Méditerranée Mer Vivante 20e édition

(jfmeinesz) #1

256 Méditerranée - Mer vivante


Gardons la mer vivante


La pêche artisanale côtière est
multiséculaire sur les côtes
méditerranéennes.
Dans les aires marines protégées, la pêche
artisanale peut constituer une activité durable
reposant sur une ressource renouvelable qui
permet de maintenir le tissu social et culturel
et contribue à l’économie locale sans avoir
d’incidence néfaste notable pour l’environnement.
Depuis 1992, une démarche novatrice, associant
les pêcheurs corses et les gestionnaires des
aires marines protégées, accompagne la mise en
place du Parc marin International des Bouches
de Bonifacio (entre la Corse et la Sardaigne). En
collaborant aux programmes de recherche ayant
pour objet l’évaluation des stocks exploités,
les pêcheurs professionnels ont contribué à la
connaissance de leur activité et plus généralement
de l’environnement marin des Bouches de
Bonifacio.
La gestion de ces espaces protégés a été
déterminante dans le maintien du capital
halieutique. Ainsi, les rendements des filets
trémails sont en augmentation significative
dans les zones où les activités de loisir sont

règlementées (où la chasse sous-
marine est interdite) et la pêche
artisanale reste autorisée dans des
conditions restrictives (nombre limité de navires,
d’engins de pêche... ).
Parallèlement aux suivis des rendements de
pêche, les poissons des Bouches de Bonifacio font
l’objet d’un suivi scientifique régulier. Près de 500
heures de plongée ont permis de constituer une
base de données aujourd’hui reconnue comme
une des plus importantes sur les poissons du
littoral méditerranéen. Ces suivis à long terme
permettent aux gestionnaires de la Réserve
naturelle des Bouches de Bonifacio et du Parc
national de l’Archipel de la Maddalena de disposer
d’une évaluation fiable de l’état de santé des
peuplements de poissons de la zone littorale. Des
augmentations spectaculaires de biomasse sont
démontrées dans toutes les zones de protection
renforcée des Bouches de Bonifacio et ce, en moins
de six ans de gestion effective. « L’effet réserve »
est très important pour des espèces sensibles à
l’impact de la chasse sous-marine comme le corb
(Sciaena umbra) : sa biomasse moyenne est 60 fois
supérieure dans les zones protégées.
Avec le soutien de l’Union
Européenne, le gestionnaire s’oriente
vers la gestion de segments de
pêche tels que la pêche langoustière
(expérimentations de pêche avec
des nasses) et celle des oursins
comestibles (recherche de méthodes
d’optimisation de la gestion du stock).
Cette longue collaboration, basée sur
une confiance mutuelle entre l’Office
de l’Environnement de la Corse
et les professionnels de la pêche a
permis de constituer un territoire
d’ingénierie du développement
durable de la pêche artisanale côtière.

La collaboration des pêcheurs corses avec les gestionnaires des espaces marins protégés

Jean-Michel Culioli et Marie-Catherine Santoni, Office de
l’Environnement de la Corse.
Unité scientifique de la Réserve naturelle des Bouches de Bonifacio

Les auteurs de l’article mesurant les prises à bord d’un pointu de
pêcheurs professionnels

© Pierre CLAVERIE

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