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Prenez
de la
hauteur!
Un jour, des hommes
ont bravé
l’inaccessibilité
et l’ont écrit.
rents se nommant Claude Brasseur, Pierre Béni-
chou ou Alix Chevassus, tous récemment disparus
par temps de Covid-19. Ce fils de septembre semble
avoir regardé sa jeune vie en amateur déconcerté,
avant d’épouser ce lieu commun que l’on s’efforce
en vain de déjouer, et que l’on nomme pourtant
une génération.
Le passé est-il un océan ou une fondrière? A-t-on
vraiment cru que le futur ressemblerait à un tour
du magicien Gérard Majax, avant de danser en
1986 à côté de Françoise Sagan? Qui étaient ces
filles nommées Laura Smet, Lolita Pille ou Ludivine
Sagnier? « Ce n’est pas parce que je voyais beaucoup
de monde que j’étais moins seul », note Beigbeder, opé-
rant une rotation de perspective pour conclure :
« Mon enfance a changé. » Aujourd’hui jeune père
quinquagénaire, il se voit en « ramasseur de Play-
mobil » dans un salon jonché de poupées coui-
neuses, pour finalement constater : « La génération
X [la sienne] s’est beaucoup droguée pour oublier
Un barrage contre l’Atlantique,
de Frédéric Beigbeder
« Pourquoi ai-je voulu revenir sur cette pointe qui ne
devrait plus exister?
En regardant l’océan, je me rends compte que je
voudrais écrire une phrase qui soit en quelque sorte
comme son reflet miroitant, une phrase paisible et
étincelante, qui ne raconte rien d’autre que son propre
flot, qui aille et vienne, qui se contente d’exister sous
le soleil, une phrase qui serait uniquement liquide,
limpide, imposante mais sans prétention, une phrase
qui vive, bouge, qui lèche la plage comme l’écume sur
le sable, une vague confiante et infinie qui avance et
recule sur le blanc comme sur un banc de sable, de
gauche à droite et recommence, inlassablement, son
balancement de lettres, son parallélisme littéraire, son
hypnose de mots, une phrases interminable qui fasse
tourner la tête de son lecteur d’ouest en est et
inversement, tel le spectateur d’un match de tennis à
Roland-Garros, une phrase qui ferait tellement d’allers
et retours qu’elle donnerait le tournis, une phrase qui
obligerait à consulter un kinésithérapeute pour guérir
d’un torticolis, et au masseur en blouse verte qui lui
demanderait quel sport a pu causer une telle douleur
à sa nuque, le blessé serait bien obligé d’en dénoncer
le coupable : une phrase, docteur.
(...)
Écrire est la façon la plus discrète de paniquer en
public. »
EX
TRAITS
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