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— Oui. C’est un petit coefficient. Les courants seront faibles. De
toute façon on s’appuiera au moteur si on n’a pas assez de vent.
— On pourrait accoster à Auray ce soir pour y passer la nuit et
revenir demain? proposa Claudine
— Les deux compères retrouvaient leur joie d’adolescents : Très
bonne idée.
En attendant l’heure du déjeuner, ils décidèrent d’aller préparer le
bateau.
Philippe avait un petit cotre breton baptisé « Gouelan ». C’était
un voilier en bois qu’il avait sauvé d’une vasière et méticuleusement
restauré. Il n’était pas rapide mais parfaitement adapté au golfe. Il
était équipé d’un moteur diesel puissant, chose indispensable pour se
jouer des mauvais tourbillons responsables de biens de « fortunes de
mer » sur les rochers.
Son skipper connaissait les lieux comme sa poche. Il n’avait pas
son pareil pour jouer avec les contre-courants et passer au raz des
cailloux.
Il avait connu Alain à l’école des Glénans, célèbre école de voile
où on apprenait à aimer et respecter la mer. Ils avaient 15 et 17 ans,
toute la vie et l’immensité de l’océan devant eux.
Les parents de Philippe avaient acheté cette maisonnette sur l’île
d’Arz et ceux d’Alain louaient toujours le même logis en août sur
l’île aux Moines. Ils passaient des jours entiers avec un marin qui les
amenait pêcher le Bar. Ils l’aidaient à relever les casiers.
Ils s’initiaient à la godille. Quand ils n’étaient pas sur l’eau ils étaient
à la plage.
A 15 ans Philippe eut son premier dériveur, un vieux 470 datant de
- Alain fut assigné au foc et au trapèze.
LE GOLFE
Malgré la brise marine qui venait avec la marée, il commençait
à faire chaud sur l’île d’Arz. Le printemps répandait sa lumière
généreuse sur le golfe du Morbihan. Philippe avait une maison sur ce
petit paradis accessible seulement par bateau.
Claudine son épouse avait préparé le petit déjeuner dans le jardin,
non sans avoir, au préalable, fait ses exercices de méditation comme
tous les matins. Elle était passionnée par le Bouddhisme et avait
contaminé sous mari à la grande surprise d’Alain qui voyait plutôt
son ami comme un bon vivant peu enclin au mysticisme.
L’estran proche exhalait son odeur iodée qui se mélangeait à celles
des jasmins et du pain grillé.
À peine assis, Philippe demanda :
— Que dirais-tu d’une balade à la voile, cet après-midi?
— Tu as regardé l’Almanach?
Alain, comme tous les voileux, évoquait l’Almanach du marin
Breton, la Bible pour tous les amoureux de la côte. On y trouvait les
horaires de marées, des dictons savoureux et bien d’autres choses sur
le monde maritime. Ici, chaque maison, chaque bateau possédait un
exemplaire de l’année en cours. Philippe avait gardé tous les numéros
depuis quinze ans.