34 // Mercredi 11 mars 2020 Les Echos
Aon et Willis Towers Watson auront du pain
sur la planche de leurs synergies.
« Courtier : personne dont la profession consiste à mettre en relation
vendeurs et acheteurs. » Aon a pourtant du mal à rester bien en cour à Wall
Street quand il s’agit de son grand mariage avec Willis Towers Watson,
valorisé 30 milliards de dollars environ, comme le montrent leurs actions
après les bans (– 16,5 % et – 7,5 %). Le numéro deux mondial du courtage
d’assurances a profité du Black Monday, comme s’il fallait profiter discrète-
ment dans le bruit ambiant d’une fenêtre de fusions et acquisitions qui
allait se refermer temporairement. Le financement tout en cash n’en a pas
moins le grand mérite de rassurer les investisseurs indisposés par la montée
perpétuelle de l’endettement. Quant à la modicité de la prime (16, 2 %) elle
doit être relativisée par le rendement du cours d’Aon depuis un an – quand
le projet de rapprochement avait germé –, presque deux fois plus élevé que
celui de sa cible. Sur le papier, les 800 millions de synergies annuelles avant
impôts correspondent à une création de valeur de 10 milliards de dollars,
dont 63 % reviendront aux actionnaires de l’acquéreur dans le nouvel
ensemble. Ce montant important dépasse la prime consentie d’environ
4 milliards sur la base des cours de vendredi. Mais voilà, ces efforts représen-
tent quand même près de 4 % des ventes combinées. Du pain sur la planche
pour une profession sommée d’innover sans relâche, pour rester à la pointe
du service aux clients, qui n’aiment pas toujours la concentration de l’offre.
Des courtiers peu en cour
La nouvelle page d’histoire
financière écrite par les marchés,
avec un inédit double choc d’offre
et la plus forte correction
boursière intervenue depuis au
moins trente ans, sans tendance
baissière de fond, fait oublier
qu’elle a aussi des similitudes
avec des épisodes précédents.
Citi établit un parallèle avec
les turbulences de 2011-2012, de
2015-2016 et de 2018, lorsque la
chute des marchés avait outre-
passé l’évolution, plus favorable,
des bénéfices des entreprises.
En intégrant la goutte pétrolière
au vase du coronavirus,
les analystes de la banque
américaine font passer leurs
prévisions d’une stabilité
des profits mondiaux à un recul
de 10 % cette année, moins fort
que la chute des marchés à la date
du 9 mars (–18 %). Pour transfor-
mer l’actuelle panique en dépres-
sion, il faudrait une déprime
des résultats que peu d’analystes
envisagent aujourd’hui.
La correction boursière nécessiterait une forte révision des bénéfices pour s’aggraver.
Jack l’Enregistreur
Jack Dorsey laisse la voie libre aux fonds
chez Twitter.
« Dessinez vos idées », conseillait à ses débuts Jack Dorsey. Le patron
de Twitter n’a cependant pas eu besoin d’un dessin, une fois apposée
sa signature sur la trêve conclue avec le tandem constitué par deux
des plus grands fonds américains, l’un connu pour couper les têtes,
l’activiste Elliott, et l’autre pour les remplacer, le gourou californien
de la technologie, Silver Lake. S’il a sauvé à très court terme son siège
de directeur général, le fondateur du site de microblogging ne se fait
pas d’illusions. Les noms de son successeur ne vont pas tarder à fleurir
dès que se mettra en chasse le comité mis en place au sein du conseil
d’administration à cette fin, à la demande expresse d’Elliott et de Silver
Lake, qui y auront leurs représentants. Celui de Sheryl Sandberg,
la patronne des opérations de Facebook, est déjà sur les lèvres des
investisseurs depuis longtemps. Plus impliqué dans son autre
entreprise, S quare, Jack Dorsey a joué le rôle de chambre
d’enregistrement d’un accord qui prépare à terme une possible
acquisition par dette (LBO) par les deux fonds. En investissant
1 milliard de dollars à travers une obligation convertible en actions,
Silver Lake fournit la moitié du financement d’un programme
qui permettrait de racheter 5 % du capital avec une prime de 35 %.
Elliott s’est réservé le droit de reprendre ses escarmouches
en assemblée générale l’an prochain. Bientôt Jack l’Eventré?
// Budget de l’Etat 2020 : 39 9,2 milliards d’euros // PIB 2019 : 2. 47 9,4 milliards d’euros courants
// Plafond Sécurité sociale : 3.428 euros/mois à partir du 01-01-2020 // SMIC horaire : 10,15 euros à partir du 01-01-202 0
// Capitalisation boursière de Paris : 1.827,78 milliards d’euros (au 06-01-2020)
// Indice des prix (base 100 en 2015) : 10 3,55 en décembre 2020 // Taux de chômage (BIT) : 8,6 % au 3e trimestre 2019
// Dette publique : 2.415,1 milliards d’euros au 3e trimestre 2019
=
Les chiffres de l’économie
Un sentiment de déjà-vu
crible
EN VUE
Thomas Tuchel
L
’ entraîneur du PSG n’est pas
maladroit des pieds, mais c’est
d’abord une tête. Il n’a fallu que
quelques mois après son entrée en fonc-
tion parisienne à cet ancien défenseur
central allemand pour parler plus que
convenablement notre langue qu’il ne
connaissait pas. Obligé de renoncer à la
promesse d’une brillante carrière de
footballeur international à vingt-quatre
ans, à la suite d’une blessure au genou
en 1998, le Bavarois a repris ses études
avec l’idée de devenir pilote d’hélicop-
tère de secours. Finalement, ce sont plu-
tôt les clubs qu’il a entraînés qui ont
connu des décollages spectaculaires,
particulièrement ceux de Mayence et
du Borussia Dortmund, face auquel se
retrouvent ce soir, à huis clos pour cause
de coronavirus, les joueurs du PSG. Sa
réputation de super technicien et de
coach, qu’il ne vaut mieux pas contra-
rier, lui a valu d’être surnommé « le Pro-
fesseur ». Et beaucoup d’argent aussi,
pour ce fils de famille modeste, dont la
mère faisait des ménages : à quarante-
six ans, on estime sa fortune person-
nelle à 7 millions d’euros, et ses gains à
Paris se montent à plus de
600.000 euros par mois. Lui qui dut
arrondir ses fins de mois, quand son
accident le priva des stades, en tra-
vaillant dans une boulangerie d’Ulm et
comme serveur d ’un bar b ranché à Stut-
tgart, s’est habitué à un train de vie
modeste et discret, avec sa femme Sissi
et leurs deux enfants, loin des extrava-
gances de ses champions. Puisqu’o n lui
reproche de ne pas toujours savoir les
gérer, hors et sur le terrain, peut-être ce
lecteur de Montaigne devrait-il s’inspi-
rer du conseil du sage humaniste : « Il
faut avoir un peu de folie, si l’on ne veut
avoir plus de sottise. »
Le CAC 40 encore dans le rouge
- Au lendemain d’un effondre-
ment généralisé sur les indices
actions, la Bourse de Paris a fini
dans le rouge mardi. L’indice
CAC 40 a chuté de 1,5 %, à
4.636,31 points, dans un volume
d’échanges très étoffé de 9,25 mil-
liards d’euros.
La veille, la place parisienne
avait connu sa pire séance depuis
la dernière grande crise financière,
s’effondrant de 8,39 %.
Mardi, le marché a ouvert sur
un rebond de 1,29 %, soulagé par
la remontée des prix du pétrole
et par des espoirs de mesures bud-
gétaires pour lutter contre le coro-
navirus. Il est même parvenu à
grimper de 5 % en fin de matinée.
Mais il a à nouveau basculé en
territoire négatif en fin de séance.
Ailleurs, en Europe, la tendance
a été i dentique. La Bourse de
Francfort a poursuivi sa chute.
Le DAX a perdu 1,41 %.
Violemment malmenées lundi,
les valeurs pétrolières et parapétro-
lières ont un peu redressé la tête :
Total a repris 1,73 % après avoir
lâché 16,6 % lundi, CGG a gagné
1,13 % au lendemain d’un effon-
drement de 37,5 % et Vallourec a
avancé de 0,41 %.
Les valeurs bancaires ont
rebondi elles aussi timidement :
Société Générale a pris 2,97 %
contre une chute de 17,6 % lundi,
et BNP Paribas 2 ,50 %.