Les Echos - 04.03.2020

(Darren Dugan) #1
confie le projet à Gérard Detour-
bet et Jean-Marie Hurtiger,
qui inventeront le principe du
« design to cost ». Le coût devient
une contrainte de départ. Tout
est réinventé, simplifié, pour
que la voiture soit le moins cher
possible.

Une innovation absolue
La fabrication est localisée dans
des pays à bas coût (au départ, la
Roumanie) et fait appel à des four-
nisseurs locaux. « Il s’agit de se
concentrer sur l’essentiel des
besoins des clients », insiste Xavier
Martinet. L’essentiel à petit prix,
pour des véhicules robustes au
design attractif. « C’est une innova-
tion absolue, pas au sens technolo-
gique mais en termes d’idée », com-
mentait alors Louis Schweitzer.
Le succès ne se fait guère atten-
dre. Lancée en 2004 en Rouma-
nie, la Logan est rapidement
déployée en Europe de l’Ouest.
Renault décline ensuite le concept

sur d’autres modèles de Dacia
(Sandero, Duster), qui tirent tou-
jours la croissance du groupe : les
ventes de la marque roumaine
n’ont cessé d e progresser, à
737.000 unités l’an dernier.
Un savoir-faire qu’aucun cons-
tructeur n’a réussi à égaler jusqu’à
présent. Renault l’a égale-
ment décliné sous sa propre mar-
que dans les pays émergents, avec
aussi de nouveaux modèles
comme la Kwid en Inde (2015)
et au Brésil (2017) ou la K-ZE en
Chine (2019).

Emissions de CO 2
supérieures à la moyenne
Au total, la gamme dite « Global
Access » a représenté 1,45 million
de ventes l’an dernier, soit 40 % du
total du Losange dans le monde.
La Kwid à elle seule s’est vendue à
184.000 unités. Ce succès est
d’autant plus remarquable que les
analystes estiment la gamme très
rentable, grâce aux volumes

importants et à la vente d’options
à forte marge.
Un risque majeur plane toute-
fois sur ce segment « Global
Access ». Selon les chiffres que
vient de publier le cabinet Jato, les
émissions moyennes de CO 2 de
Dacia en Europe (125,6 g/km)
étaient bien supérieures à celle de
Renault (113,3 g/km) en 2019.
Un double handicap pour la
marque. Ses véhicules sont déjà
lourdement pénalisés par les
malus en forte hausse sur les véhi-
cules les plus émetteurs (notam-
ment en France), annulant une
partie des effets attractifs des
petits prix. Mais ils sont aussi loin
de l’objectif moyen fixé par
Bruxelles (95 g/km), alors que les
constructeurs seront soumis à de
lourdes amendes s’ils ne les res-
pectent pas. La Dacia électrique
aura notamment pour objectif de
résoudre une partie de l’équation


  • à condition toutefois qu’e lle
    trouve son public. —A. F.


Le low cost, un pilier de la stratégie du Losange


En lançant aujourd’hui une Dacia
électrique, R enault veut appliquer
au lithium-ion l’un de ses grands
savoir-faire : le low cost. « Après la
Logan, qui a introduit il y a quinze
ans le concept du “Global Access”,
puis le Duster, qui l’a appliqué au
SUV, la Spring sera la troisième
révolution de Dacia », avance
Xavier Martinet, le directeur mar-
keting du groupe.
Le concept est né au début des
années 2000, après le rachat par
Renault du r oumain Dacia.
L’ancien président du Losange,
Louis Schweitzer, a alors la vision
d’une voiture à 5.000 dollars. Il

Renault a bâti une large
part de sa croissance sur
sa gamme « Global
Access ». Un concept
innovant, qui reste inégalé
à ce jour, mais qui pourrait
être menacé par la
nécessité de vendre des
véhicules moins polluants.

Lucas Mediavilla
@Lucas_Medv


Waymo veut passer la vitesse supé-
rieure. La filiale d’Alphabet, spécia-


lisée dans les voitures sans conduc-
teur, a annoncé mardi un tour de
table de 2,25 milliards de dollars.
Menée pour la première f ois auprès
d’investisseurs extérieurs, cette
levée de fonds a pour objectif de
permettre à l’entreprise de se
déployer à l’échelle mondiale.
La firme de capital-investisse-
ment Silver Lake, le fonds de pen-
sion du Canada (CPPIB) ainsi que le
fonds souverain d’Abu Dhabi
(Mubadala Investment Company)
sont les principaux partenaires
financiers de l’opération. Andrees-
sen Horowitz, AutoNation a insi q ue
la maison mère Alphabet ont aussi
mis au pot. Le groupe américain
compte sur cette « injection de capi-
tal et d’expertise » pour monter en
puissance. Pour l’instant, son ser-

vice de robo-taxis n’est commercia-
lisé qu’à Chandler, en Arizona. Mais
alors qu’il mène depuis des mois
des essais dans une vingtaine
d’autres villes américaines, et vu la
commande de 20.000 SUV électri-
ques i-Pace passée à Jaguar en 2018,
le déploiement commercial pour-
rait s’accélérer avec ce nouvel
apport d’argent frais. A condition
que le contexte réglementaire le
permette.
Produit p hare d e la filiale de G oo-
gle, le service de robo-taxis n’est pas
le seul projet sur lequel planche
actuellement Waymo. L’entreprise
américaine a ainsi profité de cette
levée de fonds pour dévoiler
Waymo Via, un service de livraison
de marchandises (par camion, si
l’on se fie aux illustrations publiées

par le groupe) qui embarquera sa
technologie de conduite autonome.
Incontestablement en avance sur
ses concurrents dans le développe-
ment des véhicules sans chauffeur,
Waymo brûle un cash considérable
depuis sa création en 2016 dans les
laboratoires de Google. Cette nou-
velle levée de fonds illustre, s’il en
était encore besoin, la forte inten-
sité capitalistique de ce secteur en
plein essor et les milliards qu’il fau-
dra encore à Waymo pour arriver
sur les routes du monde entier.

Partenariats extérieurs
Google, de son côté, cherche depuis
quelques mois à rationaliser les
dépenses de ses projets « moon-
shots » (voitures autonomes, dro-
nes, s anté...) et n’hésite plus à sollici-

ter des partenaires extérieurs pour
financer ses différentes filiales.
Sundar P ichai, p atron d’Alphabet et
de Google, l’a confirmé aux analys-
tes il y a quelques semaines, en
marge de la présentation des résul-
tats annuels du groupe.
« Pour certains paris, nous avons
amené des investisseurs externes, d es
personnes avec une certaine exper-
tise, avait-il alors expliqué. Je pense
qu’avec Alphabet nous avons un
cadre flexible, qui nous permet à la
fois d’avoir l’indépendance dont
nous avons besoin et de créer des
synergies, comme pour nos investis-
sements dans l’intelligence artifi-
cielle. » L’arrivée d’une batterie
d’investisseurs e xtérieurs au capital
de Waymo illustre parfaitement ce
nouveau virage.n

AUTOMOBILE


La filiale d’Alphabet
commercialise depuis
2018 un service de
robo-taxis en Arizona.


Elle compte sur
cet apport de 2,25 mil-
liards de dollars
pour se déployer
à l’échelle mondiale.


Vo iture autonome : Waymo se finance en dehors de Google


trique dans sa gamme, le groupe
estime désormais que la technolo-
gie est assez mûre. « Dacia utilise des
technologies éprouvées. Accessible ne
veut pas dire pas moderne », poursuit
Xavier Martinet. Cette question de
l’accessibilité est cruciale dans
le véhicule électrique. Le prix y reste
l’un des grands freins à l’achat, et les
subventions sont encore nécessai-
res pour déclencher les actes de
vente. Tous les constructeurs cher-
chent la martingale, alors que les
voitures à batteries disponibles
sur le Vieux Continent ne se vendent
pas aujourd’hui à moins de
25.000 euros, après subventions.
« L’objectif n’est pas d’avoir les
objets, mais bien de les rendre accessi-
bles au plus grand nombre. La grande
bataille sur la période 2020-2025 sera
celle de la baisse des coûts, pour ren-
dre les véhicules électriques aborda-
bles », a insisté mardi Carlos Tava-
res, le président du directoire de
PSA, lors d’une table ronde avec des
journalistes. Le groupe au lion vient
d’apporter une réponse en présen-
tant le Citroën AMI, un petit véhi-
cule lithium-ion sans permis à
moins de 7.000 euros. Un créneau
sur lequel Renault est déjà présent
avec le Twizy, toutefois légèrement
plus cher.
Mais la Dacia Spring sera la pre-
mière « vraie » voiture électrique à
être lancée sur ce créneau du low
cost, emblématique de la marque.
L’argument sera-t-il suffisant pour
faire décoller les ventes? Même si
elle est moins chère que ses concur-
rentes à batterie, il n’en faudra pas
moins débourser plusieurs milliers
d’euros de plus que pour les modèles
thermiques de la marque, Sandero
ou Duster, dont les premiers prix
ressortent respectivement à 8.
et 12.500 euros.

a
Lire l’éditorial de David Barroux
sur lesechos.fr

lEn plein élargissement de son offre de véhicules électriques, Renault inaugure le segment des voitures lithium-ion


à bas prix sur le Vieux Continent avec sa marque Dacia.


lAvec une autonomie de 200 kilomètres, la Spring devrait être vendue autour de 15.000 euros, après subventions.


Renault lance la voiture électrique

à bas coûts en Europe

Dotée de cinq portes
et de quatre vraies
places, la Spring
sera commercialisée
à partir de 2021.

Anne Feitz
@afeitz


Une « vraie voiture » électrique à
moins de 15.000 euros en Europe?
C’est le pari que lance aujourd’hui
Renault avec sa marque Dacia.
Faute de concept-car, resté sur le
stand du Salon de Genève annulé en
dernière minute pour cause de coro-
navirus, le groupe au losange a dif-
fusé mardi par communiqué les
premiers détails de sa future voiture
électrique à bas coûts. Inspirée de la
City KZE, lancée e n Chine en novem-
bre dernier, la Dacia Spring est un
petit SUV de segment A, de moins de
4 mètres donc, au look sportif et aux
lignes musclées. Elle sera commer-
cialisée à compter de 2021.
« Ce sera le véhicule idéal pour des
particuliers en utilisation urbaine,
mais aussi pour des flottes ou des ser-
vices d’auto-partage », explique
Xavier Martinet, directeur marke-
ting du groupe. Dotée de cinq portes
et de quatre vraies places, la Dacia
Spring affichera une autonomie
limitée à 200 kilomètres (en norme
WLTP) – ce qui expliquera aussi son
petit prix.


Technologies éprouvées
Ce nouveau véhicule low cost à bat-
terie misera sur une mutualisation
des investissements avec la KZE chi-
noise. « Mais elle sera adaptée à
l’Europe, avec toutes les normes de
sécurité requises », insiste Xavier
Martinet. Ni son lieu de fabrication
ni son futur prix n’ont été dévoilés.
Mais, selon nos informations,
l’ordre de grandeur de 15.000 euros,
déduction faite des subventions,
n’est pas absurde. « Notre objectif
sera de présenter le meilleur rapport
qualité-prix », poursuit Xavier Mar-
tinet. Alors qu’il y a deux ans encore,
Dacia ne jugeait pas pertinent
d’introduire une motorisation élec-


AUTOMOBILE


L’entreprise
a également dévoilé
un service
de livraison
de marchandises,
qui embarquera
sa technologie de
conduite autonome.

Amos Fricke

Une nouvelle Alpine à venir


Le Losange a annoncé mardi le lancement d’un nouveau
modèle de sa marque de luxe, l’Alpine Légende GT, plus
luxueux que la berlinette A110. Ressuscitée en 2017
avec l’Alpine A110, la marque a affiché des ventes de
2.094 unités en 2018 et de 4.835 l’an dernier, mais elles
s’annoncent en recul pour cette année. Interrogé par
l’agence Reuters, le directeur de la marque, Patrick
Marinoff, s’est dit confiant sur son avenir.


ENTREPRISES


Mercredi 4 mars 2020Les Echos

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