La Culture Fang Beti Bulu

(Richellius) #1

situation qui se présenterait à eux. En un mot, les épreuves constituaient un véritable « chemin de croix
» pour les candidats. Le retour de cette expédition en forêt se fait au rythme du chant du so, en tirant les
lianes-serpents-pythons qu’ils ont coupé et dont usaient les initiés pour les bastonner. La rupture avec
l’enfance était consommée. Durant leur arrivée, les femmes et les non-initiés ne devaient pas voir les
mvôn ; ils devaient se cacher sinon celui qui violait l’interdit voyait son corps se couvrir d’ulcères et
mourir si confession n’était pas faite. Les arrivants vont désormais s’atteler à la construction et la
purification de l’esam sô, le corps toujours fardé de poudre de padouk pour masquer les entailles et
autres éraflures laissés par les sévices corporels.


Purification, L’édification De L’esam Sô

La purification de la cabane constitue sans nul
doute la principale étape de sa construction. En
effet, avec les piquets, les rotins ramenés de la
brousse et les raphias laissés à sécher sur la
toiture lors du départ en brousse, les mvôn avec
les initiés vont construire la cabane, fermée coté
village ouverte sur le Ndzôm sô et faisant face à
l’entrée du tombeau souterrain. Il faut
maintenant la purifier. La purification consiste à
faire s’affronter les candidats d’aujourd’hui et
ceux des initiations faites l’année précédente
voire ailleurs. En effet, réunis dans la cabane, les
mvôn en cours d’initiation sont attaqués,
provoqués, insultés et défiés par les premiers
initiés tous de blanc peints. Pour exciter les
premiers, les arrivants soufflent dans la cabane
de l’argile blanche mélangée à du piment ; ce «
gaz lacrymogène » va enivrer les protagonistes
qui vont se battre à l’aide de machettes, lances, haches et verges. Parfois c’est au sujet de la nourriture
que les étrangers tentent de manger seuls. Le zomoloa ; officiant principal fait durer les affrontements
selon son bon vouloir. Après ces affrontements et démonstrations de forces et de courage, les mvôn vont
observer entre eux tous les interdits signalés au début de cette partie.


La Fête De Ndzom Sô

Précisons que l’arbre abattu lors de l’expiation de l’organiseur n’était pas abandonné en brousse. Une
partie de son tronc était coupée, sculptée et ornée par un homme désigné par les initiés. La sculpture
représentait d’un côté un chasseur armé d’un fusil, et de l’autre un léopard, un serpent... Le jour de la
fête donc, les initiés partent en brousse chercher le ndzom, en chantant le chant du So, pendant que les
femmes et les profanes se cachent. Les mvôn étrangers quant à eux dansent dans la cour, au son du
balafon, de la flûte et de tambours. On place le Ndzom au centre de l’esam, des lianes le reliant aux murs
de la cabane et lui-même débordant par sa hauteur la cabane. Une échelle permet d’y accéder de
l’intérieur du sanctuaire. Les Mvôn en cours d’initiation vont se baigner très tôt le lendemain, se farder
de poudre de padouk ; ceints et couronnés de feuillages, ils vont danser devant le ndzom, devant toutes
l’assistance également. C’est au cours de cette fête que beaucoup de jeunes (y compris les candidats)
rencontraient les femmes qu’ils fréquenteront par la suite ; à la fin de cette célébration, les mvôn
entraient dans l’esam et étaient coupés de la vie publique pour une longue période encore. Pour l’entrée,
après une dernière exhibition dans tout le village, et loin du regard des femmes, les parrains procédaient
chacun à une série d’incisions dorsales sur son candidat, puis le transportait nu, sur ses épaules, le visage
contre le dos du parrain et la tête vers le bas jusqu’à l’esam. C’était la réclusion définitive des candidats
qui allaient recevoir un enseignement pour parachever leur initiation.

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