Les Echos - 03.04.2020

(Chris Devlin) #1

20 // ENTREPRISES Vendredi 3 et samedi 4 avril 2020 Les Echos


CORONAVIRUS


Christophe Palierse
@cpalierse


Des vacances de Pâques inédites
dans la France du coronavirus...
« Avec le confinement, la notion de
vacances disparaît », a résumé,
mardi, l e secrétaire d’Etat e n charge
du Tourisme, Jean-Baptiste
Lemoyne. Et il est d’autant moins
question de laisser aller et venir les
touristes que le ministre de l’Inté-
rieur, Christophe Castaner, a pré-
venu le lendemain que les contrôles
« seront renforcés ».
Pour les professionnels du tou-
risme, les conséquences sont loin


d’être anecdotiques. Analysant de
longue date le secteur, l’expert Guy
Raffour, dirigeant du cabinet d’étu-
des Raffour Interactif, rappelle que
25 % des Français qui sont partis en
vacances en 2018, pour des séjours
marchands ou non marchands
(les vacances chez papy et mamy,
par exemple) l’ont fait à Pâques


  • soit 8,7 millions d e personnes. « Ce
    n’est pas rien! C’est la troisième
    période la plus prise après l’été et le
    “hors vacances scolaires” », souligne
    Guy Raffour.
    Pour les stations de ski, q ui ont dû
    brutalement fermer le 15 mars,
    l’heure est traditionnellement à la
    fin de saison. Certaines d’entre elles
    peuvent étirer les descentes jusqu’à
    début mai, selon l’enneigement.
    Plus de 100 stations de ski étaient
    toujours ouvertes début avril 2019,
    et les vacances de printemps
    avaient représenté 5 % de la fré-
    quentation de l’ensemble de la sai-
    son d’hiver 2018-2019, selon l’orga-


nisation Domaines skiables de
France. Dans les campings, l’heure
est en revanche au démarrage. En
temps normal, un peu plus de
4.000 établissements sur 7.90 0
dans l’Hexagone à cette période de
l’année, qui pèse entre 5 et 7 mil-
lions de nuitées sur un cumul
annuel de 125 millions, rappelle le
président de la Fédération natio-
nale de l’hôtellerie de plein air
(FNHPA), Nicolas Dayot.

« Enjeu limité en chiffre
d’affaires »
Ce dernier souligne toutefois que
« les prix ne sont pas élevés » à
Pâques, d ’o ù un enjeu limité en chif-
fre d’affaires. « Pour l’hôtellerie de
plein air, plus que jamais, on misera
tout sur juillet-août. Et peut-être sur
septembre-octobre aussi en faisant
les prolongations », prévient le pré-
sident de la FNHPA. Côté clubs et
résidences de vacances, la période
n’est pas non plus cruciale. « Les

vacances de printemps représentent
de 7 à 8 % de notre chiffre d’affaires
annuel », indique le patron de
Belambra, Frédéric Le Guen, qui a
connu une fin d e saison d ’hiver bru-
tal. « Entre la mi-mars, avril, et mai,
c’est déjà 20 % du chiffre d’affaires
annuel qui est perdu à l’année »,
déplore-t-il. De son côté, Groupe
Pierre & Vacances-Center Parcs, le
numéro un européen des résiden-
ces de loisirs, réalise e nviron 10 % de
son chiffre d’affaires annuel héber-
gement lors des vacances de
Pâques.
Chez, les tour-opérateurs fran-
çais, les vacances de Pâques repré-
sentent, bon an mal an, un peu plus
de 6 % du trafic pour les voyages à
forfait, activité plutôt équilibrée
entre les destinations moyen-cour-
riers, long-courrier, mais aussi la...
France. Enfin, les vacances de
Pâques correspondent aussi au
début de saison pour la plupart des
parcs de loisirs ou animaliers.n

La filière touristique fait une croix


sur les congés de Pâques


Pour les acteurs du
tourisme français, Pâques
n’est pas la période la plus
sensible. Mais les vacances
de printemps constituent
tout de même la troisième
période de départs, selon le
cabinet Raffour Interactif.


Avec la prolongation des mesures de confinement et l’interdiction des voyages d’agrément, la SNCF a enregistré des annulations
de réservations en cascade ces derniers jours. Phot o Philippe Lopez/AFP

po ur les mois à venir, lorsque le
confinement aura pris fin. « Tous
nos vacanciers ont reçu un mes-
sage pour gérer leur annulation
jusqu’au 30 avril. Personne ne
va partir pour les vacances de
Pâques », confirme-t-on chez
Abritel. L’entreprise précise
qu’elle relaye sur son site « les
recommandations et restrictions
imposées » par l’exécutif et que
« les propriétaires sont invités à
bloquer temporairement leur
calendrier pour les périodes pen-
dant lesquelles les déplacements
sont restreints ».

Appel au respect
des règles
Airbnb i ndique aussi qu’il
« encourage tous ses utilisateurs à
respecter les règles édictées par le
gouvernement ». Il rappelle avoir
organisé la mise à disposition de
logements pour les personnels
soignants qui ont besoin de se
rapprocher des hôpitaux dans
lesquels ils travaillent. Quant à
savoir si une activité résiduelle
persiste pour d’autres motifs, la
plateforme reste discrète.n

Le ministre de l’Intérieur a pré-
venu : les plateformes de location
d’hébergements touristiques
entre particuliers s eront sous s ur-
veillance pendant ces vacances de
Pâques. « J’ai demandé dès ce
mardi soir aux préfets des zones
touristiques de vérifier les niveaux
de location et d’occupation des Air-
bnb et autres offres locatives », a
indiqué Christophe Castaner
mercredi sur LCI.
En théorie, ces plateformes ne
sont pas soumises à une interdic-
tion de fonctionner, ce que rap-
pelle d’ailleurs l’Union nationale
pour la promotion de la location
de vacances (UNPLV), qui ras-
semble les acteurs du secteur.
Mais pour l’exécutif, il n’est pas
question que des Français les uti-
lisent pour aller se mettre au vert
au mépris des consignes de confi-
nement, et au risque de propa-
ger le Covid-19. La vigilance est
donc de mise.

Réservations
pour les mois à venir
Les entreprises concernées ne
sont pas particulièrement inquiè-
tes. Pour l’heure, si leurs s ites con-
tinuent de fonctionner, c’est
essentiellement pour « accompa-
gner les utilisateurs dont la priorité
est d’annuler ou de reporter les
séjours à venir, dans le respect des
recommandations des autorités »,
indique l’UNPLV. Il s’agit aussi
d’enregistrer les réservations

Le ministre de l’Intérieur
a demandé aux préfets des
zones touristiques de
surveiller les niveaux
d’occupation « des Airbnb
et autres offres locatives ».
Rappelant que les
vacances de Pâques sont
placées sous le signe
du confinement.

Les plateformes


de type Airbnb


sous surveillance


ser le nombre de policiers et de
gendarmes qui sera déployé.
Pas question, donc, d’espérer
prendre sa voiture pour se rendre
ni vu ni connu dans une maison de
campagne e n Normandie ou
ailleurs... En cas de non-respect du
confinement, l’automobiliste con-
trôlé écopera d’une amende et sera
sommé de rentrer chez lui. Pour
mémoire, le montant prévu de
l’amende est de 135 euros pour la
première infraction de violation
du confinement et peut être porté à
200 euros en cas de réitération
dans les quinze jours. A la troi-
sième infraction constatée, elle
s’envole à 3.750 euros.

Seulement 7 % de TGV
et d’Intercités
Ce contexte sanitaire va entraîner
un lourd manque à gagner pour les
entreprises de transport, à com-
mencer par les sociétés d’autorou-
tes. Sanef a observé « une forte
chute du trafic automobile » ces
derniers jours et constate que les
Français ont respecté le confine-
ment. Mais qu’en sera-t-il durant
les vacances? Les aires d’autorou-
tes seront de toute façon ouvertes,
au cas où, et pour accueillir les r ou-
tiers qui, eux, continuent de circu-
ler. Vinci Autoroutes n e fournit pas
davantage de précisions. Les der-
niers chiffres communiqués par
l’entreprise faisaient état d’une
baisse de près de 20 % du trafic
pour les véhicules légers sur la
période du 1 er au 20 mars.
A la SNCF, les annulations de
réservations (rendues gratuites jus-
qu’à la dernière minute) sont tom-
bées en cascade ces derniers jours.
L’entreprise ferroviaire prévoit de
n’assurer ce week-end que 7 % du
trafic habituel pour ses trains gran-
des lignes – TGV inOui et Intercités,
tandis que la circulation des Ouigo
est suspendue depuis le 27 mars.
Une quarantaine de TGV seule-
ment circulera quotidiennement,
contre 700 en moyenne en temps
normal. « Ce sont d es vacances c onfi-
nées, il n’est pas question de prendre

ment. « Il nous est impossible de
nous projeter sur une date de
reprise, mais en tout cas, pour les
vacances de Pâques, c’est cuit! » se
désole-t-on.
Chez BlaBlaBus aussi, tout est à
l’arrêt. La plateforme de covoitu-
rage BlaBlaCar, elle, reste ouverte
pour les trajets domicile-travail,
mais « l’activité est quasiment
nulle », constate un porte-parole.
« Nous sommes en hibernation. »
Les conséquences financières
seront tout de même plus limitées
que pour d’autres entreprises du
transport. « BlaBlaCar a très peu de
coûts fixes : nous ne possédons pas
de voitures, nous n’employons pas
de conducteurs. S’agissant de Bla-
BlaBus, nous fonctionnons avec des
autocaristes partenaires. C’est pour
eux que nous sommes le plus
inquiets », poursuit-il. Tout le sec-
teur attend désormais avec impa-
tience le retour à la normale. Il
semble cependant lointain.n

lAlors que les vacances scolaires


de Pâques démarrent ce vendredi soir


dans l’Hexagone, les Français


sont sommés de rester chez eux.


lEn conséquence, les autoroutes


comme les gares seront


quasi désertées ce week-end.


Les vacances en mode confiné vont entraîner


un lourd manque à gagner pour les transports


Elsa Dicharry
@dicharry_e


C’es t une situation inédite. A la
veille des vacances scolaires de
Pâques, qui commencent ce ven-
dredi soir pour la zone C (acadé-
mies de Paris, Versailles, Créteil,
Toulouse et Montpellier), Bison
Futé prévoit un trafic parfaitement
fluide sur l’ensemble des routes de
France et durant tout le week-end.
Aucun bouchon n’est attendu, que
ce soit à la sortie de l’aggloméra-
tion parisienne, en direction du
sud de la France, des plages de
l’Atlantique ou des stations de
montagne. Les gares seront elles
aussi désertées, sans parler des
aéroports – celui d’Orly ayant
même fermé ses portes mardi.
Il faut dire que vacances ou non,
le mot d’ordre des autorités reste le
même : « Restez chez-vous ».
Durant toute la durée du confine-
ment, pour l’instant reconduit jus-
qu’au 15 avril au minimum (avec
des scénarios de sortie différents
envisagés selon les régions et les
classes d’âge), les voyages d’agré-
ments sont interdits, et le gouver-
nement entend bien faire respec-
ter cette règle afin d’éviter une
propagation du Covid-19. « Très
concrètement, on ne part pas en
vacances pendant la période de con-
finement [...]. Tout abus sera sanc-
tionné », a averti dès mercredi le
ministre de l’Intérieur, Christophe
Castaner, sur LCI.


Contrôles renforcés
« Le confinement ne permet pas de
changer de lieu, sauf raisons fami-
liales impérieuses, par exemple, tel-
les que la garde des enfants », rap-
pellent ses services. Les contrôles
des forces de l’ordre seront renfor-
cés dans les jours à venir « notam-
ment sur les axes routiers et dans les
gares, comme cela a pu être le cas
lors du premier week-end de confi-
nement », ajoutent-ils, sans préci-


TRANSPORT


le train », résume une porte-parole
de l’entreprise. Le coup est rude
pour la SNCF, qui a déjà dû faire
face, en décembre et janvier der-
niers, à la grève la plus longue de
son histoire. Et avait prévu, à la suite
du mouvement social contre la
réforme des retraites, un plan de
reconquête de ses usagers. Avec la
vente d’un nombre inédit d e billets à
petits prix, notamment pour avril...

Du côté des autocaristes longue
distance, l’activité est carrément à
zéro. Chez Flixbus, par exemple,
toutes les lignes sont fermées
depuis le 17 mars, jour de parution
du décret instaurant le confine-

Du côté des
autocaristes longue
distance, l’activité
est carrément à zéro.

« Tous nos
vacanciers ont
reçu un message
pour gérer
leur annulation
jusqu’au 30 avril.
Personne ne
va partir pour
les vacances
de Pâques. »
ABRITEL
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