J'irai manger des khorovadz

(nextflipdebug2) #1
De l’élégance du pardon


  • Est-ce que je peux t’accompagner?

  • Oui bien sûr pas de problème.
    Il met son pardessus en velours marron et de ses mains brunes et
    calleuses il saisit le bâton qui lui sert de canne. Il glisse ensuite les
    jumelles autour de son cou.

  • Surtout n’oublie pas un vêtement car il fait froid là-haut ajoute-t-il.
    Mes affaires étant sur le vélo resté en bas il se propose de me prêter
    une de ses vestes. Bien ample pour moi j’y rentre à l’aise.
    Avec les chiens de la ferme qui nous accompagnent nous attaquons le
    sentier qui commence directement par une grimpette derrière la maison.
    Je me sens un peu lourd en raison de la quantité de nourriture que je
    viens d’avaler. Les vingt minutes prévues vont se transformer en plus de
    deux heures et nous rentrerons dans la nuit à la lueur de la lampe de
    poche. À 77 ans Robert s’occupe de ses vaches et gravit tous les jours la
    montagne sur des sentiers déraisonnables pour son âge. Aujourd’hui ses
    bêtes n’étaient pas là où elles auraient dû se trouver. Afin de les repérer
    il saisit les jumelles qu’il garde toujours sur lui. Contrairement à leur
    habitude les bovins sont partis loin vers les crêtes. Le voisin vient à la
    rescousse – il a aussi des vaches fugueuses – et il est bien décidé à
    récupérer les récalcitrantes. Chacun y va de son cri essayant de les
    amadouer et de les inciter à revenir. À un moment le papy me demande
    de l’attendre et il va seul plus loin tenter de rapatrier au bercail le bétail
    indiscipliné. Je savoure ces moments pour m’imprégner de la sérénité
    des lieux de la magnificence des couleurs de l’opulence des flots de
    lumière qui s’échappent des nuages avant que le soleil ne se réconcilie
    avec l’horizon. Je ne regrette pas d’avoir répondu à l’invitation.
    Nous redescendons dans l’obscurité suivis par le troupeau qui a daigné
    obtempérer aux appels. Robert m’invite à rester maintenant que la nuit
    est tombée. Le voisin me propose de dîner chez lui. La voisine-chanteuse
    nous sert une soupe de produits de leur potager agrémentée de morceaux
    de viande. C’est un plat complet avec son escorte de légumes crus et de
    pain sans oublier l’inévitable vodka du soir qui accompagne le savoureux
    potage. Après le repas Ike m’emmène dans la pièce à côté vers son
    ordinateur et me fait découvrir ses chants orthodoxes préférés puis il me

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