Coup de Pouce - (11)November 2020

(Comicgek) #1

ILLUSTRATIONS: GETTY IMAGES/E.


L


e ralentissement économique des derniers
mois n’a épargné personne, mais il a tout
particulièrement frappé les femmes, si l’on
se fie aux pros de la finance. «La pandémie
de COVID-19 menace d’effacer les gains
obtenus sur le plan des possibilités économiques of-
fertes aux femmes, creusant les écarts qui persistent
entre les sexes en dépit de 30 ans de progrès», clamait
le Fonds monétaire international (FMI) en juillet der-
nier, dans un article de blogue cosigné par sa directrice
générale, Kristalina Georgieva.
Et les Canadiennes n’échappent pas à la règle mon-
diale, selon un rapport de la banque RBC, aussi publié
en juillet, qui conclut notamment qu’en quelques
mois, la crise sanitaire «a fait passer la participation
des femmes au marché du travail d’un sommet histo-
rique à son plus bas niveau depuis plus de 30 ans».

POURQUOI UN TEL ÉCART?
Plusieurs raisons expliquent que les femmes sont plus
à risque de glisser vers une situation financière pré-
caire en cas de crise comme celle que l’on traverse.
D’abord, parce qu’elles sont plus nombreuses à occu-
per des postes dans le domaine des services (restaura-
tion, hôtellerie, loisirs, soins personnels, tourisme,
vente au détail), un des secteurs les plus touchés par le
confinement imposé et offrant souvent de bas salaires.
«Des milliers de travailleuses se sont donc retrouvées
dans une situation économique incertaine, et qui per-
dure puisque la reprise est plus lente dans ce secteur»,
commente Sophie Desautels, syndique autorisée en
insolvabilité chez Raymond Chabot.
Puis parce qu’elles représentent les deux tiers des
employés à temps partiel, un statut d’emploi qui tend
à fragiliser la stabilité économique, note l’économiste
en chef à CPA Canada, Francis Fong, dans son rapport
Le travail précaire au Canada: qui sont les personnes réelle-
ment à risque? publié en 2018. Autre élément clé de ce
même rapport: les jeunes femmes et les femmes âgées
sont plus susceptibles que d’autres groupes démogra-
phiques d’occuper un emploi occasionnel, ce qui les
place encore une fois dans une position de
vulnérabilité.

LE SALAIRE LE PLUS BAS
Il faut ensuite dire que les femmes assument encore
aujourd’hui une grande part des responsabilités fami-
liales et ménagères (un travail non rémunéré, doit-on
le rappeler?). Et elles gagnent le revenu le plus élevé
dans seulement 29 % des ménages ayant deux sources
de revenus, selon la RBC. «Lorsque les garderies et les
écoles ont fermé, ce printemps, c’était en général le
partenaire qui gagne le salaire le moins élevé qui a dû

réduire ses heures de travail ou quitter son emploi
pour s’occuper des enfants et des personnes vulné-
rables dans son entourage... et c’était souvent la
femme», explique Indu Krishnamurthy, directrice
générale de Microcrédit Montréal, un organisme à but
non lucratif qui offre de l’accès au microcrédit et de
l’accompagnement aux femmes entrepreneures, entre
autres. De février à avril, au Canada, il y avait plus de
femmes que d’hommes au chômage. Le nombre d’em-
plois a chuté de 16,9 % pour les femmes et de 14,6 %
pour les hommes, selon une enquête de Statistique
Canada.
Puis, une fois le confinement levé, les femmes ont
pris plus de temps à revenir sur le marché du travail à
temps complet. Selon la RBC, environ 45 % des per-
sonnes touchées par une réduction de leur nombre
d’heures de travail au plus fort de la crise étaient des
femmes, mais elles n’ont été que 35 % à voir leurs
heures augmenter lors de la reprise.

ÉDUCATION ET PLANIFICATION
Indu Krishnamurthy se dit consciente que la finance
n’est pas un sujet qui intéresse tout le monde, mais elle
rappelle l’importance d’une bonne éducation finan-
cière pour toutes les femmes. «La finance est com-
plexe, admet-elle. Mais c’est important de s’informer,
de mieux la comprendre et d’aller chercher des
conseils, que ce soit auprès des associations de
consommateurs, des Associations coopératives d’éco-
nomie familiale (ACEF) ou de leur institution
financière.»
Sophie Desautels invite pour sa part les femmes à se
faire un budget. «Je leur recommande de bien évaluer
leurs habitudes de consommation, puis de prévoir les
dépenses importantes en famille», résume-t-elle. Puis
celles qui éprouvent des difficultés financières ne
doivent pas attendre avant d’aller chercher des
conseils. «Parce que plus elles attendent, plus leur si-
tuation financière risque d’être difficile à redresser»,
conclut-elle. »»

«DES MILLIERS DE TRAVAILLEUSES


SE SONT RETROUVÉES DANS UNE
SITUATION ÉCONOMIQUE INCER-

TAINE, ET QUI PERDURE PUISQUE


LA REPRISE EST PLUS LENTE DANS


LE SECTEUR DES SERVICES.»


— SOPHIE DESAUTELS, syndique autorisée en insolvabilité
chez Raymond Chabot

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NOVEMBRE 2020
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