes) au potentiel de
50 millions de ventes à moyen
terme. « Nous avons racheté
Lumoxiti dans le cadre de notre
transition vers une biotech intégrée.
L’objectif, en prenant en charge,
seuls, sa commercialisation outre-
Atlantique à partir de 2020, est de
bâtir, d’ici là, l’organisation de notre
présence aux Etats-Unis et de tisser
des liens avec la FDA, ce qui sera un
facteur clé de succès pour notre pro-
duit en développement dans le syn-
drome de Sézary (IPH4102) et pour
d’autres à venir », précise Mondher
Mahjoubi.
L’IPH4102, qui traite une forme
rare de lymphome cutané, est le
plus avancé du portefeuille
d’Innate, derrière son « porte-
drapeau », le monalizumab. Il a
obtenu une procédure accéléré de
la FDA (fast track) et a démarré sa
phase clinique II, qui s’achèvera
en 2021. Si les résultats sont bons,
il pourra être enregistré sans pas-
ser par la phase III.
UN ACCORD À 5,6 MILIARDS
DE DOLLARS DE POTENTIEL
Le monalizumab, un IPCI, a
séduit AstraZeneca qui a décidé,
en octobre 2018, sur la base de ses
résultats cliniques prometteurs
dans le cancer de la tête et du cou,
de prendre l’exclusivité des droits
sur le produit.
Le laboratoire en a profité pour
élargir son accord avec la biotech
à quatre composés en préclinique
et à prendre en licence un produit
en phase clinique I (IPH 5201).
En contrepartie, Innate est éligi-
ble à 5,6 milliards de dollars de
paiement d’étape (fonction des
avancées cliniques des produits)
du laboratoire et a déjà perçu des
premiers versements de 400 mil-
lions de dollars. Sa trésorerie, de
237 millions d’euros à fin mars, lui
offre une rare sécurité financière,
jusqu’en 2022.
Le monalizumab est aussi évalué
dans plusieurs tumeurs solides en
combinaison avec Imfinzi,
d’AstraZeneca.
Des résultats de phase II seront
dévoilés au second semestre. Ils
donneront lieu à un nouveau ver-
sement de 100 millions de dollars
si le produit réussit son passage en
phase III.
Le flux d’annonces va être dense
d’ici à la fin de l’année, avec, en
outre, des données de phase I
pour IPH5401 et la soumission du
dossier de Luxomiti en Europe.
Autre catalyseur potentiel pour le
titre : une introduction au Nasdaq
imminente.
La société, dont un tiers du capital
est détenu par AstraZeneca, Novo
Nordisk et la BPI, et 30 % par des
institutionnels européens, veut
faire entrer des grands fonds amé-
ricains spécialisés. Ce qui devrait
lui apporter une meilleure recon-
naissance boursière.
A titre d’exemple, l’américain Fate
Therapeutics, qui développe des
produits d’immuno-oncologie en
phase précoce, est valorisé
1,4 milliard de dollars, contre seu-
lement 367 millions d’euros pour
Innate.- ANNE BARLOUTAUD
NOTRE CONSEIL
l
ACHAT SPÉCULATIF : la
société est bien financée. Son
partenariat a un fort potentiel et la
valorisation est faible. De nom
breux catalyseurs sont attendus à
court terme. Objectif : 9 € (IPH).
Une situation financière très solide
(^20182019) (e) 2020 (e)
CHIFFRE D'AFFAIRES EN M€ 94 30 162
RÉSULTAT NET EN M€ 3 – 50 41
TRÉSORERIE EN M€ 202 125 158
REVENUS ISSUS DE LA COLLABORATION AVEC ASTRAZENECA
Pierre & Vacances
Toutes les cartes
en main pour sortir
d’un long hiver
A
près plusieurs essais
infructueux, le président-
fondateur de Pierre &
Vacances Center Parcs (PVCP),
Gérard Brémond, qui fêtera ses
82 ans après l’été, a eu la sagesse
de mettre son « bébé » entre les
mains d’un grand professionnel
du secteur.
C’est à Yann Caillère, 66 ans, qu’il
a confié la délicate mission de
redresser l’affaire. Son fils, Olivier,
à qui il avait remis les clés de
l’entreprise il y a moins d’un an,
est nommé directeur général
délégué du holding de la famille.
La passation des pouvoirs aura
lieu le 2 septembre.
UN GRAND NOM
DU TOURISME
Yann Caillère est une personna-
lité reconnue dans l’univers du
tourisme. En effet, après plu-
sieurs années passées à des postes
à responsabilités chez Pull-man
et Disneyland Resort Paris, il
devient président de Louvre
Hotels, avant de rejoindre Accor,
en 2006. Nommé directeur géné-
ral après le brutal limogeage de
Denis Hennequin, il n’en prendra
toutefois pas la tête. Le conseil
ayant choisi Sébastien Bazin, il
quittera la société en 2013 pour
une aventure espagnole. Ce
grand professionnel connaît bien
Gérard Brémond, puisqu’il a mis
sur les rails le partenariat Accor-
Adagio (une enseigne de PVCP).
Il va devoir arrêter l’hémorragie,
le groupe de loisirs n’étant plus
sorti du rouge depuis l’exercice
clos le 30 septembre 2012. Der-
nièrement, des éléments non
récurrents ont plombé les comp-
tes, mais PVCP a engagé depuis
deux ans une vaste restructura-
tion afin de réduire ses coûts.
Parallèlement, la division Tou-
risme a pris un virage plus haut de
gamme et a musclé son dévelop-
pement numérique. Internet a
bouleversé les habitudes des
vacanciers, devenus plus exi-
geants et surtout moins prévisi-
bles. Pierre & Vacances a dû se
mettre à la page. Dans la branche
Immobilier, des progrès ont aussi
été accomplis, afin d’améliorer la
rentabilité de ce pôle.
Une nouvelle feuille de route
ambitieuse sera forcément bien-
tôt présentée, et ce newsflow
devrait permettre au titre de
remonter la pente.
NOTRE CONSEIL
l
ACHETER : nous profitons de
l’effondrement du cours de
Bourse (– 60 % en trois ans) pour
repasser à l’achat sur l’action, qui
cote nettement sous l’actif net
(30 € par titre). Nous anticipons un
rebond plus franc des profits à
partir de l’exercice clos en septem
bre 2021. Le ratio cours/bénéfice
à cette échéance est de 8,2 fois,
après 31 fois en 2020.
Objectif : 19 € (VAC).
P ro c h a i n re n d e z vo u s : le
21 novembre, comptes annuels.
Pierre& Vacances
En €
10
20
30
40
50
2014 15 16 17 2019
16,
Le coup de cœur
LA VALEUR À DÉCOUVRIR
Eurobio Scientific
Croissance vertueuse
Cette petite société est devenue le leader en France de la
distribution de tests de diagnostics in vitro pour les labora
toires d’analyses médicales (Eurofins, Cerba...) et les hôpitaux.
Son activité de négoce de réactifs se répartissant entre le dia
gnostic des maladies infectieuses (test rapide du tétanos, de la
dengue, etc.), du cancer mais aussi de la transplantation, Eurobio
Scientific est solidement implanté dans la biologie moléculaire,
une technique de diagnostic très profitable qui croît plus rapide
ment que les autres activités. La montée en puissance des pro
duits propriétaires (18 % des facturations en 2018), plus
rentables, a aussi un effet positif sur les marges. L’année dernière,
Eurobio, qui vu ses ventes augmenter de 18 %, à 50,4 millions
d’euros, a ainsi réussi à afficher un bénéfice opérationnel de
1,6 million (contre un déficit de 3,7 millions en 2017). Le résultat
net a atteint l’équilibre, contre une perte de 10 millions un an plus
tôt. Il pourrait bien s’établir autour de 1,5 million en 2019. En effet,
la société a dévoilé un chiffre d’affaires de 29,5 millions au pre
mier semestre, toujours en hausse soutenue de 18 %. Elle profite
de nouveaux contrats de distribution avec des partenaires
comme l’américain Quidel (tests hospitaliers d’urgence, etc.) et de
nouveaux clients comme le numéro trois français des laboratoi
res d’analyses BiogroupLCD. La croissance devrait, en outre, être
dopée par des acquisitions à l’international. Eurobio a annoncé
en juin le rachat des sociétés britanniques Pathway Diagnostics
et Personal Diagnostics, qui génèrent 2 millions d’euros de chiffre
d’affaires (près de 4 % de ses ventes) et qui auront un impact
positif sur le bénéfice par action. De quoi réaliser l’objectif
annoncé en 2017 d’une augmentation de taille de 25 % en
trois ans, pour atteindre 60 millions de facturations en 2020
assorties d’une amélioration continue de la rentabilité. - A. B.
NOTRE CONSEIL
l
ACHETER : la dynamique de croissance devrait soutenir
une revalorisation du titre (– 35 % sur un an). Le groupe
se paie 0,9 fois son chiffre d’affaires, alors que les transactions
du secteur se réalisent sur une base de 2 à 3 fois.
Objectif : 4 € (ALERS).
CRITÈRES D’INVESTISSEMENT
COMPORTEMENT DE L’ACTION
lPERFORMANCE DU TITRE
COURS AU 25719 : 16,20 €
VARIATION 52 SEMAINES : 39,21 %
2019 : 1,25 %
lLIQUIDITÉ
VOL. QUOT. MOYEN ECHANGÉ : 19.
EXTRÊMES 52 S. : 32,20 € / 13,86 €
PERFORMANCE OPÉRATIONNELLE
lÉVOLUTION DE L’ACTIVITÉ
ÉVOL. MOYENNE (20162018) : 2 %
ÉVOL. 2019 : 5 %
lBNPA
ÉVOL. MOYENNE (20162018) : NS
ÉVOL. 2019 :
CONFIANCE DANS LA SOCIÉTÉ
lSOLIDITÉ DU BILAN
DETTE NETTE / FONDS PROPRES : 86 %
DERNIER ACTIF NET PAR ACTION : 30,21 €
lPART DU CAPITAL DÉTENUE PAR
FAMILLE : 49,8 %
AUTRE ACTIONNAIRE
AUTOCONTRÔLE : 2,7 %
INTÉRÊT BOURSIER
lRENDEMENT
DIVIDENDE 2019 ESTIMÉ :
RDT 2018 : NUL RDT 2019 : NUL
lVALORISATION ESTIMÉE
PER 2019 : NS
PER 2020 : 30,8 FOIS
Par Sylvie Aubert