J'irai manger des khorovadz

(nextflipdebug2) #1
Du coté de la force lumineuse

être fier de sa fille parlant en anglais avec un étranger. Il insiste
lourdement et sa fille ne pouvant plus retenir son embarras et son
accablement explose en sanglots. La tête entre les mains elle court
trouver une échappatoire dans la solitude de sa chambre au fond du
couloir. J’aurais voulu disparaître. C’était sans compter sur l’entêtement
du père. Il s’obstine et va extraire sa fille de son refuge. Nous
échangeons quelques mots en anglais et j’essaie de la rassurer en vue de
lui faciliter la tâche. Finalement la tension retombe et tout le monde
retrouve un semblant de sourire. La photo sera témoin de cette
réconciliation inespérée. Pour sceller cet instant Nicolae sort sa guitare
et se met à chanter. Ambiance magique. Il me fait presque un récital! On
aimerait suspendre le temps et s’accrocher à l’instant présent. Il est
toujours difficile de se quitter après des moments intenses comme ceux-
là! On partage l’intimité brute et transparente d’une famille que l’on ne
connaît pas et il faut déjà repartir avancer rouler. Lui retourne à son
labeur quotidien et moi quand même impatient de pédaler poussé par
mon envie d’arriver et mon désir de prouver et de me prouver que je
peux le mener à bien ce périple en dépit de tous ceux qui ont gentiment
essayé de me décourager.
Car je dois vous livrer une confidence : je n’avais quasiment aucune
expérience du voyage à vélo avant de m’engager dans cette odyssée!
Courant juin j’avais rempli mes sacoches de sacs de sable et j’avais
pédalé jusqu’au sommet du col des Limouches près de chez moi à
1 100 m. Je n’avais jamais piloté un vélo chargé. L’essai avait été
concluant. Et puis une semaine avant le départ j’avais pris deux jours et
demi pour éprouver tout l’équipement dont j’avais besoin. Je m’étais
offert une petite randonnée en passant par l’Ardèche région agréable et
propice au vélo mais non dénuée d’exigence. Huit jours avant la date
fatidique il était temps de procéder à un test grandeur nature...
On m’a dit que j’avais du courage et de la persévérance. Je crois
surtout qu’il faut une bonne dose de naïveté et de candeur pour se lancer
dans une telle aventure. Et croire sans concession et joyeusement en son
rêve.

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