Les Echos - 13.03.2020

(sharon) #1
LES ECHOS WEEK-END – 41

SPÉCIALPARIS


Quand tous les taxis parisiens arboreront un
bleu azuréen parsemé d’une touche de cirrus
blancs, les couleurs de sa compagnie, et
ne rejetteront plus que de l’eau, Mathieu
Gardies aura réalisé son rêve.Hype,première
flotte de taxisàhydrogène du monde,n’est
encore qu’une start-up, mais elleadéjà pas mal
de kilomètresàson compteur...«Enpromenant
les poussettes de mes enfants sur les trottoirs
parfois très étroits de mon quartier,dans le XIe,
je me suisrendu compte que mes gamins
pouvaient seretrouverà30cmdes pots
d’échappement. C’est un problème de santé
publique, surtout quand ils sont asthmatiques!»
raconte cetex-banquier de 48 ans.C’estainsi
qu’il crée, ilyaplus de dix ans, laSociété du taxi
électrique parisien(STEP), rue de la Roquette...
Mais la route sera longue et semée
d’embûches.«Latechnologie n’était pasévidente,
le sujet très politique, et les partenaires pas
alignés »,résume Mathieu Gardies.Àlafaveur
d’un rapport sur lepotentiel de l’hydrogène
et du lancement devoituresàhydrogène
par les constructeurs asiatiques, il décide
finalement en 2014 de troquer la batterie
pour la pileàcombustible.L’hydrogène
ales avantages de l’électrique(silence, confort,
conduite, aucun rejetpolluant)sans les
inconvénients (plus de 500 km d’autonomie
et le plein en trois minutes). Ilyabien sûr
des freinsàson essor:peu de modèles
commercialisés et très chers (60 000 euros
et plus),peuoupas de stationspour
s’approvisionner... Mais Mathieu Gardies frappe
àlaporte d’Air Liquide, le géant du gaz.C’est

DESTAXIS


CARBURANT


ÀL’HYDROGÈNE


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la fin de la galère.«Ils ont assez vite acheté
l’idée et m’ont mis en contact avecHyundai,
ce qui nousapermis de programmer le lancement
de Hype pour laCOP21 »aveclastation dupont
de l’Alma.«Letaxi est le parfait point d’entrée
pour développer lavoitureàhydrogène,
comme les flottes devéhicules d’entreprise,
les bus, les bennesàordures, les camions,
les trains »,souligne Pierre-ÉtienneFranc,
vice-président d’Air Liquide.
Hype prend son essor.En2017, la Caisse
des dépôts entre au capital. La même année,
Air Liquide installe une nouvelle stationàOrly,
puis aux Loges, près deVersailles, etàRoissy.
En 2018, une nouvelle structure est créée,
àlafaveur de l’entrée de nouveaux investisseurs
(Toyota, IdexetKouros)pouracheter
lesvéhicules, les licences (120 000 euros
en moyenne)etconstruire les stations (plus
de 1million d’euros chacune).Hype espère
déployer600 taxis dans la capitale en 2021
contre 130 aujourd’hui... Dans sa ligne de mire,
lesJeux olympiques de 2024àParis, dont
Toyota est partenaire officiel. Et un objectif
qui semble unpeuprésomptueux:faire rouler

au gaz l’ensemble des 50 000 taxis etVTC
parisiens !«C’est au niveau préfectoral que cela
bloque encore»,déplore Mathieu Gardies.
Hype se rêveen«Uber du zéro-émission »,
mais pas du toutaveclamêmepolitique sociale,
se plaîtàdire son patron.Seschauffeurs,
tous salariés, disposent d’un package complet
(véhicule, entretien,hydrogène et mise
en relation client via l’appli)pendant
trois ans et touchent une commission de 30%
qui augmente au gré de leurs recettes.
Un modèle plutôt généreux qui nepermet pas
encoreàlastart-up de gagner de l’argent, on
s’en doute. Mais le prix de la pileàcombustible
devrait baisser,tout comme celui duvéhicule
et de l’hydrogène. Mathieu Gardiespeut
commenceràrespirer ets’imagineràLondres,
Lisbonne, Madrid ou Rome... Quepeut-on
lui souhaiter de mieux que de recouvrir de bleu
les bitumes enfumés de nos villes?
LauraBerny

ZÉRO ÉMISSION


DR

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