Le Monde - 18.03.2020

(Nancy Kaufman) #1
0123
MERCREDI 18 MARS 2020
styles

| 17


extension


du domaine


de malus


Toit ouvrant,


jantes ajourées...


désormais,


ces équipements,


influant sur le poids


et le coefficient de


pénétration dans


l’air de la voiture,


alourdissent


aussi son malus


écologique


AUTOMOBILE


D


epuis le 1er mars, une
petite révolution est à
l’œuvre dans l’auto­
mobile. Le calcul du
malus écologique se fonde doré­
navant sur une mesure des rejets
de CO 2 au kilomètre proche de la
réalité. Surtout, cette procédure
beaucoup plus sophistiquée indi­
vidualise les émissions d’une voi­
ture en prenant en compte tous
les équipements susceptibles de
l’alourdir ou de modifier son aé­
rodynamique.
Avant cette nouvelle norme,
dite WLTP, le calcul du malus dé­
pendait du modèle et de sa moto­
risation. Désormais, la version de
base sert de référence et tout ce
qui pourra influer sur la masse et
le coefficient de pénétration dans
l’air est pris en compte. En prati­
que, cela signifie qu’il faut y regar­
der à deux fois et remplir son bon
de commande après s’être lon­
guement immergé dans l’univers
des configurateurs pas toujours
d’une parfaite fluidité mis en
place par les marques.
Installer un crochet d’attelage ré­
tractable ou un siège conducteur
électrique à bord d’une Volkswa­
gen Golf se traduira par l’attribu­
tion de 1 gramme de CO 2 supplé­
mentaire au kilomètre. Chez Ford,
agrémenter la nouvelle Puma de
pneus hiver coûte 1 gramme de
CO 2. Le tarif est de 2 grammes
pour des pneus toutes saisons qui
offrent davantage de résistance au
roulement. Les barres de toit ou
les hayons à ouverture électrique
sont aussi dans le collimateur. La
présence d’une roue de secours
(30 kg) peut également dégrader le
bilan carbone, de même que le
style des jantes. Moins aérodyna­
miques, celles qui sont très ajou­
rées sont pénalisées.
L’un des effets collatéraux de
cette stricte comptabilité pourrait
bien être de modérer l’engoue­

ment des consommateurs pour
les transmissions automatiques,
plus gourmandes en carburant
que les boîtes manuelles en rai­
son de leur mode de fonctionne­
ment et leur poids. Une Ford
Fiesta équipée d’une boîte à con­
vertisseur de couple impose un
grammage en CO 2 en hausse de
36 grammes, alors qu’une Re­
nault Mégane, dotée d’une trans­
mission à double embrayage plus
moderne, subira un supplément
de 6 à 10 grammes, ce qui n’est pas
rien. Chez Dacia, inutile de cher­
cher une boîte automatique sur la
gamme Duster, déjà aux prises
avec des niveaux de CO 2 qui se
rapprochent dangereusement du
seuil fatidique.
La note se corse tout particuliè­
rement pour les modèles pre­
mium dont la clientèle était habi­
tuée à ne pas lésiner sur les op­
tions. Une BMW 318i (essence,
144 g/km) ne dégradera son bilan
CO 2 que de 1 petit gramme en
s’équipant de jantes de 18 pouces,
mais de 5 grammes si son acqué­
reur choisit des pneumatiques
« Runflat », avec lesquels on peut
rouler à faible vitesse malgré une
crevaison. L’ajout d’un simple toit

ouvrant ne modifie rien, mais un
toit panoramique en verre, en re­
vanche, générera 1 gramme sup­
plémentaire. Au bout du compte,
la note sera d’autant plus corsée
que le malus, qui se déclenche à
partir de 138 g/km et débute à
50 euros, ne progresse pas de ma­
nière linéaire. La note s’alourdit de
25 euros par gramme de CO 2 sup­
plémentaire jusqu’à 151 g, mais en­
suite tout s’accélère : 30 euros de
plus pour passer de 151 g à 152 g (de
330 euros à 360 euros), 40 euros
de 152 g à 153 g et ainsi de suite. A
155 g, le barème inflige une péna­
lité de 540 euros.

L’option électrique
Cette logique a été intégrée par les
constructeurs dans la définition
de certaines gammes. Ainsi, la
dernière génération de la Clio a
été développée sans toit ouvrant.
« Les consommateurs ont compris
que le choix de la motorisation
mais aussi le genre de carrosserie
déterminent les émissions d’une
voiture. Maintenant, il va falloir
bien leur expliquer que le type de
jante ou la présence de barres de
toit exerce aussi un réel impact sur
le barème », souligne Pierre Truss,

ailleurs, un mécanisme destiné
aux familles nombreuses (trois
enfants et plus) donne droit à une
ristourne de 20 g/km par enfant à
charge, à condition qu’il s’agisse
d’un véhicule immatriculé pour
la première fois.
« Les acheteurs redoutent les ef­
fets de seuil, mais les construc­
teurs, eux, composent leur addi­
tion au gramme près, car la moin­
dre once de CO 2 est comptabilisée
dans le calcul de l’objectif assigné
depuis cette année par les autori­
tés européennes », insiste un por­
te­parole de Ford. D’où l’appari­
tion d’un dilemme. Vendre des
équipements en option, c’est ar­
rondir ses revenus, mais c’est
aussi s’exposer davantage aux sé­
vères amendes.
Pour la gamme Renault, un dé­
passement d’un gramme de CO 2
au kilomètre par rapport à la
moyenne imposée se traduirait
par une pénalité de 150 millions
d’euros. Dans ces conditions, la
priorité des mois qui viennent ne
fait pas de doute. « L’objectif, c’est
qu’un maximum de clients passent
à l’hybride ou à l’électrique », ré­
sume Pierre Truss.
jean­michel normand

UN MÉCANISME 


DESTINÉ AUX FAMILLES 


NOMBREUSES (TROIS 


ENFANTS ET PLUS) DONNE 


DROIT À UNE RISTOURNE 


DE 20 G/KM PAR ENFANT 


À CHARGE, À CONDITION 


QU’IL S’AGISSE D’UN 


VÉHICULE IMMATRICULÉ 


POUR LA PREMIÈRE FOIS


Hyundai i10, la gardienne du temple (thermique)


En ces temps de montée en puissance des modèles zéro émission, cette coréenne de poche n’aura pas de version électrique


C


e n’est pas parce que le
segment des petites voi­
tures thermiques est ap­
pelé à disparaître qu’il faut perdre
de sa bonne humeur. La nouvelle
Hyundai i10, restylée avec l’évi­
dent souci de plaire, n’a rien
perdu de son côté avenant. Bien
au contraire.
Cette coréenne de poche
(3,66 m) pour laquelle aucune va­
riante électrique n’a été envisagée,
contrairement à ses concurrentes
Renault Twingo, Volkswagen Up!
ou Fiat 500, se pose comme la gar­
dienne d’un temple dont la fré­
quentation est en berne. N’en dé­
plaise à son bilan carbone – certes
suffisamment modeste pour la
mettre à l’abri d’un malus écologi­
que, au moins à court terme –, elle
compte continuer à servir une
clientèle, largement féminine et
citadine, où figurent nombre de
professions libérales et d’infir­
mières à domicile.
Produite en Turquie et diffusée
en Inde comme en Europe, la i
joue une petite musique qui ras­
surera ceux qui se sont mis en
quête d’une jolie petite automo­
bile polyvalente. Pas de design mi­

nimaliste ou de formes épurées
mais des découpes franches et soi­
gnées, des croisements de lignes
qui donnent du relief sans verser
dans un style torturé. Les versions
les mieux dotées ont droit à une
présentation bicolore, avec un toit
noir. Pour faire « vraie » voiture, le
capot apparaît relativement proé­

minent et la longueur totale
(3,67 m, soit cinq centimètres de
plus qu’une Twingo) s’inscrit dans
la moyenne haute du segment.
Comme la contenance de son cof­
fre (252 litres), agrémenté d’un
double fond plutôt pratique.
Cette voiture est disponible en
deux motorisations (trois ou qua­

tre cylindres pour 67 ou 84 ch)
mais c’est la première, plus mo­
derne, moins gourmande, assez
sonore mais souple et volontaire
qui assurera le plus clair des ven­
tes. La boîte de vitesses manuelle
est agréable mais les aficionados
de la transmission automatique
pourront compter sur une boîte

automatisée. Suspendue correc­
tement, la Hyundai est un régal
en ville grâce à sa vivacité et à son
rayon de braquage. Sur route, en
revanche, il faudra faire avec le
manque de discrétion de la méca­
nique et une position de conduite
un tantinet contraignante car le
volant ne se règle qu’en hauteur
et les sièges sont un peu durs.

Un détecteur de fatigue
Pimpante à l’extérieur, avec un
choix de couleurs flashy, la i10 n’a
pas déployé dans son habitacle
une opération de charme de la
même envergure. Pour des rai­
sons de coût mais aussi parce que,
comme la plupart des marques
asiatiques, le Coréen Hyundai n’a
pas encore fait de l’agencement
intérieur de ses véhicules une
priorité.
L’habitacle, assez bien conçu
sans être un modèle d’ergono­
mie, présente une planche de
bord très horizontale qui n’est
toutefois pas un modèle de
gaieté. A l’arrière, les deux places
(ou trois, à l’extrême rigueur) ont
le mérite d’exister mais l’habita­
bilité reste comptée.

Hyundai, qui lance la troisième
génération d’une saga qui s’est
écoulée depuis dix ans à 45 000
unités en France, connaît la musi­
que. Même s’il a acquis des lettres
de noblesse, le constructeur sait
qu’il doit compenser son manque
de notoriété en soignant sa dota­
tion. Une partie qui, désormais,
se déroule sur le terrain des assis­
tances à la conduite.
En série, l’i10 a donc été pourvue
du freinage d’urgence automati­
que, de l’assistance au maintien
de voie et d’un détecteur de fati­
gue. Délicate attention : sur notre
modèle d’essai, un petit signal so­
nore venait vous sortir de vos pen­
sées pour signaler que la voiture
qui précède vient de démarrer.
Les finitions hautes ont droit à
un large écran de 8 pouces sur le­
quel il faudra connecter son
smartphone pour utiliser un GPS.
Des équipements pour lesquels la
marque coréenne n’hésite plus à
présenter l’addition. Facturée de
11 990 à 16 300 euros, la Hyundai
i10 est l’un des modèles les mieux
équipés de sa catégorie mais pas
le moins cher.
j.­m. n.

Une Peugeot 404 de 1969. ULLSTEIN BILD/ROGGE

La ligne de
l’i10 est
franche et
soignée.
HYUNDAI

qui supervise ces questions au
sein du groupe Renault.
Ce nœud coulant fiscal participe
d’une banalisation du malus. La
réforme de ce dispositif, qui peut
infliger une pénalité allant jus­
qu’à 20 000 euros et concernait
35 % des voitures neuves en fé­
vrier, fait plus de perdants que de
gagnants. Au 1er mars, une Citroën
C5 Aircross essence en version
180 ch est taxée d’une pénalité de
650 à 2 049 euros, alors qu’une
Peugeot 508 diesel de même puis­
sance passe de 360 à 330 euros.
Une différence de traitement qu’il
ne faut pas généraliser, mais qui
met en relief la légère schizophré­
nie d’une réglementation trop ex­
clusivement basée sur les émis­
sions de CO 2 , terrain favorable au
diesel, alors qu’elle affiche la vo­
lonté de faire reculer la diffusion
de ce carburant.
En revanche, l’acheteur d’une
voiture électrique qui, par défini­
tion, ne dégage pas directement
de CO 2 , ou d’une hybride (une ver­
sion rechargeable émet souvent
moins de 50 g/km), aura moins à
redouter les foudres du malus au
moment de choisir un toit pano­
ramique ou des pneus larges. Par
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