J'irai manger des khorovadz

J'irai manger des khorovadz

réveillé les consciences de ceux qui avaient oublié leur « arménité ». Si
l’on veut découvrir sa véritable identité ses valeurs intrinsèques il faut
connaître ses origines. Les Arméniens comme les Pieds-Noirs ont
réalisé un formidable travail de mémoire qui ne sera jamais terminé.
Je regrette de n’avoir pas eu envie plus tôt d’interroger les anciens sur
notre histoire mon histoire. La douleur et la déchirure brutale en avaient
fait un sujet tabou pour beaucoup. Maintenant c’est presque trop tard.
Irina Igitkhanyan^114 n’hésite pas à le déclarer : « L’identité
arménienne je la sens très fort au fond de moi. Notre capacité
d’intégration et de résistance qui nous fait travailler dans n’importe
quelles circonstances sans avoir peur de recommencer à zéro notre
vivier de talents musicaux entre autres – la culture est le meilleur
ambassadeur d’Arménie – notre foi qui nous fait grandir... ainsi se
décline notre joie de vivre celle qui nous fera partager jusqu’au dernier
morceau de pain dans une situation socio-économique souvent
complexe sur les traces du passé tragique enduré par notre peuple. »
Un peuple qui a souffert et souffre encore au regard des conditions de
vie de ceux qui sont restés dans le pays. Malgré son petit nombre il a su
donner au monde de grands artistes et prendre sa place au sein des
milieux économiques et politiques. Il attend dans une attitude
revendicatrice apaisée – du moins pour les Arméniens que je connais – la
reconnaissance du Génocide^115 qui ouvrira la voie de la guérison et de la
réconciliation.
À mon grand regret je n’aurai pas le temps de m’arrêter dans ce lieu
de mémoire de l’humanité. Pas le temps de rêver non plus même si le
désir est fort d’imaginer un jour les protagonistes de cette histoire se
tenir ensemble et donner une leçon au monde. Un sondage a révélé
qu’environ un tiers des jeunes Turcs sont favorables à une
reconnaissance du Génocide arménien^116. Winston Churchill a écrit dans

(^114) Irina Igitkhanyan présidente de l’association Delta Culture et femme de l’ambassadeur
d’Arménie aux Nations Unies.
(^115) Reconnu officiellement par la France - Loi votée par le Parlement le 18 janvier 2001.
(^116) 33 % des Turcs de 18 à 26 ans. Sondage à la demande du Mémorial de la Shoah - Le
Monde - avril 2015.