Les Echos - 07.04.2020

(Axel Boer) #1

Les Echos Mardi 7 avril 2020 HIGH-TECH & MEDIAS// 23


Propos recueillis
par Florian Dèbes
@FL_Debes

« Le premier matin, j’étais Phil
Connors, le personnage joué
par Bill Murray dans le film “Un
Jour sans fin”. Sur Slack, la mes-
sagerie collaborative devenue
la colonne vertébrale de Faber-
novel et de ses 450 salariés, je
change de photos de profil tous
les jours depuis q ue je reste con-
finé à Paris. Ça fait trois semai-
nes et on commence à prendre
de nouvelles habitudes.
Ma journée commence par
un message adressé à tous les
salariés pour m’assurer que
tout va bien p our tout l e monde.
Notre métier consiste souvent à
faire voyager des gens pour
qu’ils se rencontrent. Là, ce n’est
plus possible sauf à réinventer
la façon de le faire. En visio,
principalement. J’insiste pour
que nous n’annulions rien.

« Faire autrement »
Passé les premiers moments
où chacun a géré ses situations
personnelles, les gens ont eu à
cœur de continuer à travailler.
Mais la troisième semaine me
faisait peur. C’est particulier de
travailler à distance avec les
personnes à leur poste tandis
que d’autres sont malades ou en
activité partielle. Il faut cher-
cher à faire tout ce qui était
prévu, mais autrement. Nous
tordons dans tous les sens les
outils technologiques comme
Zoom, Slack ou Hangouts pour
tenir toute sorte de réunion en
ligne. On “sort” de ces meetings
en se disant que c’é tait mieux
que ce que l’on pensait.
Tous les midis, un salarié
anime une conférence en ligne
ouverte à tous nos contacts et
clients. C’est une sorte de “lear-
ning expedition” en multiplex,
avec nos collaborateurs à
l’étranger. A chaque jour, un
sujet. Saviez-vous qu’à San
Francisco, des entreprises
nomment un responsable du
télétravail? De mon côté, j’ai
transformé tous mes déjeuners
en appels, à l’heure à laquelle ils
étaient prévus. Même si cela ne
dure qu’un quart d’heure, c’est
une façon de continuer.
Avec la société de gestion
Mirova, nous lançons une pla-
te-forme, baptisée “ReCOVery”,
sur laquelle les entreprises
pourront partager leurs bon-
nes pratiques pour l’économie
de l’après Covid-19. L’argent
consacré à sortir de l’épidémie
doit aussi traiter les problèmes
écologiques et d’égalité qui,
sans cela, risquent de continuer
à s’accroître.
La fin de journée arrive natu-
rellement. Nos vies personnel-
les et professionnelles n’ont
jamais été aussi mélangées.
Mais la vie familiale reprend le
dessus, pour beaucoup, quand
les enfants ont faim. Ce que
nous appelions “le futur du tra-
vail” est devenu notre présent.
C’est aussi leur futur. »n

« On


commence à


prendre des


habitudes »


CHRONIQUE
DU VIRUS
Stéphane
Distinguin

Stéphane Distinguin,
PDG de Fabernovel,
raconte comment
il travaille autant
que possible de la même
façon qu’avant
le confinement.

en première p artie de soirée
recueillent plus de 35 % de parts
de marché. Le principal « JT », le
« TG1 », rassemble 7,7 millions d ’Ita-
liens – soit 2,3 millions supplémen-
taires par rapport à l’an dernier.
La hausse est similaire pour le
public des journaux télévisés régio-
naux. Les programmes religieux
enregistrent également des audien-
ces inédites. Quelque 4,2 millions
de personnes ont suivi le 19 mars
dernier la récitation du rosaire sur
TV2000, la chaîne de l ’épiscopat ita-

lien. Elle a été regardée par 1,5 mil-
lion de personnes le 25 mars pour la
messe de 7 heures du matin et,
deux jours après, 11 millions d’Ita-
liens ont assisté devant leur écran à
la bénédiction urbi et orbi du pape
sur la place Saint-Pierre de Rome.

Doublement des visites
sur les plateformes
Autre « anomalie » du paysage
audiovisuel transalpin, le rajeunis-
sement du public avec une augmen-
tation de 80 % de la consommation

de programmes télévisés au cours
de la matinée pour les 25-64 ans
contraints de d emeurer à domicile –
un public qui regarde de plus en
plus la télévision sur Internet. Entre
le 8 et le 30 mars, les Italiens ont
visionné l’équivalent de 56 heures
de télévision sur la Toile. Quelque
900 millions de clics ont été recen-
sés sur les sites de la Rai, Mediaset,
LA7, Sky et Discovery. Les chaînes
privées ou d’information en continu
profitent également de cette ten-
dance, en particulier Sky TG24 et

Rai News 24 qui ont vu bondir leur
audience de 100 % et enregistrent
un doublement des visites sur leur
plateforme Internet sur un an.
Mais la saturation n’est pas loin.
La société Barometro constate, dans
une étude, une inflexion cette der-
nière semaine de l’audience des
émissions consacrées au corona-
virus et une hausse de celle des films
et des séries : « Les journalistes ont
trop souvent privilégié une narration
sans espoir avec des tons parfois apo-
calyptiques », constate l’étude.n

Les Italiens de plus en plus accros à la télévision


Basile Dekonink
@BDekonink

L’attestation numérique de dépla-
cement est enfin disponible. Au
21 e jour de confinement, le minis-
tère de l’Intérieur a mis en ligne le

questionnaire permettant de rem-
plir le document sur smartphone,
tablette et ordinateur. Autant de
supports qui peuvent désormais
servir aussi à présenter un justifica-
tif pour ses sorties. Plus besoin de
l’attestation papier pour justifier ses

déplacements personnels ou pro-
fessionnels, donc, même si ce sup-
port reste tout à fait valable. L a solu-
tion numérique avait été un temps
tolérée, avant d’être interdite par le
ministère de l’Intérieur en raison d e
la multiplication de générateurs
d’attestation proposés par des déve-
loppeurs tiers et susceptibles
d’aspirer les données personnelles
des internautes.
Jeudi, le ministre de l’Intérieur,
Christophe Castaner, a finalement
annoncé le lancement d’une ver-
sion numérique officielle « afin de
donner [aux Français] un peu de
souplesse avec cet outil ».
Pour télécharger l’attestation, le
générateur – disponible unique-
ment sur les sites du ministère de
l’Intérieur ou du gouvernement –
demande de remplir en ligne les
mêmes informations que pour la
version papier : nom, prénom, date
et lieu de naissance, adresse du
domicile. Il est ensuite nécessaire
de choisir le motif du déplacement,
comme avec l’attestation papier.
A noter que les utilisateurs peu-
vent cocher plusieurs cases simul-
tanément (faire de l’exercice
physique et faire ses courses, par
exemple) puisque le gouverne-
ment a précisé qu’il était possible
de regrouper ses déplacements.
« Il faudra préciser votre heure de
sortie, mais l’heure à laquelle vous

avez édité le document sera accessible
aux policiers. Cela é vitera que des per-
sonnes remplissent l’attestation uni-
quement à la vue d’un contrôle de
police », a par ailleurs précisé
Christophe Castaner.

Pas de collecte des données
personnelles
Une fois ces informations rensei-
gnées, l’attestation peut être télé-
chargée au format PDF. Elle dispose
d’un QR Code qui permettra aux for-
ces de l’ordre de le scanner depuis
leurs smartphone ou tablette et de
consulter les informations en limi-
tant les contacts physiques.
En ce qui concerne les données
personnelles, « il n’y aura pas de
fichier. Personne ne pourra collecter
les données des usagers », a assuré
Christophe Castaner. « Ces données
personnelles sont exclusivement stoc-
kées dans le terminal (ordinateur,
tablette, smartphone) utilisé pour
générer l’attestation », complètent
les conditions d’utilisation du site.
Un fonctionnement en local qui
n’envoie aucune donnée sur les
serveurs du ministère de l ’Intérieur.
Le dispositif, qui permet d’écono-
miser du papier et simplifie les
démarches des Français qui ne pos-
sèdent pas d’imprimantes, peut
donc être utilisé sans crainte. Reste
simplement à ne pas tomber en
panne de batterie.n

Comment fonctionne l’attestation numérique de déplacement


Promise depuis plusieurs
semaines, l’attestation de
déplacement est disponible
depuis lundi sur smart-
phone, tablette et ordina-
teur. Elle s’ajoute à l’attesta-
tion papier, qui reste valable.


«Dans notreprécédente publication du 26 mars
Décision de l’Autorité de la concurrence n°19-D-24
du 17 décembre 2019 relativeàdes pratiques mises en œuvre
dans le secteur des fruits vendus en coupelles et en gourdes,
manquaient les termes ci-après :

Au total, l’Autoritéainfligé les sanctions pécuniaires suivantes :


Entreprises Sanction finale arrondie


Materne 13 585 000€
Andros 14 106 000€
Conserves France 1967 000€
Délis SA 9466 000€
Charles Faraud et Charles&Alice 16 358 000€
Valade 2801 000€

Coroos 0 €


Le texte intégral de la décision de l’Autorité de la concurrence est
accessible sur le site http://www.autoritedelaconcurrence.fr ».

PUBLICATION JUDICIAIRE


Olivier Tosseri
@OlivierTosseri


Si le cinéma italien vit sa pire année
avec des pertes évaluées à 3 millions
d’euros par semaine pour les salles
obscures, la télévision au moins
fédère des audiences de plus en plus
larges, même si la publicité ne suit
pas forcément. En temps normal,
les Italiens sont de grands amateurs
de ses programmes. En période de
confinement, qui dure depuis près
d’un mois dans la péninsule, ils pas-
sent presque toute leur journée rivés
sur le petit écran. Près de 6 heures
(4 h 30 pour la France) avec 18 mil-
lions de téléspectateurs d ans la jour-
née et 30 millions en première soi-
rée. C’est une 1 h 13 de plus et près de
4 millions de personnes supplé-
mentaires comparé à fin février-dé-
but mars. C’est ce que révèle l’étude
« La télévision au temps du corona-
virus » du centre Frasi, qui analyse
les médias et les réseaux sociaux.


Des audiences inédites
Les programmes télévisés sont
dans l eur écrasante majorité consa-
crés à l’épidémie de coronavirus
et à des approfondissements sur
la crise sanitaire et économique.
Sur un an, l’offre d’information a
augmenté en mars de 8.000 minu-
tes avec une audience pour ce type
de programme qui a triplé, passant
en moyenne de 557.000 téléspecta-
teurs à 1,7 million. La principale
bénéficiaire est le service public
avec la Rai, qui accumule les
records. En moyenne, ses journaux
télévisés (JT) puis ses émissions


Le confinement a fait
augmenter de plus
d’une heure le temps
quotidien passé devant
le petit écran, à 6 heures au
total. Le public a été rajeuni,
les émissions d’informations
et même religieuses ont été
privilégiées. Mais la satura-
tion sur les programmes liés
à l’épidémie est proche.


4


MILLIONS
Le nombre de téléspectateurs
supplémentaires en Italie
comparé à fin février-début mars.


La chaîne Rai est la principale bénéficiaire du confinement en Italie. Photo Miguel Medina/AFP

Edition :
23.000 titres
non publiés

Le coronavirus est en train
de faire une nouvelle
victime : le monde
italien de l’édition.
Selon l’Associazione
Italiana Editori (AIE),
98 % des maisons d’édition
de la péninsule estiment
que la crise provoque des
dommages « significatifs
ou dramatiques sur
l’intégralité de la filière ».
Cette année, 23.000 titres
ne seront pas publiés,
soit 30 % de l’entière
production éditoriale
transalpine. Cela signifie
que 49 millions de copies
ne seront pas imprimées
en 2020. Le secteur
demande le soutien
du gouvernement.
Quelque 64 % des maisons
d’édition déclarent avoir
déjà placé leurs salariés
en chômage partiel
ou être sur le point
de le faire. Concernant
les éditeurs indépendants,
qui représentent 46,5 %
du marché, le mois
de mars s’est achevé
avec un effondrement
de 68 % de leur chiffre
d’affaires, soit l’équivalent
de 60 millions d’euros.
Le nombre de titres
diminuera de 10.000
cette année et le nombre
de copies imprimées
baissera de 20 %.
Un retour à la normale
n’est envisagé qu’au mois
de septembre.
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